La chute de Rome et de l'Empire Romain

ainsi que la disparition de la philosophie et de la civilisation Gréco-Romaine

causées par le christianisme ?











   La question de la responsabilité du christianisme dans l'effondrement de l'empire romain d'Occident au Ve siècle ne peut pas être balayée comme étant seulement la thèse de Voltaire, de Nietzsche et d'autres libre-penseur anti-chrétiens. C'est la conclusion d'Edward Gibbon, le plus célèbre historien sur la chute de l'empire Romain, et c'était aussi la prédiction du philosophe païen Celse déjà au IIe siècle en cas de conversion de l'empire au christianisme. Les contemporains du sac de Rome (en 410 par les Wisigoths) jugèrent que l'adoption toute récente du christianisme (en 395) était la cause directe de cette catastrophe. La polémique était telle que Saint-Augustin écrivit justement son oeuvre majeure la cité de Dieu contre les païens pour répondre à cette accusation (le livre le plus recopié au moyen-âge - voir les chapitres 1-5 et chez son collègue Orose). On retrouve cette accusation contre le christianisme également chez le principal historien antique pour cette période: Zosime.
  L'histoire de la chute de Rome est très liée à l'évolution de la philosophie et aux transformations religieuses qui ont eu lieu et sans lesquelles il n'est pas possible de comprendre ce qui s'est vraiment passé. Nous allons parler ici surtout d'histoire, mais avec un regard de philosophe qui est essentiel pour traiter réellement des causes de la chute de Rome et comprendre l'implication majeure du christianisme.


    Clarification: La chute de Rome est-elle due à une cause interne ou une cause externe. Dit autrement, y a-t-il eu une décadence des romains ou ont-ils été balayé par la puissance incontrôlable des envahisseurs barbares qui était décuplée à ce moment là ? Les armées barbares qui déferlent sur l'Occident à partir de 406 ne représentent au total qu'une faible armée évaluée 120 000 combattants (voir la synthèse de M. de Jaeghere p545), divisés entre eux et mal équipés. A titre de comparaison, les gaulois coalisés et vaincus par Jules Caesar a Alésia étaient 3 fois plus nombreux (80 000+ 240 000 = 320 000 Gaulois) et Jules Caesar ne commandait à l'époque qu'un tiers de l'armée romaine (la plus grosse partie était en orient étant commandée par Pompée le grand).
    "il faut se représenter ces invasions comme des expéditions de bandes de pillards qui ne rencontraient rien devant eux" "quelques légions d'autrefois commandées par un chef de moyenne valeur auraient eu raison sans trop d'efforts des bandes incohérentes contre lesquelles tremblaient les sujets d'Honorius""
Piganiol, le sac de Rome, p96 p122

       Les Barbares sont certes la cause instrumentale qui a réalisé la destruction finale de Rome et de son empire (cause effectrice), mais la véritable cause de la chute est interne à l'empire romain. Ceci apparaît encore plus évident quand on apprend que 90% de l'armée a disparu en un siècle ! Juste avant la conversion de Constantin au christianisme, l'armée romaine comptait un demi-million d'hommes sous Dioclétien au début du IVe siècle (450 000 - 640 000 soldats). Alors que sous la régence de Stilicon, au début du Ve siècle, celui-ci ne parvient difficilement à mobiliser que 30 000 faibles soldats en recrutant parmi les esclaves. Il s'est donc produit un effondrement militaire. Il nous faut rechercher la cause de cet effondrement qui est à l'évidence la cause interne qui permet ensuite la chute brutale de Rome et l'invasion de l'empire au début du Ve siècle.

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version française: https://www.youtube.com/@LEssentieldelHistoire/videos


Peinture Cole Thomas Destruction

Chronologie christianisation/réaction païenne et invasion Barbare


L'interdiction du paganisme précède la chute : une simple coïncidence ? L'élément frappant lorsqu'on étude la chronologie, c'est que l'interdiction du paganisme est presque immédiatement suivie des invasions barbares. C'est notre point de départ qui doit nous amener à nous demander s'il y existe des liens de causalité en la christianisation de l'empire et les invasions. En guise d'introduction, je vous propose de balayer la chronologie de la christianisation de l'empire romain car celle-ci permet déjà à elle seule de faire des révélations explosives dont presque personne ne parle.

      - 313 Edit de Milan. L'empereur Constantin autorise le christianisme et accorde désormais des faveurs personnelles à cette religion.
       - 324
Constantin établit le dogme catholique au concile de Nicée en 325.
    - 346 Julius Firmicus Maternus écrit à l'empereur pour réclamer la destruction du paganisme. Constance fils de Constantin promulgue les premiers édits qui tentent d'interdire les pratiques religieuses païennes. CT 16.10.3 CT 16.10.4 Probable difficultés d'application.
         - 350 Magnence un païen usurpateur du titre impérial soutenu par des païens excédés par les mesures de l'empereur chrétien est proclamé Empereur à Autun en Gaulle. Il prend le pouvoir en Occident et fait abroger la législation anti-païenne. Il élimine l'empereur Constant Ier (un des fils de Constantin), parvient à règner 3 ans, mais il échoue finalement à s'imposer. La révolte de Magnence: "coûta à l’empire la perte de ses plus grandes forces, avec lesquelles il aurait pu faire la guerre à toute puissance étrangère, garantir ses frontières, et multiplier ses triomphes." Eutrope, X, 12.
         - 356 Incursions germanique dans la Gaulle qui a été affaiblie par la révolte de Magnence. Julien envoyé pour rétablir la situation.
        - 353-360 l'Empereur chrétien Constance continue sa politique de fermeture des temples païens dont on a un témoignage d'application en Egypte 
(Sozomène, Histoire ecclésiastique, IV, 10).         
        - 357 Peine de mort pour l'idolâtrie et les sacrifices CT 16.10.6. (interdiction des sacrifices nocturnes, fermeture des temples, interdit d'adorer des statues) L'autel de la victoire est retiré lors de la visite de l'empereur à Rome (déesse Niké) signe de grosses tensions religieuses, mais après la visite de l'empereur à Rome en 357, la série de lois contre le paganisme s'interrompt brutalement. L'empereur chrétien aurait été impressionné par la majesté de la ville et cela aurait peut-être fait naître un respect pour le paganisme que son éducation chrétienne byzantine l'avait amenée à hair.
     - 361 Restauration païenne dans tout l'Empire. Révolte païenne contre Constance. L'Empereur Julien l'apostat/le philosophe est proclamé Empereur à Lutèce et rétablit le paganisme, l'hôtel de la victoire et condamne l'église chrétienne à restaurer tous les temples qu'ils ont abîmés. L'église chrétienne est ruinée.
       - 363 Mort de Julien -
Annulation de ses mesures pro-païennes. Le camp chrétien reprend le pouvoir. reprise de la christianisation et persécutions de l'élite païenne.
       - 378 Acceuil de Wisigoths en phase de christianisation dans les Balkans. Rebellion, puis défaite de l'armée romaine à Andrinople.
       - 382 Traité de paix avec les Wisigoths (Mercenaires pour l'empereur chrétien pour matter les païens récalcitrants. Politique suivie jusqu'au sac de Rome et peut-être le sac de Rome compris).
       - 380 Edit de Thessalonique (appel à la conversion de tous au christianisme nicéen).
   - 381 Ceux qui font des sacrifices païens ou des prières seront pénalisés par la perte de leur propriété. CT 16.10.7
    - 382 sous l'influence du père de l'église Ambroise de Milan, l'Empereur chrétien Gratien favorise drastiquement un petit cercle de chrétiens dans l'administration, refuse le titre de Pontifex Maximus (pape du paganisme) et impose l'enlèvement de la statue de l'Autel de la Victoire. Les sénateurs de Rome protestent via Symmaque. L'armée se révolte et met un nouvel empereur en Occident. Gratien devient après Constant Ier le second empereur chrétien à mourir à cause d'une réaction païenne qu'il a lui-même provoquée. "La haine des païens contre Gratien semble, vers la fin du règne de ce malheureux prince, avoir perdu toute mesure". "Ces témoignages rapprochés des événements postérieurs permettent de regarder le ressentiment des païens comme la cause principale de la catastrophe qui mit fin aux jours de cet empereur" Arthur Beugnot, Histoire le la destruction du paganisme.
    Avec Maxime statu quo de l'affrontement païen-chrétien jusqu'en 388 en Occident. Maxime ne prend plus de mesures antipaïenne mais sans annuler l'action de son prédécesseur.
     - 383 [Orient] Loi contre l'apostasie: les chrétiens confirmés qui se sont tournés vers le paganisme ne peuvent émettre de testament à personne. CT 16.7.2 (renforcée en 391: Les personnes ayant un rang ou un statut hérité qui abandonnent le christianisme perdront leur position et seront marquées d'infamie) CT 16.7.5.
     - 386 [Orient] Destruction du temple de Zeus ordonné par l'évêque d'Apamée (Syrie).
     - 388 [Orient] Aucune discussion ou débat public sur la religion ne peut avoir lieu. CT 16.4.2
   - 388 Théodose débarrassé de Maxime fait irruption à Rome en traînant les dieux de l'antiquité en triomphe derrière son char 
(Gibbon, chap XXVIII). Conversion forcée imposée au Sénat de Rome sous la pression de l'empereur.

