Une discussion sur Kant et les Lumières allemandes
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L'histoire de la réception de Kant en France montre que Kant n'est
pas du tout le sommet des Lumières mais bien le début des
contre-lumières
En 1794
le théologien Blessig se montrait "curieux d'une philosophie dont il a
entendu parler comme d'un rempart possible contre le matérialisme et
l'athéisme"
page 12, De Königsberg à Paris : La Réception de Kant en France (1788-1804)
"Kant, sortie à l’automne 1801, suscite des réactions assez vives :
l’Institut se saisit de la question, les revues parisiennes combattent
les « paradoxes » et « l’obscurité » du kantisme."
La réception cousinienne de la philosophie esthétique de Kant
Condorcet à propos des philosophes allemands (comme Kant): "plus habiles que ceux qui, d'une main maladroite,
s'efforçaient d'étayer l'édifice des superstitions antiques, dont la
philosophie avait sapé les fondements, quelques charlatans tentèrent
d'en employer les ruines à l'établissement d'un système religieux, où
l'on n'exigerait de la raison, rétablie dans ses droits, qu'une
demi-soumission; où elle resterait presque libre dans sa crovance,
pourvu qu'elle consentît à croire quelque chose d'inconpréhensible" "ayant
pour but secret de perpétuer l'ignorance, et de prolonger le règne des
erreurs, on en
a vu les nombreux sectateurs, [...] corrompre la raison par de
brillants paradoxes" "la politique et la superstition employèrent
contre elle tout ce que la connaissance de l'homme peut offrir de
motifs pour se défier de sa raison, d'arguments pour en montrer les
bornes et la faiblesse; et comment on sut faire servir le pyrrhonisme
même à la cause de la crédulité"
DE L ESPRIT HUMAIN. — IX ÉPOQUE
NOTE: "Du
point de vue des Lumières françaises, qui s'expriment vigoureusement
dans cette page de Condorcet, les kantiens sont aussi rétrogrades que
les aristotéliciens." "les
kantiens apparaissent déjà comme des « postmodernes », puisqu'ils
surmontent allègrement, dans un sens nouveau et imprévu des
rationalistes français, l'interdit jeté sur toute division de la raison".
Vincent Descombe. Le Raisonnement de l'ours. Et autres essais de philosophie"
Kant s'oppose à Spinoza, le père des Lumières
"Je
ne comprends rien à votre Spinoza, à ce cartésien de la Kabbale ;
absolument rien, pas même depuis que Jacobi l’a interprété avec les
grâces de son atticisme"
Kant à Moise Mendelssohn
"si on n'admet pas cette idéalité du temps et de l'espace, il ne reste plus que le spinozisme"
Kant Critique de la Raison Pratique, AK. V. 101-102
Autres avis d'auteurs classiques rejoignant l'avis de Willeime sur Kant
Nietzsche: (contre Kant, lire en priorié les paragraphes 8-12 de l'antéchrist)
"D’où
vient l’allégresse qui passa en Allemagne à l’apparition de Kant, dans
le monde de la science qui se compose aux trois quarts de fils de
pasteurs et de maîtres d’école. — d’où vient la conviction allemande
qui maintenant encore trouve son écho, la conviction qu’avec Kant
commence un revirement vers le mieux ? L’instinct théologique dans le
savant allemand devinait ce qui maintenant était de nouveau possible.
Un chemin détourné vers l’idéal ancien était ouvert, le concept du «
vrai monde », le concept de la morale en tant qu’essence du monde (ces
deux plus méchantes erreurs qu’il y ait !) était de nouveau sinon
démontrable, du moins impossible à réfuter, grâce à un scepticisme
subtil et rusé… La raison, le droit à la raison, n’a pas de grande
portée… On avait fait de la réalité une « apparence » ; un monde tout à
fait mensonger, celui de l’essence était devenu réalité… Le succès de
Kant n’est qu’un succès de théologien ; Kant n’était, comme Luther,
comme Leibnitz, qu’un frein de plus à l’intégrité allemande déjà si peu
solide."
https://fr.wikisource.org/wiki/L’Antéchrist_(Nietzsche)
«
[a propos de Kant, Leibniz, Luther…] Ce sont mes ennemis, je l'avoue,
ces Allemands : je méprise en eux toute espèce de malpropreté d'idées
et de valeurs, toute lâcheté devant un oui ou non qui soit franc.
Depuis près de mille ans ils ont tout brouillé, tout embrouillé tout ce
qu'ils ont touché de leurs doigts, ils ont sur la conscience toutes les
demi-mesures, tous les compromis dont l'Europe est malade »
L’Antéchrist, 61
Note: Kant nous dit lui-même qu' "à la théologie biblique correspond, dans le domaine des sciences, une théologie philosophique"
Kant, La Religion dans les limites de la Raison
Bertrand Russel
"Tout
en reconnaissant l’importance historique de Kant présenté à plusieurs
reprises comme le fondateur de l’épistémologie moderne, Russell n’a
cessé d’émettre tout au long de sa carrière philosophique, des
jugements très sévères sur l’auteur de la Critique de la Raison pure.
Ces jugements peuvent paraître excessifs, hâtifs, à l’emporte pièce (« Kant fut une pure calamité », « Kant me rend malade
») mais rien ne serait plus erroné que d’y voir l’expression d’une
méconnaissance, voire le fruit d’une lecture hâtive de l’oeuvre
kantienne. Le jeune Russell, comme en témoigne l’Essai sur les
Fondements de la Géométrie de 1897, avait étudié avec grand soin la
philosophie critique, s’était efforcé de l’ « évaluer » à l’aune de ce
qui constituait à l’époque la « modernité », à savoir la «
métagéométrie » et la logique néohégélienne de Bradley et de Bosanquet.
Le trait remarquable c’est que le jugement porté sur Kant par Russell
demeurera à peu près le même dans ses grandes lignes lors même que
Russell aura abandonné l’« idéalisme » de sa jeunesse, aura
profondément modifié ses conceptions philosophiques et aura trouvé de
nouvelles raisons de s’opposer à la philosophie kantienne. Toujours
néanmoins Kant sera loué pour avoir insisté sur la notion d’a priori
mais blâmé d’en avoir donné une version trop psychologique, trop
empirique. Ce que Russell reproche à Kant, de l’Essai sur les
Fondements de la Géométrie à Human Knowledge son dernier grand ouvrage
philosophique, daté de 1948, c’est d’être trop subjectif, c’est de
permettre que la description du monde soit déterminée par la
connaissance humaine. Cette constance dans la critique de la
philosophie kantienne ne fait peut-être que renvoyer à ce qui constitue
l’unité même de la pensée russellienne, à travers tous ses aléas,
à savoir son réalisme"
Russel Critique de Kant. Jean-Gérard Rossi.
Ayn Rand
https://www.youtube.com/watch?v=OGMcC_jewyE
https://www.youtube.com/watch?v=d2sgJBAGxxo
Alain Boyer, professeur de philosophie à la Sorbonne
"[Alain
Boyer] entend s’inscrire en faux contre la thèse communément admise
selon laquelle Kant serait un penseur typique des Lumières, un
humaniste et un libéral. Contre cette idée reçue, l’auteur soutient que
Kant est avant tout un métaphysicien, tenant de l’absolutisme et de
l’ordre, dont le but manifeste n’est pas de saborder toute spéculation
métaphysique, mais d’assigner des limites au savoir théorique afin de
protéger la religion et la morale des fléaux qui la menacent : le
matérialisme et l’athéisme.
L’interprétation du kantisme comme étant purement et simplement une
critique de la métaphysique spéculative est discutée et relativisée. On
essaye de montrer que le projet kantien est bien de sauver et de
refonder la métaphysique comme « rempart » de la religion.
En limitant la connaissance théorique au phénoménal, Kant sauve le
domaine du suprasensible des hardiesses désastreuses de la spéculation,
qui conduisent inévitablement au scepticisme, et de toute réfutation
empirique, réservant ce domaine pour la seule détermination pratique.
La métaphysique renouvelée s’élève donc tel un rempart dont le but est
la protection de la morale et de la religion."
Alain Boyer. Hors du Kant. Un essai sur Kant.
Kant- métaphysicien dogmatique ou défenseur des Lumières
Sur la croyance de Kant
"Kant,
à titre personnel, reste chrétien" "Kant continue d'adhérer [à
l'espérance chrétienne]." "Je ne songe nullement à nier que Kant soit
chrétien" "la croyance occupe sans doute une place éminente dans sa vie
personelle et, même à certains égards, dans sa philosophie" "la morale
de Kant en effet est aussi l'héritière de la pensée chrétienne" "sa
pensée n'en reste pas moins fondamentalement marquée par le
christianisme"
Luc Ferry, Kant, Une lecture des trois « Critiques », p18/19/104/108/127/165
"C'est
dans le Christianisme que se présente à nous, dans sa pureté absolue,
non seulement la doctrine morale, mais encore un concept du royaume de
Dieu, c'est-à-dire du souverain bien, seul capable de satisfaire aux
exigences les plus rigoureuses de la raison pratique "
Kant, La Religion dans les limites de la Raison
"En
résumé donc, cette étude aura démontré que, si, au cours de ses
premières années de professorat, Kant prenait aussi délibérément le
parti de la religion contre « les libres penseurs », c'est que lui-même
n'avait alors aucune objection contre la foi aux mystères l). De plus,
ce travail aura montré dans quelle mesure la foi au christianisme
pouvait encore à ses yeux se justifier rationnellement, et dansquelle
mesure il s'y référait encore personnellement."
Les idées religieuses de Kant en 1755-1760 (suite et fin). F.