     - 391 Arrêt de mort du paganisme. Edit d’interdiction de visiter les temples païens. Interdiction du culte des images. (Dans la citée de Dieu. St Augustin confirme que la religion est paienne est désormais interdite) Législation probablement obtenue par Ambroise de Milan qui culpabilise l'empereur après le massacre de Thésallonique et manipule ce dévôt pour qu'il fasse la politique que l'église veut pour l'empire. On est en train de basculer en théocratie.
      - 392
La loi du 8 novembre 392 est particulièrement répressive puisque les simples particuliers n’ont, en outre, plus le droit d’honorer leurs pénates ou les dieux lares : la mesure s’applique donc à la sphère privée, à l’intimité des foyers, et la police impériale est en droit de perquisitionner afin d’arrêter les contrevenants dont les biens ainsi que les demeures, dit la loi, peuvent être saisis. Les lois ne surveillent donc pas seulement l’espace public mais aussi le domaine privé "Que personne, absolument, ne sacrifie une victime innocente, ni, par un sacrilège plus discret, adorant son dieu lare par du feu, son génie par du vin, ses pénates par du parfum, n'allume des lampes, ne répande de l'encens, n'accroche de guirlandes" CT 16.10.12.
      - 392 Destruction du Sérapéum et de la grande bibliothèque ordonné par l'évêque d'Alexandrie (Egypte). (Gibbon, chap XXVIII).
       - 393 Nouvelle réaction païenne en Occident. Le général Arbogaste fait proclamer Eugène empereur qui rétablit une dernière fois l'hôtel de la victoire et les cultes païens à Rome et en Occident.
         - 394 La guerre civile se résout à bataille du Frigidus: défaite du camps païen.
             - 395 Les Wisigoths profitent de l'affaiblissement de l'armée romaine dans cette guerre civile pour aller ravager la Grèce (Athènes et Sparte).
        - 394 Interdiction des jeux olympiques. 3000 ans d'antiquité gréco-romaine, mais aussi égyptienne disparaissent à ce moment là.
       - 395 Edit stipulant que chacun doit se hâter d'obéir aux lois précédemment promulguées sur les hérétiques et les païens (en 391). Les gouverneurs et autres fonctionnaires qui n'appliquent pas cette loi seront punis et condamnés à une amende, et les gouverneurs en particulier. CT 16.10.13
        - 395 Edit réclamant de retirer les hérétiques du service impériale CT 16.5.29
     
- 396 Tous les privilèges accordés dans l'ancienne loi aux prêtres et chefs païens sont abolis. Ils ne peuvent prétendre à des privilèges, car leur profession est aujourd'hui condamnée. CT 10.10.14
        - 397 Edit demandant la réutilisation des pierres des temples païens détruits (édit de déblayage en orient). CT.16.1.36. Les femmes païennes refusent de marcher sur la route (Marc le Diacre. Vie de Porphyre de Gaza, 76).

        - 399 Les temples païens dans les zones rurales doivent être démolis. CT 16.10.16
      - 399 Les temples ne contenant pas d'objets illégaux [tels que des statues et des autels] ne peuvent pas être détruits. Les ornements des bâtiments publics ne doivent pas être détruits. Nul ne peut utiliser des lois antérieures comme prétexte pour détruire des édifices publics. Si des réparations sont nécessaires sur un bâtiment, l'autorisation est accordée d'enlever les images des empereurs sans consultation préalable, à condition qu'elles soient restaurées dès que les réparations sont terminées. CT 16.10.18 CT 16.10.15 CT 15.1.44
      - Vers 400 Destruction de temples. Le temple d'Artémis à Ephèse par les troupes de Jean Chrysostome et à Gaza 
(Vie de Porphyre de Gaza. Marc le Diacre).
      
  - 401 Les Wisigoths entrent en Italie du Nord. Ils sont vaincus par l'armée romaine mais on décide de les renvoyer libres dans les Balkans au lieu de les soumettre. (politique des dirigeants chrétiens qui scandalise l'élite païenne)
       - 403/405 le collège des vestales est aboli et le feu sacré est éteint. Stilicon fait brûler les Livres sibyllins et son épouse Serena, également nièce de Théodose, entre dans le temple de Vesta, prend le collier de la statue de la déesse et le place à son propre cou (Zosime, V, 38).
       - 406 Les Ostrogoths pénètrent dans l'Empire Romain et ravagent l'Italie du Nord. Ils font le siège de Florence (sauvé in extremis par Stilicon).
       - 406 (31 dec) Franchissement du Rhin glacé par les Vandales, Alains, Suèves qui ravagent la Gaulle.
       - 407 Abandon de la Bretagne.

    - 407 Edit ordonnant la destruction des idoles dans les lieux de culte. Destruction des images qui reçoivent un culte. Tous les autels païens doivent être démolis. Interdiction générale des pratiques païennes. Interdiction des cérémonies païennes (banquets). CT 16.10.19. Emeutes anti-chrétiennes à Calama.
       - 408 Epuration du gouvernement. Interdiction aux "ennemis de la religion catholique" de servir au palais impérial ou à tout poste impérial CT 16.5.42 (Généride et d'autres généraux païens "restent à la maison" Zosime). (Exception autorisée en 410 CT 16.5.48 rétablissement en 416).
       - 409 Les outrages contre les évêques catholiques méritent la peine capitale. 
CT 16.5.46

       - 409 réaction païenne sous Attale préfet de Rome. L'empereur chrétien Honorius était disposé à prendre la fuite à bord de sa flotte, quand il reçut un secours d'Orient. Echec d'Attale. 
       - 409 Les Vandales et d'autres Germains ravagent l'Espagne
       - 410 Sac de Rome par les Wisigoths
    - 412 Les esclaves et les métayers (agriculteurs serviles) seront rappelés à la foi catholique par de fréquentes flagellations. CT 16.5.52
        - 415 Toute place autrefois consacrée au paganisme sera donnée à l'église. CT 16.10.20
        - 415 Assassinat de la philosophe Hypatie par la milice de l'évêque Cyrille à Alexandrie (reconnut comme un Saint par l'église).     
        - 416 Exclusion des païens de l'armée, de l'administration, et de la justice. 
CT 16.10.21

      - 416 Les Wisigoths (ceux-là même qui ont pillés Rome, l'Italie et la Grèce !) sont recrutés pour être envoyés en Espagne à la solde l'empreur chrétien combattre d'autres barbares. En échange, on leur accorde des terres en Aquitaine (dès 416). L'empereur chrétien préfère les barbares aux romains païens !
       -  431 "le pape Célestin écrit que la cause de la foi (fide causa) est plus importante que celle de l'état. L'empereur doit faire passer la paix des églises avant la sécurité du monde (omnium securitas terrarum)." André Piganiol, le mémorial des Siècles, le sac de Rome, 1964. p121. L’aveu d'un conflit entre l’intérêt de l'église et ceux de l'état et avoue la politique menée.
      - 423 Les païens doivent être exilés et leurs biens confisqués CT 16.10.23. Mais une autre loi préciseles chrétiens ne peuvent pas attaquer ou piller les juifs ou les païens. CT 16.10.24 (Loi révélatrice du climat de débordement mais peut-être aussi une temporisation stratégique liée à la prise de pouvoir d'un usurpateur païen Jean en Occident qui n'a pas les moyens de s'imposer. L'Empire d'Orient intervient pour le balayer en 425 et le remplacer par un chrétien qui fait annuler sa législation anti-chrétienne.
        - 429 Les Vandales ravagent l'Afrique du Nord  
      - 435 Edit de rappel de destruction des temples "s'il en reste d'intacts". Les temples et sanctuaires païens doivent être démolis et remplacés par le symbole du christianisme : la croix. Quiconque se moque de cette loi risque d'être exécuté. CT 16.10.25
       - 449 Le livre du philosophe Porphyre contre les chrétiens et les autres du même genre doivent être livrés aux flammes. Il importe que des écrits propres à provoquer la colère de dieu et à offenser les âmes pieuses ne puissent parvenir à l'oreille des hommes (CT.16.6.65/66) (sur Porphyre voir aussi: Socrate, histoire e l'église, I, 9)
       - 435 les Vandales (Genséric) obtiennent le statut de fédérés de l'Empire (après avoir ravagé l'Afrique !)
       - 455 Second Sac de Rome par les Vandales (qui avaient obtenus un statut de fédéré !)
     - 456/457 général Marcellinus (païen), Empereur Majorien (chrétien avec une politique pro-païen/anti-chrétien) & Anthémius (païen) à Rome. Anthémius prépare la réouverture du temple de Jupiter et des culte païens à Rome.
     
  - 472 Olybrius rétablit la législation anti-païenne qui avait été annulée
       - 476 Dernier empereur Romain d'Occident
       - VIe siècle. Atteintes à la liberté de conscience. Baptème obligatoire (Justinien en Orient).
    - IXe siècle. Convertion des derniers païens helléniques qui n'ont pas encore tous disparus en occident 
(exemples en Gaulle, en Italie, en Grèce).
      -XIe siècle Conversion des derniers païens helléniques qui n'ont pas encore tous disparus en orient.

Source: CT Codex Theodosianus (latin)  (english)


    En conclusion, la volonté fanatique d'imposer de force le christianisme à une masse païenne qui ne voulait pas se couvertir a provoqué une guerre civile qui a désagrégé la société, engendré des défections, brisé l'unité de l'armée et provoqué la chute brutale de l'empire romain d'Occident.

   Nous allons documenter cette thèse en nous appuyant sur le classique d'Edward Gibbon historien le plus célèbre de la chute de Rome et qui incrimine nettement le christianisme. Nous allons exposer sa thèse mais également l'enrichir des vues de nombreux autres historiens et découvertes archéologiques plus récentes. Nous allons ainsi vous proposer les clefs de compréhension des éléments qui expliquent le sac de Rome de 410, la chute brutale de l'Empire romain d'Occident, et plus largement la disparition de la civilisation gréco-romaine. Nous allons montrer les éléments qui pointent effectivement la responsabilité du christianisme dans ces désastres.
    La disparition de la civilisation gréco-romaine est à l'évidence due à de multiples causes non exclusives (on compte plus de 210 théories) mais qui 
aboutissent au final à son remplacement par la civilisation judéo-chrétienne.  En utilisant "Histoire du déclin et de la chute de l'Empire romain : Rome de 96 à 582". Edward Gibbon comme fils conducteur, complété d'autres sources plus récentes, nous allons voir que le déclin de l'empire romain d'Occident s'est déroulé selon quatre grandes étapes que nous allons présenter dans la première grande partie:


            1 - l'
âge d'Or de l'Empire Romain (IIe siècle)

            2 - la 
déstabilisation: mutation culturelle (IIIe siècle)                                         

            3 - le 
basculement: changement de religion et donc de civilisation (IVe siècle)

            4 - l'
effondrement: les invasions barbares (Ve siècle)                                         

 

    Ensuite dans la deuxième grande partie, nous allons voir les opinions de célèbres historiens et philosophes et nous allons aussi confronter leurs opinions aux réfutations qui ont été avancées par ceux qui au contraire affirment que le christianisme n'est pas la cause de la chute de Rome.

 





PARTIE I


Etat des Lieux: l'antiquité gréco-romaine un sommet de la civilisation
 
(Ve siècle avant JC - IIe siècle après JC)

 


 - L'apogée de l'antiquité gréco-romaine la civilisation gréco-romaine naît au VIIIe siècle avant JC (époque d'Homère en Grèce et fondation de Rome en Italie). Son apogée commence du Ve siècle après JC à la fin du IIe siècle après JC. Cette civilisation atteint son sommet au IIe siècle après JC, sous les Antonins, époque de paix, de prospérité et de bonheur presque généraliséSelon Gibbon, au IIe siècle, "Les plus riches habitants de l'Italie avaient presque tous embrassés la philosophie d'Épicure" (GibbonChap III). Cicéron nous dit que l'épicurisme a inondé l'Italie et été adopté en masse par la population italienne (Tusculanes IV). On retrouvera des vers de Lucrèce à Pompei.
Note: 7 siècles centraux - Epicurisme et stoïcisme dominant. 
Epicurisme grand courant philosophique qui représente à la frange la plus éclairée dans les élites et les cercles du pouvoir qui démarre avec Démocrite (disciples autour de Périclès et Alexandre le grand). Epicurisme à la cour des séleucides ; dans la famille de Jules Caesar et de l'empereur Auguste. Quand Paul de Tarse va à Athènes ils voient des épicuriens et stoïciens (actes des apôtres). Au IIe siècle l'impératrice Plotine. Chaires de philosophie créées sous Marc-Aurèle. Les derniers épicuriens: Lucien. Diogène d'Œnoanda sur pierre. Diogène Laerce début IIIe siècle histoire de la philosophie qui se conclut sur Epicure système le plus abouti.

Peinture Cole Thomas ConsummationLe IIe siècle romain: un sommet du développement humain. L'Empire romain avait atteint au IIe siècle un niveau de développement humain et une prospérité encore inégalée à son époque. Au XVIIIe siècle, Gibbon pouvait encore écrire que la population de l'empire romain de cette époque "excède peut-être celle de l’Europe moderne, et qui forme la société la plus nombreuse que l’on ait jamais vue réunie sous un seul gouvernement" (Gibbon, Chap II). En effet, Alexandrie comptait au moins un demi-million d'habitant et Rome 1,2 million d'habitant, un niveau que Paris et Londres n'atteignent qu'au XIXe siècle !  
       Malgré la méconnaissance de découvertes essentielles de la renaissance nécessaires au monde moderne (pomme de terre, mécanisation...), le génie de l'organisation antique avait permis un niveau de développement sans précédent, nettement visible dans les biens de consommations. L'historien-archéologue Bryan Ward-perkins insiste que dans l'empire romain ce développement des biens de consommation touche même les classes modestes dans des provinces reculées comme la bretagne.
     La conclusion de ce tableau est qu'il s'est passé une catastrophe d'une ampleur considérable à la fin de l'antiquité et que si l'on pouvait allier aujourd'hui le génie moral et civique des anciens à la puissance technologique conférée par la science moderne, on pourrait amener l'humanité bien plus loin sur le chemin du progrès.



- Félicité générale: "les Romains et les habitants des provinces sentaient vivement et reconnaissaient de bonne foi l’état heureux et tranquille dont ils jouissaient. « Ils conviennent tous que les vrais principes de la loi sociale, les lois, l’agriculture, les sciences, enseignées d’abord dans la Grèce par les sages Athéniens, ont pénétré dans toute la terre avec la puissance de Rome, dont l’heureuse influence sait enchaîner, par les liens d’une langue commune et d’un même gouvernement, les Barbares les plus féroces. Ils affirment que le genre humain, éclairé par les arts, leur est redevable de son bonheur et d’un accroissement visible : ils célèbrent la beauté majestueuse des villes et l’aspect riant de la campagne, ornée et cultivée comme un jardin immense : ils chantent ces jours de fêtes, où tant de nations oublient leurs anciennes animosités au milieu des douceurs de la paix, et ne sont plus exposées à aucun danger. » Quelque doute que puisse faire naître le ton de rhéteur et l’air de déclamation que l’on aperçoit dans ce passage, ces descriptions sont entièrement conformes à la vérité historique." (Gibbon, Chap II).
             "S’il fallait déterminer dans quelle période de l’histoire du monde le genre humain a joui du sort le plus heureux et le plus florissant, ce serait sans hésiter qu’on s’arrêterait à cet espace de temps qui s’écoula depuis la mort de Domitien (en 96) jusqu’à l’avènement de Commode (en 180). Un pouvoir absolu gouvernait l’étendue immense de l’empire, sous la direction immédiate de la sagesse et de la vertu. Les armées furent contenues par la main ferme de quatre empereurs successifs, dont le caractère et la puissance imprimaient un respect involontaire, et qui savaient se faire obéir, sans avoir recours à des moyens violents. Les formes de l’administration civile furent soigneusement observées par Nerva, Trajan, Adrien et les deux Antonins, qui, chérissant l’image de la liberté, se glorifiaient de n’être que les dépositaires et les ministres de la loi. Gibbon reprendre la thèse des "cinq bons empereurs" (expression inventée en 1503 par Machiavelet ceci est particulièrement vrai pour les deux derniers: "Ces deux règnes sont peut-être la seule période de l’histoire, dans laquelle le bonheur d’un peuple immense ait été l’unique objet du gouvernement." (Gibbon, Chap III).