Morelle. Revue Philosophique de Louvain Année 1929 23
pp.280-308
La croyance de Napoléon
Un
soir, à Sainte-Hélène, la conversation était animée; on traitait un
sujet bien élevé : il s'agissait de la divinité de Jésus-Christ.
Napoléon défendait la vérité de ce dogme avec les arguments et
l'éloquence d'un homme de génie, avec quelque chose aussi de la foi
native du Corse et de l'Italien. Aux objections d'un de ses
interlocuteurs qui dans le Sauveur ne semblait voir qu'un sage, un
philosophe illustre, un grand homme, l'empereur répondit :
"
Je connais les hommes, et je vous dis que Jésus n'est pas un homme. Si
vous ne voyez pas que Jésus est Dieu, dit Napoléon à son interlocuteur,
eh bien! j'ai eu tort de vous faire général". " Les
esprits superficiels voient de la ressemblance entre le Christ et les
fondateurs d'empires, les conquérants et les dieux des autres
religions. Cette ressemblance n'existe pas. Il y a entre le
christianisme et quelque religion que ce soit la distance de l'infini". " Le
plus grand miracle du Christ a été de fonder le royaume de la charité:
lui seul a été jusqu'à élever le cœur de l'homme à des
hauteurs inimaginable, à l'annulation du temps; lui seul, créant
cette immolation, a établi un lien entre le ciel et la terre.
Tous ceux qui croient en lui, ressentent cet amour
extraordinaire, supérieur, surnaturel; phénomène inexpliqué et
impossible à la raison".
Sentiment de Napoléon sur le Christianisme : conversations
religieuses (3e éd. rev. et corr.) / recueillies à Sainte-Hélène par M.
le général comte de Montholon... ; par M. le Chevalier de Beauterne ;
avec un dessin de M. Horace Vernet...
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6138553m/texteBrut
Testament religieux de Napoléon Ier, sa profession de foi sur Dieu, sur
Jésus-Christ et sur les principaux dogmes du christianisme
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k61292630/texteBrut
La Divinité de Jésus-Christ démontrée par l'empereur Napoléon Ier à Sainte-Hélène,
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k61283275/texteBrut
http://benoit-et-moi.fr/2013-III/actualites/la-conversion-de-napoleon.html
Napoléon: le traite à la révolution ?
Voir
le commentaire d'Eric Zemmour (grand admirateur de Napoléon) qui
concède dans face à l'info du 2 décembre 2020 (sur Cnews avec Christine
Kelley - écoutez à partir de 56 min)
que Napoléon pouvait abattre les monarchies européennes mais qu'il ne
l'a pas fait parce qu'il voulait être reconnu comme un monarque alors
que les rois étrangers le voyaient comme un révolutionnaire.
Voir
la réaction de son contemporain Beethoven, admirateur de la révolution
qui renie Napoléon après l'avoir encensé lorsque celui-ci décide de se
faire sacrer empereur par le pape.
"
Il déchire le morceau de la partition sur laquelle se trouve le nom de
Bonaparte. « Ce n’est rien de plus qu’un homme ordinaire,
s’emporte-t-il. Maintenant, il va fouler aux pieds tous les droits
humains, il n’obéira plus qu’à son ambition ; il voudra s’élever
au-dessus de tous les autres, il deviendra un tyran ! » Le désastre a
désormais un nom. Beethoven rumine le souvenir de chaque moment passé à
l’ambassade de France à suivre à distance l’épopée de son héros. Ces
pages qui constituent la Troisième Symphonie sont les seules branches
auxquelles il peut se raccrocher. En regardant autour de lui, il a le
sentiment d’avoir été trahi."
https://www.atlantico.fr/decryptage/3576174/l-immense-deception-de-beethoven-envers-napoleon-qui-debaptisa-une-oeuvre-qui-lui-etait-dediee-laure-dautriche
Dans les premieres versions du Calendrier, Comte reserve a Bonaparte une journee de « Reprobation solennelJe »
Napoléon
est "le plus coupable" des trois principaux rétrogadateurs/réprovués
d'Auguste Comte. Napoléon fut un "retrograde" "issu d'une civilisation
arriérée, et specialement animé, sous la secrete domination d'une
nature superstitieuse, d'une admiration involontaire pour l'ancienne
hierarchie sociale »
Cours de philosophie positive
Voir aussi les conférences d'Henri Guillemin
Ma conclusion:
"Napoléon révolutionnaire" c'est le point de vue monarchique
"Napoléon traite à la révolution" c'est le point de vue républicain
Autres Pages du site Willeime mentionnées pendant cette discussion
La Corruption de la Philosophie par le Spiritualisme et la Religion
Démasquer la fausse rationalité des contemporains
La Vidéo d'Arsenio citée au début de la discussion
Dominique Pagani sur Hegel et les Lumières allemandes
►
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