Le progrès morale et sociétal

- La paix (Pax Romana - une prospérité inédite). "Adrien et les deux Antonins s’attachèrent également au système général embrassé par Auguste. Ils persistèrent dans le projet de maintenir la dignité de l’empire, sans entreprendre d’en reculer les bornes : on vit même ces princes employer toutes sortes de moyens honorables pour gagner l’amitié des Barbares. Leur but était de convaincre le genre humain que Rome, renonçant à toute idée de conquête, n’était plus animée que par l’amour de l’ordre et de la justice." "Les contrées soumises à Trajan et aux Antonins étaient étroitement unies entre elles par les lois, et embellies par les arts. Il pouvait arriver qu’elles eussent à souffrir occasionnellement de quelques abus du pouvoir confié aux délégués du souverain ; mais en général le principe du gouvernement était sage, simple et établi pour le bonheur des peuples. Les habitants des provinces exerçaient paisiblement le culte de leurs ancêtres, et, confondus avec les conquérants, ils jouissaient des mêmes avantages, et parcouraient d’un pas égal la carrière des honneurs." (Gibbon, Chap I). Pas une société militarisée, seulement 0,5% de soldats.
- Une superpuissance sous Antonin le pieux.  "Le nom romain était respecté parmi les nations de la terre les plus éloignées ; souvent les Barbares les plus fiers soumettaient leurs différends à la décision de l’empereur" (Gibbon, Chap I). Certains peuples demandent même d'être annexés à l'Empire ce que Antonin refuse, mais il accepte de confirmer certains rois étrangers qui réclament d'être reconnus par lui pour être plus légitime aux yeux de leurs peuples. Lorsque l'armée Parthe envahit l'Arménie, il les fait se retirer par la seule menace d'intervenir sans même avoir à combattre. A cette époque, l'aura de Rome s'étend bien au-delà de ses propres frontières déjà immenses. Antonin le pieux, "le divin pieux", porte alors le titre de maître du monde sous certaines de ses statues et déclare lui-même: "je suis le maître du monde". "Personne n'eut plus d'ascendant que lui sur les nations étrangères, quoiqu'il eût toujours recherché la paix" "[Antonin le pieux] répétait souvent ce mot de Scipion : «Qu'il aimait mieux conserver un seul citoyen que de tuer mille ennemis.»" (Histoire Auguste). Pour un contemporain, Aelius Aristide, "les guerres on n'imagine même plus qu'elles se soient jamais produites, pour la plupart des gens ce sont de vieilles fables".


 "La plupart des villes étaient, à des titres divers, de petites républiques. L’esprit municipal y était très-fort; elles n’avaient perdu que le droit de se déclarer la guerre, droit funeste qui avait fait du monde un champ de carnage. « Les bienfaits du peuple romain envers le genre humain » étaient le thème de déclamations parfois adulatrices, mais auxquelles il serait injuste de dénier toute sincérité. Le culte de « la paix romaine ». L’idée d’une grande démocratie, organisée sous la tutelle de Rome, était au fond de toutes les pensées." "le monde, sous bien des rapports, n’avait pas encore été aussi heureux." "l'Empire fut une ère de prospérité et de bien-être comme on n’en avait jamais connu ; il est même permis d’ajouter sans paradoxe, de liberté." "L’Empire inaugura une période de liberté, en ce sens qu’il éteignit la souveraineté absolue de la famille, de la ville, de la tribu, et remplaça ou tempéra ces souverainetés par celle de l’État." Renan
- L'Empereur Romain: un monarque républicain au service du bonheur du peuple. "L’aspect de la cour répondait aux formes de l’administration. Si nous en exceptons ces tyrans qui, emportés par leurs folles passions, foulaient aux pieds toutes les lois de la nature et de la décence, les empereurs dédaignèrent une pompe dont l’éclat aurait pu offenser leurs concitoyens, sans rien ajouter à leur puissance réelle. Dans tous les détails de la vie, ils semblaient oublier la supériorité de leur rang : souvent ils visitaient leurs sujets, et les invitaient à venir partager leurs plaisirs ; leurs habits, leur table, leur palais, n’avaient rien qui les distinguât d’un sénateur opulent : leur maison, quoique nombreuse et brillante, n’était composée que d’esclaves et d’affranchis. Auguste ou Trajan aurait rougi d’abaisser le dernier des citoyens à ces emplois domestiques que les nobles les plus fiers de la Grande-Bretagne sont aujourd’hui si ambitieux d’obtenir dans la maison et dans le service personnel du chef d’une monarchie limitée."
     "Dans les républiques d’Athènes et de Rome, la modestie et la simplicité des maisons particulières annonçaient l’égalité des conditions, tandis que la souveraineté du peuple brillait avec éclat dans la majesté des édifices publics. L’introduction des richesses et l’établissement de la monarchie n’éteignirent pas tout-à-fait cet esprit républicain. Ce fut dans les ouvrages destinés à la gloire et à l’utilité de la nation, que les plus vertueux empereurs déployèrent leur magnificence. Le palais d’or de Néron avait excité à juste titre l’indignation ; mais cette vaste étendue de terrain envahie par un luxe effréné, servit bientôt à de plus nobles usages." Gibbon, Chap II Marc-Aurèle honore Brutus qui avait participé à l'assassinat de Caesar et tenter de restaurer la république (Jules Caesar qui était pourtant très loin d'être un tyran).
- La méritocratie républicaine. "[L'Empereur] Vespasien, né dans l’obscurité, ne tirait aucun lustre de ses ancêtres : son aïeul avait été soldat, et son père possédait un emploi médiocre dans les fermes de l’état." (Gibbon ChapIII). Egalité juridique de tous les citoyens devant la loi (la loi des 12 tables en 451 avant JC: voir cours en vidéo). Pertinax et Dioclétien, sont des fils d'esclave, qui deviennent empereur romain.
- Politique sociale. L'eau potable, les thermes, et distribution pain gratuites à la population. Trajan créa l'aide alimentaire pour les enfants démunis. De même, Marc-Aurèle créa un orphelinat pour jeunes filles abandonnées. (Dumézil sur l'Evergétisme).

- Conditions des femmes. A partir d'Auguste, les femmes sont émancipées de la tutelle de leur père ou mari après leur troisième enfants (déjà levé sous Claude et le juriste Gaius ce n'est même plus en pratique sous les antonins). Elles peuvent signer des actes juridiques et gérer leurs affaires. Les filles vont à l'école. La place majeure des Vestales dans la religion romaine montre également une différence notable avec le catholicisme et l'islam ou aucune fonction religieuse d’importance n’est occupée par des femmes. La situation est meilleure pour les femmes que dans l’Occident chrétien du XIXe siècle.
- Conditions des esclaves. Dans l'antiquité, le mot esclave ne décrit pas tout à fait la même réalité que l'esclavage moderne à l'époque du code de noir. Les esclaves sont principalement des prisonniers de guerres issus de peuple qui menaçaient Rome et que Rome conquiert (l'histoire a prouvé que la menace était bien réelle). L'esclavage est la seule alternative à l'exécution des vaincus sur le champ de bataille ; que l'on ne peut pas relâcher dans la nature. On est encore dans un monde peu civilisé à l'époque avec des hommes préhistoriques (les barbares). Tout cela n'excuse pas l'exploitation horrible et tous les abus qui en ont découlés (révolte légitime Spartacus) ; mais sous les Antonins on observe un adoucissement de la condition des esclaves et des nouvelles lois pour les protéger des abus (Gibbon, Chap II). L'abolition n'est pas tellement un sujet car l'esclave méritant a vocation à gagner son affranchissement. Et à Rome, cela se produit souvent. Déjà au début de l'empire, les affranchissements étaient devenus tellement massifs au point de déstabiliser l'ordre social que l'empereur Auguste édicta une loi pour les ralentir (Lex Aelia Sentia et Lex Fufia Caninia). Environ un tiers des esclaves sont affranchis par génération (le satyricon met en scène de riches affranchis). La méthode est donc rude mais le monde progresse. En passant par la dure case de l'esclavage, Rome transforme progressivement ses ennemis sauvages en homme libre, civilisé et citoyen à part entière. Enfin, n'en déplaise à l'imaginaire chrétien et aux croyants qui ne connaissent pas leur religion, il n'y a pas de progrès mais une régression de la condition des esclaves avec l'arrivée du christianisme au pouvoir (voir sur notre page contre Jésus).
Tolérance de la diversité religieuse et lutte contre les fanatiques. Les romains polythéistes étaient
généralement assez tolérants envers les diverses formes de culte dans l'Empire. Chaque peuple pouvait honorer les dieux de ses ancêtres. Toutefois, les romains combattaient férocement certaines formes de superstition avec sacrifice humain qui les révoltait comme les bacchanales et la religion des druides qui avaient interdit l'écriture, et fomentaient des révoltes contre le pouvoir Romain, ce pourquoi leur religion fut interdite en Gaule puis en Bretagne (Gibbon chap II). De même, le fanatisme des prédicateurs juifs et chrétiens causèrent des conflits récurrents avec les Grecs et les Romains.
-un siècle d'irréligion.
 "Cicéron se servit des armes de la raison et de l’éloquence pour combattre les systèmes absurdes du paganisme : mais la satire de Lucien était bien plus faite pour les détruire : aussi ses traits eurent-ils plus de succès. Un écrivain répandu dans le monde ne se serait pas hasardé à jeter du ridicule sur des divinités qui n’auraient pas déjà été secrètement un objet de mépris aux yeux des classes éclairées de la société. Malgré l’esprit d’irréligion qui s’était introduit dans le siècle des Antonins, on respectait encore l’intérêt des prêtres et la crédulité du peuple. Les philosophes, dans leurs écrits et dans leurs discours, soutenaient la dignité de la raison, mais ils soumettaient en même temps leurs actions à l’empire des lois et de la coutume. Remplis d’indulgence pour ces erreurs qui excitaient leur pitié, ils pratiquaient avec soin les cérémonies de leurs ancêtres, et on les voyait fréquenter les temples des dieux ; quelquefois même ils ne dédaignaient pas de jouer un rôle sur le théâtre de la superstition, et la robe d’un pontife cachait souvent un athée." (Anecdote. Vespasien n'était pas le plus éclairé, il avait chassé les philosophes de Rome, mais toutefois pour se moquer de la divinisation des Empereurs accordée par le sénat après leur mort, lorsque mourant il n'avait plus la force de se lever "je crois que je deviens dieu !". Ironie et d'irréligion.)
   "Il semble que le monde s’effraye de l’incrédulité avouée des temps de César et d’Auguste" "L’incrédulité à la religion officielle était générale dans la classe éclairée. Les hommes politiques qui affectaient le plus de soutenir le culte de l’État s’en raillaient par de forts jolis mots." Renan
    L'antonin Marc-Aurèle fut le dernier des "cinq bons empereurs" (expression inventée en 1503 par Machiavel) et qui marque l'âge d'Or de l'empire romain :
    Il est décrit pas des contemporains comme "bienveillant mesuré doux affable" Gallien. "Plein de bonté pour les hommes, il avait l'art de les détourner du mal et de les porter au bien, donnant des récompenses aux uns, adoucissant les peines des autres. Il rendit bons les méchants et excellents les bons." 
(Hist Auguste).
    « Une fois que le bruit de sa mort se fut répandu, tous les soldats furent pareillement étreints et l'on ne vit personne dans l'Empire romain recevoir sans pleurer une telle nouvelle. Comme à l’unisson, tous célébraient en lui tantôt un père vertueux, Le Bon empereur, tantôt le vaillant général tantôt le souverain vaillant est sage mais il n'y avait personne pour médire. » 
(Hérodien). Dion Cassius nous dit: « Il se montra dans son gouvernement le meilleur de tous les hommes qui est jamais exercé une autorité quelconque ». [Aussi] "le jour de ses funérailles, personne ne crut devoir le pleurer, tant l'on était persuadé que, prêté par les dieux à la terre, il était retourné vers eux." (Hist Augsute). "
Sa mémoire fut longtemps chère à la postérité ; et plus d’un siècle encore après sa mort, plusieurs personnes plaçaient l’image de Marc-Aurèle parmi celles de leurs dieux domestiques" (Gibbon, Chap III. Voir aussi Histoire Auguste). Les romains savaient ce qu'ils avaient perdus.

- La menace chrétienne. A la fin du IIe siècle, 
le philosophe païen Celse prédit la chute future de l'empire romain si un terme n'est pas rapidement mis à la diffusion du christianisme. Le très sage et très modéré empereur Marc-Aurèle avait pris des mesures contre les fanatiques chrétiens. Marc Aurèle condamne à la relégation dans une île ceux qui agitent les esprits par des pratiques superstitieuses. (Voir plus sur notre page contre Jésus: Marc-Aurèle contre les chrétiens). "[Le chrétien Athénagore] s’indigne de la situation exceptionnelle que l’on fait aux chrétiens, sous un règne plein de douceur et de félicité, qui donne à tout le monde la paix et la liberté. Toutes les villes jouissent d’une parfaite isonomie. Il est permis à tous les peuples de vivre suivant leurs lois et leur religion. [Les chrétiens] sont les seuls hommes que l’on persécute" (Renan).

    L'avènement de l'empereur Commode, (vu au cinéma), est classiquement présentée par les historiens comme le début de la décadence de Rome. Ces films oublient toutefois de montrer que le tyran Commode est le premier à tolérer le christianisme...  Commode était sous l'influence de sa favorite, Marcia, patronne des chrétiens. Contre la sage politique de son père, Commode inaugure la tolérance du christianisme dans l'empire et soutien l'évêque de Rome. "Par une fatalité singulière, les maux [que les chrétiens] avaient endurés sous le gouvernement d'un prince vertueux cessèrent tout à coup à l'avènement d'un tyran" (Gibbon, chap XVI). Commode abandonne aussi la pacification et annexion de la Germanie à l'Empire entreprise par Marc-Aurèle suite aux attaques surprises des Germains en 168. L'abandon de ces deux politiques par Commode fut deux erreurs mortelles: deux siècles plus tard ce sera le triomphe du christianisme et de la barbarie.

Image de Rome déformée par le cinéma. Les péplums sont presque tous de la propagande chrétienne déconnectée des sources historiques qui se sentent le besoin de diaboliser les païens pour justifier le christianisme. A les voir on croirait que les empereurs romains étaient tous fous ce qui interroge forcément étant donné la longévité de cette civilisation. Certes il y a eu quelques tyrans mais les romains n'en étaient pas fiers. Ils étaient honnis dans leur mémoire. Les bons empereurs (en particulier Les Antonins) ne sont pratiquement pas montrés au cinéma. Et Gibbon fait remarquer que chez les champions de la chrétienté, il y a largement matière pour les faire passer eux aussi pour d'horribles tyrans alors qu'ils passent pour les grands hommes dans l'Histoire officielle.... (Constantin avait tellement de meurtres sans sa propre famille et son entourage que Gibbon rappel "les vers injurieux affichés à la porte du palais, où l’on comparait les deux règnes fastueux et sanglants de Néron et de Constantin" (chap XVIII). Pareil pour Clovis, Gibbon nous dit "Son règne fut une violation continuelle des lois du christianisme et de l'humanité." (chap XXXVIII). Et pour Théodose, on trouve "un acte de cruauté qu’on attendait à peine d’un Néron ou d’un Domitien" (chap XXVII). On dénonce la mégalomanie de Néron qui voulait renommer Rome Neropolis, mais Constantin fait déplacer la capitale de l'empire et la renomme Constantinople.
Pour l'historien antique Ammien Marcellin, trouve également la cruauté de Constance (fils de Constantin) "surpassait celle des Caligula, Domiten, Commode" (Livre XI). Idem pour Valentinien, et le pire Justinien qui a fait tué des centaines de milliers si pas des millions (Histoire secrète de Justinien). Ce sont des tyrans criminels.


  Par ses éléments, j'espère avoir réussi à corriger un peu l'image fausse de Rome trop souvent véhiculée par le cinéma, les reportages et l'historiographie pro-chrétienne, encore dominante sur cette question.

► voyez le film Agora (2010) de Alejandro Amenábar avec Rachel Weisz, rare représentation du réel visage du christianisme dans l'antiquité. Les autres péplums étant généralement de la propagande chrétienne non-historique.



Les relations païens-chrétiens. Sur notre page Celse, voir l'avis général des païens sur les chrétiens. conversion impossible.


Sociologie du christianisme antique. Le christianisme trouve son terrain dans une population urbaine de bas niveau sociale (les banlieues de l'époque). C'est là que le ressentiment s'accumule et créé une population réceptive à l'inversion des valeurs. Ce n'est ni l'aristocratie ni le gros du  peuple paysans qui vit dans les campagnes (80% de la populations sont des paysans = des païens). Ce n'est donc pas un mouvement populaire de masse, mais une secte militante qui veut convertir le pouvoir.
    
"la populace ou le, cæcum vulgus, pour me servir d'une expression de Tertullien » , était l'ennemi le plus acharné des chrétiens" "Le siége de l'influence chrétienne avait donc été transporté dans la classe intermédiaire , qui placée à une égale distance de l'aristocratie et du bas-peuple "Arthur Beugnot, Histoire le la destruction du paganisme
     
"Déjà [au IIe siècle] le christianisme dévoile la politique qu’il suivra constamment à partir du IVe siècle, et qui consistera surtout à traiter avec les souverains par-dessus la tête des peuples. « Avec vous, nous voulons bien discuter ; mais la foule ne vaut pas l’honneur qu’on lui donne des raisons." "Les fidèles ne s’envisagent jamais comme des gens du peuple ; ils semblent former dans les villes une petite bourgeoisie honnête, très-respectueuse pour l’autorité, très-disposée à s’entendre avec elle. Se défendre devant le peuple paraît aux évêques une honte ; c’est avec les autorités seules qu’ils veulent argumenter." Renan
    Ils n'ont pas de prise sur les empereurs éclairés, mais ils vont parvenir à leur fin sur des esprits perméable à la superstition qui seront fasciné par les miracles de Jésus. La force essentielle du christianisme ce n'est pas la promesse de la vie éternelle (qui est déjà proposée par plein d'autres dieux à l'époque) ni même sa morale, mais c'est son militantisme acharné qui va lui permettre de l'emporter. Gibbon dit que la cause n°1 du succès du christianisme c'est son "zèle inflexible" et intolérant (chap XVI).




IIIe siècle
 la déstabilisation des valeurs gréco-romaine classiques



 - Les orientations philosophiques peu éclairées des nouveaux empereurs: Sous Commode, la société et le sénat s'orientalise. Ceci favorise la superstition qui va continuer de se développer sous la dynastie des Sévères avec l'appui du pouvoir impérial. L'empereur Septime Sèvère "comme presque tous les Africains, s’appliquait avec la plus grande ardeur aux vaines études de la divination et de la magie" (Gibbon, chap VI). Il introduit le philosophe sophiste Flavius Philostratus à sa cour et sa femme, l'impératrice Julia Domna, lui commande une vie d'Apollonios de Tyane (un néo-jésus-christ faiseur de miracles), genre de personnage que Lucien de Samosate  moquait comme des charlatans. La nourrice et le précepteur de Caraccala étaient tous deux chrétiens (Gibbon, chap XVI). La nièce de Julia Domna, Julia Mamaea, mère du futur empereur Alexandre-Sévère, s'intéressait aussi vivement aux choses du christianisme et pour ses dévotions, l'empereur Alexandre-Sèvère réunit les portraits de saints personnages, parmi lesquels Apollonius de Tyane, le Christ, Abraham et Orphée (Gibbon chap XVI). (ce ne sont pas des chrétiens car ils sont polythéistes contrairement aux vrais chrétiens mais ils montrent une sympathie marquée pour le christianisme)
    Une sympathie pour le christianisme continue ainsi de se diffuser sans obstacle majeur après Marc-Aurèle (les quelques persécutions sont courtes et d'ampleur limitées) et le christianisme bénéficie en fait le plus souvent du soutien du pouvoir impérial.

le néoplatonisme. Gallien fait venir le néoplatonicien Plotin à sa cour. L'appui impérial favorise cette nouvelle orientation de la philosophie. "Les nouveaux platoniciens s’épuisaient en disputes de mots sur la métaphysique. Occupés à découvrir les secrets du monde invisible, ils s’appliquaient à concilier Platon avec Aristote sur des matières aussi peu connues de ces philosophes que du reste des mortels ; et, tandis qu’ils consumaient leur raison dans des méditations profondes, mais illusoires, leur esprit demeurait exposé à toutes les chimères de l’imagination. Ils prétendaient posséder l’art de dégager l’âme de sa prison corporelle ; ils se vantaient d’avoir un commerce familier avec les esprits et avec les démons et, par une révolution bien étrange, l’étude de la philosophie était devenue l’étude de la magie. Les anciens sages avaient méprisé la superstition du peuple : après en avoir déguisé l’extravagance sous le voile léger de l’allégorie, les disciples de Plotin et de Porphyre s’en montrèrent les plus zélés défenseurs" "Fanatisme des philosophes: On est surpris et scandalisé que les philosophes eux-mêmes aient voulu abuser de la crédulité superstitieuse des hommes, et qu’ils aient cherché à soutenir les mystères grecs par la magie ou théurgie des platoniciens. Ils se vantaient audacieusement de pouvoir contempler l’ordre mystérieux de la nature, pénétrer les secrets de l’avenir, commander aux démons inférieurs, jouir de la vue et de la conversation des dieux supérieurs ; et, en dégageant l’âme de ses liens matériels, réunir à l’esprit divin cette immortelle particule de son être infini... [aboutissant à ce que Gibbon dénonce comme une] alliance monstrueuse de la philosophie et de la superstition" (Gibbon, chap XIII. chap XXIII).

- Perte du caractère romain. Le christianisme est également favorisé par l'ouverture trop rapide de la citoyenneté romaine à des peuples peu éclairés qui fragilisent la culture gréco-romaine (exemple: édit de Caracalla Sévère en 212) et qui, comme les barbares se convertissent facilement au christianisme. Au milieu du IIIe siècle, « les 35 tribus (originelles) du peuple romain composées de guerriers, de magistrats et de législateurs avait disparu dans la masse commune du genre humain: elles étaient confondues avec des millions d'esclaves habitants des provinces, et qui avait reçus le nom de Romains, sans adopter le génie de cette nation si célèbre. La liberté n'était plus le partage que de ces troupes mercenaires levées parmi les sujets et les barbares des frontières qui souvent abusaient de leur indépendance. Leurs choix tumultuaires avaient élevés sur le trône de Rome un Syrien, un Goth, un Arabe et les avaient investi du pouvoir de gouverner despotiquement les conquêtes de la patrie des Scipions » (Gibbon, chap VII).
    "Les légions victorieuses qui contractèrent dans des guerres éloignées les vices des étrangers et des mercenaires, opprimèrent d’abord la liberté de la république, et violèrent ensuite la majesté de la pourpre." GibbonObservations Générales sur la chute de l’Empire romain dans l’Occident (Tome 7). (Gibbon note que c'est un soldat d'origine barbare qui frappe Pertinax le premier). "les Romains de bonne foi reconnaissaient avec regret que la capitale avait attiré dans son sein tous les vices de l’univers et les mœurs des nations les plus opposées. [...] se trouvaient réunies dans une multitude d’hommes qui, sous la vaine et fausse dénomination de Romains" "Dans l’exercice de la juridiction domestique, les nobles de Rome montrent la plus délicate sensibilité pour toute injure qui leur est personnelle" Gibbon XXXI. Totalement contraire à l'esprit déterminé, l'inflexibilité héroïque et la hauteur aristocratique de de Socrate, Péricles et Fabius Maximus (selon Plutarque), les stoïciens...

    Note apolitique: On peut analyser ce fait avec un point de vue de droite et y voir un effet néfaste de l'immigration et du multiculturalisme. On peut aussi l'analyser avec un point de vue de gauche et y voir un défaut d'éducation, que Marc-Aurèle avait déjà décelé ce pourquoi il avait pensionné les philosophes pour instruire le peuple. (Il faut aussi citer les contre-exemples des syriens Philodème de Gadara et de Lucien ardant défenseur de l'épicurisme. Ce qui a donc été dit des orientaux même s'il est globalement vrai à l'échelle du groupe ne vaut évidemment pas à l'échelle des individus). Rome devait durer pour l'éternité. Elle a disparu en 2 siècles et demi. Gibbon explique qu'il écrit pour que les politiques connaissent les erreurs du passé afin d'éviter que la catastrophe ne se répète. La leçon c'est que la civilisation est une source d'antisélection naturelle. La protection et l'assistance apportée par l'état permet à des groupes humains arriérés de prospérer alors qu'ils auraient été éliminés à l'état naturel et quand les plus bêtes, les plus superstitieux, les moins éclairés se mettent à dominer démographiquement et idéologiquement al société, et bien il provoque le déclin de la civilisation et engendre leur propre destruction. Tant que l'exigence et la méritocratie république dominant à Rome a pu maintenir des élites de qualité, y compris d'origine étrangère. Le jour ou Caracalla a donné la citoyenneté romaine à tout le monde, Rome allait vers d'immenses problèmes.
    Ce problème de barbarisation de la culture s'aggrave dramatiquement au IVeme siècle après les réformes militaires désastreuses de Constantin (Michel de Jaeghere. Les derniers jours, la fin de l'empire romain d'Occident)
Voir les études génétiques: Posth et al., Sci. Adv. 2021; 7 : eabi7673. The origin and legacy ofthe Etruscans through a 2000-year archeogenomic time transect.

 

La terrible crise du IIIe siècle. épidémies + mauvaise gouvernance depuis le tyran Commode + perte de contrôle de l'armée + hausse de la fiscalité qui asphyxie l'économie -> crise économique (effondrrement monéaire) + famines + baisse de la natalité + défaites militaires + invasions barbares (des Goths déjà eux ! Les frontières du limes dégarnie en Germanie pour combattre les perses à l'est). Ceci conduit l'empire à une très grave crise qui atteint son apogée avec la faiblesse de l'empereur Gallien, occupé à converser avec le néoplatonicien Plotin dans son palais et qui laisse l'empire non-défendu se disloquer, envahi de toute part par les barbares. L'empereur Gallien donne une reconnaissance publique au christianisme. "L'avènement de Gallien, en augmentant les calamités de l'empire, rendit la paix à l'Église" Gibbon, chap XVI. (On ne dit pas pour le moment que le christianisme est la cause directe de tous ces problèmes, mais juste que les mauvais empereurs laisse la superstition proliférer et dégrader la culture classique).

    Après l'apocalypse entre 235 et 268 où famines + épidémies + barbares conduisirent à la mort de près de la moitié de la population, les empereurs Illyriens Claude II, Aurélien et Probus réagissent et font cesser rapidement le désordre. Les barbares qui mettaient presque tout l'empire à feu et à sang en toute impunité et sans réaction depuis des décennies ne comprennent pas de qui se passe. Avec les empereurs illyriens la machine romaine se remet tout à coup en marche et ils écrasent les barbares étonnés qui s'enfuient en détresse se cacher dans les montagnes. Ces évènements du milieu du IIIe siècle montrent que la puissance romaine certes diminuée était toujours là, mais qu'elle était complètement paralysée par une crise de gouvernance. Ce prémice aide à comprendre la crise terminale qui aura lieu 150 ans plus tard. (Les invasions du IIIe siècle mentionnent « trois cent vingt mille goths » donc comparable à celle du Ve siècle où le problème sera également politique, disons politico-religieux).


-  Les empereurs illyriens redressent l'état, doublent les effectifs militaires pour rétablir la sécurité et sauvent l'empire. Ils font aussi cesser la tolérance contre le christianisme et l'Empereur Dioclétien (fils d'esclave) va même tenter de le détruire complètement déclenchant la pire persécution que le christianisme ait jamais connue. Il fait brûler les églises, les livres sacrés, arrêter les prêtres, et torturer tous ceux qui ne sacrifient pas à l'Empereur.... Mais on ne détruit pas facilement une idée même avec la violence. On détruit une idée par une idée contraire et plus forte. Or, la belle philosophie n'est plus là. Le climat défavorable de la crise et des épidémies a encore accrue la superstition dans le peuple et dans les élites. On assiste à un effondrement de la pensée éclairée, ce qui ouvre la voie à la croyance aux miracles de Jésus qui paraissaient auparavant bien ridicules (voir Celse).

 

La Destruction de la Philosophie Classique. A la fin du IIIe siècle, les païens sont devenus beaucoup plus superstitieux et ils renient les philosophes classiques de la Grèce qui ont pourtant façonné leur culture depuis 700 ans. "Les bosquets de l’académie, les jardins d’Épicure, et même le portique des stoïciens furent presque abandonnés, comme autant d’écoles différentes de scepticisme ou d’impiété ; et plusieurs parmi les Romains désirèrent que les écrits de Cicéron fussent condamnés et supprimés par l’autorité du sénat. La secte dominante des nouveaux platoniciens crut devoir s’unir avec les prêtres" (Gibbon, Chap XVI). Ainsi, l'élite romaine jadis éclairée par l'épicurisme et le stoïcisme a disparu et la philosophie est désormais réduite au mieux à Aristote, en général à du néoplatonisme qui prépare le terrain pour le christianisme. Les conditions sont désormais réunies pour une transformation de plus grande ampleur c'est-à-dire à un changement de religion et donc de civilisation.

 

 

la mutation culturelle.  « N'est-ce pas précisément l'un des traits les plus caractéristiques du 3e siècle que la foi aveugle et l'entraînement irraisonnée des meilleurs esprits aux devins de toutes sortes et de toutes origines, aux thaumaturges et aux prophétiseurs? […]
     [Sous Dioclétien], l'expansion radical des rangs supérieurs de la société se doubla d'une évolution aussi radicale dans l'histoire de la pensée. C'est la thèse de ce chapitre. L'arrivée massive de nouveaux titulaires de charge ecclésiastique et laïque dans l'élite remodela cette dernière à leur image [...] Les mentalités repérables dans les limites de l'Empire à l'époque de Pline (Ier siècle) furent submergées par d'autres mentalités très différentes, plus populaire. 
Le spectre des croyances fut amputé de son extrémité sceptique et empirique. Il ne restait plus que le milieu et l'extrémité la plus crédule. […]  J'aurais donc tendance à compter non pas sur de nouvelles idées qui se seraient introduite dans la tête des individus mais sur des individus nouveaux avec leurs vieilles idées qui arrivent à des positions d'où on pouvait mieux les entendre - en bref une explication démographique du changement culturel. [...]
    L'événement historique central que l'on repère est la 
disparition du rationalisme. […] Le moyen-âge survient appelé ainsi parce qu'il se situe entre ce que les hommes des Lumières sentaient être leur propre époque éclairée et l'époque éclairée de l'Antiquité. […] Alors que Cicéron avait pu affirmer que les événements se produisaient soit parce qu'ils étaient voulus, soit par le destin, le hasard ou des causes naturelles, Augustin reculera d'un pas et prétendra que tous les événements en définitif dépendent de la volonté de Dieu. À quoi bon s'ennuyer avec les livres et la philosophie?"
Ramsay Macmullen. Christianisme et paganisme. Chapitre 3.
note: idées similaires défendues par Rostovtzeff et Arnaldo Momigliano.




PARTIE II


IVe siècle
le basculement: la guerre civile païen-chrétien

 

 

La conversion de Constantin. En 313, le général Constantin devient Empereur. Un édit de tolérance du christianisme est promulgué. Constantin s'entoure de chrétiens et commence à soutenir discrètement le christianisme en mêlant des symboles chrétiens à d'autres cultes. C'est généralement mal vu par l'élite mais tout cela n'est pas totalement nouveau. On a vu que les Sévères, Phillipe l'arabe, et Gallien avaient déjà fait des gestes de soutien ou de sympathie envers le christianisme au siècle dernier.

    La mère de Constantin était chrétienne donc l'hypothèse la plus probable c'est que Constantin était un chrétien dissimulé qui avait secrètement adopté la religion de sa mère dans sa jeunesse même s'il il n'était pas baptisé. Ensuite, il a avancé son christianisme très prudemment au début puis a éliminé un à un tous ses rivaux pour obtenir un pouvoir incontesté dans l'armée et dans l'état pour pouvoir enfin  se permettre de promouvoir plus ouvertement le christianismes. (D'après Eusebe Césarée, l'affrontement avec son rival Licinius aurait eu des motifs religieux.) Après l'élimination, de son grand rival Licinius en 325 Constantin se déclare alors ouvertement chrétien.  A Rome c'est alors la consternation

 "A Rome, dans cette citadelle du paganisme, dont Constantin n'avait pas toujours ménagé soigneusement les préjugés, il était devenu odieux depuis son changement de religion. Quand il vint dans ses murs en 326, il fut reçu avec des malédictions (Blaconuías), quitta promptement cette ville et n'y reparut plus. Libanius dit seulement que les Romains employèrent contre lui l'arme du ridicule ; peu importe que ce soient injures ou sarcasmes" Arthur Beugnot, Histoire le la destruction du paganisme

Constantin fonde une nouvelle capitale : Constantinople. L’Empereur se méfie de la possible résistance des aristocrates païens et préfère recruter des mercenaires barbares dans l'armée (ce qui aggrave la barbarisation et va créer des tensions ethnico-culturelles dans l'empire). Il confie à des chrétiens les postes clefs de l'administration qui commencent à persécuter le paganisme (destruction et pillage de temples païen pour financer sa politique de christianisation) mais Constantin est rapidement débordé par les fanatiques qui s'affrontent sur la vraie nature du christ. Au début il leur répond qu'on ne peut juste pas savoir si il découle du père ou s'il est de même nature, mais comme la querelle prend des proportions incontrôlables, afin de faire cesser les troubles il fixe le dogme chrétien et créé l'église catholique au concile de Nicée. En fait il vient d'ouvrir la boite de pandore, car les querelles entre sectes chrétiennes vont agiter tout le siècle et affaiblir l'empire. Entre les ariens, nicéen, donatises et autres ce sera des massacres dignes de la Saint-Barthélemy entre les différents branches du christianisme.


Constantin dénonce "les temples du mensonge" "les coutumes des temples et la puissance des ténèbres"

La Vie de Constantin écrite par l’évêque Eusèbe de Césarée met en scène une répression généralisée du paganisme. Rappelons que l’auteur, conseiller de l’empereur depuis l’époque du concile de Nicée en 325, rédigea ce texte entre la mort de Constantin en 337 et son propre décès en 339/340. [..] on peut penser que la cour de Constance II et l’Église propageaient de conserve l’idée que tous les sacrifices avaient été interdits par Constantin.
Vincent Puech





- Transformations économique: de l'evergétisme à la charité /  vers le moyen-âge. Dans l'antiquité, les élites avaient le plaisir du don et de la générosité. Cela avait été théorisé par les philosophes de l'antiquité. Epicure avait dit
       Les historien parlent d'évergétisme pour décrire la générosité pratiquée par les notables consistant à financer des édifices d'utilité publique, des banquets, des spectacles gratuits, , etc. On a des mécènes qui font des dons astronomiques à la communauté et sont honorés pour leur bienfaits.

    Les entrepreneurs qui se sont enrichi via leur entreprise se voient confiés la gestion de grand domaines qu'ils administrent très efficacement. Ils mettent ainsi leur talent de gestionnaire au service de la communauté, d'autant qu'ils financent tout avec leur propre argent. Avec la morale stoïcienne et épicurienne, il ne garde pas leur fortune pour eux mais brillent en magnifiant leur cité par des don, construisant des bains, des fontaines, font des distribution de pain gratuite, ce qui leur ouvre ensuite le succès aux élections. Avec ce système, il y a une compétition des notables en générosité pour pouvoir accéder aux carrières politiques.

 Ce système et tellement efficace que Renan écrit "Dans la haute antiquité, on peut dire que le monde n'avait pas besoin de charité".

Cela paraitra étonnant, mais contrairement à l'idée qui traine dans l'imaginaire chrétien, le succès initial du christianisme n'est pas dû à une absence de charité dans le mon païen et le paradoxe c'est que le christianismes va en fait détruire ce système pour des raisons théologiques. En effet, la mentalité chrétienne du mépris des honneurs et des richesses vient bouleverser ce système.

"Fais l'aumône [en secret afin d'éviter] d'être glorifiés par les hommes" Mathieu 6:2 "Ce n'est point par les oeuvres, afin que personne ne se glorifie" Éphésiens 2:9.  Rejet chrétien de ceux qui se prennent pour des dieux sur la terre ce qui est au contraire le but ouvertement avoué des épicuriens et des stoïciens. La morale chrétienne sera combattu par Spinoza, qui est un restaurateur la morale païenne, lorsqu'il écrivait à ce sujet: "Rien n'excite plus à la vertu[faire le bien] que l'espoir permis à tous d'atteindre aux plus grands honneurs, car tous nous sommes mus principalement par l'amour de la gloire ainsi que je l'ai montré dans mon Éthique" Spinoza, Traité Politique, VII, 6.

l'interdiction de la glorification des honneurs est incompatible avec l'évergétisme.
C'est une doctrine essentiellement catholique / aujourd'hui partiellement corrigé par le protestantisme et qui explique la sous performance économiques des pays catholiques. (inversion de la domination Europe du sud/ Europe du nord après la réforme protestante). l'éthique du capitalisme. Max Weber. Là il se produit l'inverse.


     Dans le protestantisme, la théorie de la grâce dit que dieu a déjà choisi qui il va sauver, et qu'il accorde à ses élus le droit de jour d'un avant-gout du paradis sur Terre. Donc pour des raisons théologiques les élus c'est à dire les riches sont admirés car ils sont vu comme ceux que dieu va sauver. Retour de la philanthropie dans la culture protestante mais des proportions bien moindre que ce qui existait ans l'antiquité). 

Tout cela est contraire à l'enseignement de Jésus qui enseigne la Haine du riche (qui ne rentrera pas au paradis) et qui invite à être pauvre. Les esséniens et les premiers chrétiens étaient des communistes qui vivaient comme dans les monastères.

  En l'absence de prestige social les grands donateurs cessent progressivement leur activité de mécène. Effet complètement pervers du christianisme. La morale de haine des riches est complètement contre-productive pour la charité publique en fait.  Les grands notables païens vont de plus en plus garder leur fortune pour eux-mêmes et se construire des villas immenses  avec les dons qu'ils faisaient auparavant à la communauté. On assiste à la fin de l'évergétisme au IVe siècle (écoutez Dumezil) apparition de grande villas dotées d'un luxe inutile et mondain pour l'aristocratie seulement.


L'autre raison de la fin de l'évergétisme c'est le changement de la forme de gouvernement (du Principat au Dominat). "Tant que les consuls romains furent les premiers magistrats d’un pays libre, ils durent au choix du peuple leur autorité légitime ; et tant que les empereurs consentirent à déguiser leur despotisme, les consuls continuèrent d’être élus par les suffrages réels ou apparents du sénat. Depuis le règne de Dioclétien, ces vestiges de liberté se trouvèrent effacés ; et les heureux candidats qui recevaient les honneurs annuels du consulat, affectaient de déplorer la condition humiliante de leurs prédécesseurs. Les Scipion et les Caton avaient été obligés de solliciter les suffrages des plébéiens, de s’assujettir aux formes dispendieuses d’une élection populaire, et de s’exposer à la honte d’un refus public." Gibbon, XVII

    L'autoritarisme gouvernemental qui a été nécessaire pour mettre fin à la crise du IIIe siècle, a républicanisme, à la compétition des notables pour les élections qui donnent accès aux carrières qui étaient une motivation très forte de l'évergétisme. Désormais les nominations se font sur le nom de famille et directement par l'administration impériale et plus à travers les élections populaires. Tendance marquée (pas encore systématique) à privilégier les chrétiens dans l'administration. La secte chrétienne devient l'état profond et se renforce et se prépare à faire son coup d'état théocratique.

    Les évêques remplacent l'ancienne aristocratie romaine pour la charité publique, mais l'argent part surtout pour les églises et les monastères et plus autant pour le bien public C'est moins efficace que l'évergétisme et la pauvreté augmente. Enfin les riches qui commencent eux aussi à se convertir font désormais des dons à l’église qui sont autant d'impôt qui échappent à l’état. Le mouvement est très important puisque l'Empereur chrétien Valentinien limite les dons des vierges et veuves aux évêques qui sont en train d'aspirer les ressources de l'Etat. "Le métier lucratif et honteux que les ecclésiastiques exerçaient pour dépouiller les héritiers naturels, enflamma l’indignation, même d’un siècle superstitieux." Gibbon, XXV. L'église bénéficie d'avantages fiscaux énormes qui appauvrissent l'état. Le consul païen Caïus Prétextatus disait ironiquement : « Donnez-moi la place d’évêque de Rome, et je me fais chrétien. »


Vers le servage. Pour compenser l'absence des dons des grands notables, il y a augmentation des impôts pour le peuple et durcissement des conditions pour les esclaves. Les petits propriétaires sont surtaxés, et forcés de vendre leur terre. En 332 sous Constantin, une loi, conservée au Code théodosien, entérine l'attachement des colons à la terre, en donnant au maître le droit de poursuivre le fuyard. Le progrès social est inversé. Avant on transformait progressivement des esclaves en hommes libres, maintenant, on transforme désormais des hommes libres en esclaves. Les emplois deviennent héréditaires. Les charges qui étaient électives deviennent aussi héréditaires. Système de caste qui bloque la méritocratie républicaine. Les juristes qui ont produit ces lois avaient peu de considérations de l'individu, de sa créativité et de son esprit d'initiative. C'est la fin du libéralisme. La société se sclérose et donc la sous-performance économique est alimentée par ces transformations favorisées par la mentalité apportée par le christianisme. Gibbon parle d'une politique « qui abaisse tout ce qui est élevé, qui craint toutes les facultés actives, et n’attend d’obéissance que de la faiblesse » (le christianisme appliqué).

 

   "Toute initiative et toute liberté étaient ôtées aux individus et l'Etat les écrasait de son poids." "[Pour l'empereur chrétien Valentinien] l'empire n'est qu'une immense prison."
     "Le triomphe du christianisme coïncide avec un effrayant progrès de la misère et de la mendicité." p445 "le luxe inouï des puissants s'oppose brutalement à la misère des pauvres [augmentation de l'injustice]" On assiste à la "concentration de la propriété entre les mains des puissants" "l'injustice et l'inégalité ne furent-elles jamais plus graves" p 333 "il semble enfin que les peines soient devenues plus atroces. La législation criminelle du IVe siècle laisse une impression d'horreur ; beaucoup de lois semblent dictées par des furieux. Spectacle inattendu au siècle des empereurs chrétiens" p 454 (Châtiments barbares sous les empereurs chrétiens conformes aux enseignements de Jésus-Christ qui invite à mutiler les corps. Ces châtiments cruels de même que la torture des citoyens avaient disparu grâce à Rome. Désormais, même dans les monastères, "les abbés se permettaient de mutiler leurs moines et de leur arracher les yeux" Gibbon)

  "Le moyen-âge commence avec Constantin. [Constantin] ouvrait toutes grandes les portes de l'Empire aux forces ennemies de la romanité: le christianisme et les barbares, il déclarait terminer la mission historique de Rome dans le monde et rendait le naufrage inévitable." "Si on le juge du point de vue de Rome son compte est lourd. Il a renforcé sur les grands domaines l'institution naissance du servage, il a brûlé les livres des philosophes, il a appelé des généraux germains au plus grand honneur de l'État. De vue du Moyen-Âge il faut reconnaître qu'il nous donne la première image du souverain médiéval qui vit les yeux levés au ciel. Il reste qu'il a trahi Rome."
André Piganiol, l'empire chrétien

 

 

- Restauration païenne. Après l'échec de la révolte païenne de Magnence, la Gaulle est déjà en train de s'effondrer. Attaques de germains mais Julien le neveu de Constantin envoyé en mission rétablit la situation. Bien qu'issu d'une famille chrétienne, Gibbon raconte que "La vénérable antiquité de la Grèce aspirait à Julien une tendresse respectueuse qui éclatait en transports, au souvenir des dieux, des héros et des hommes supérieur aux héros et au dieux qui avaient légué à la dernière postérité les monuments de leur génie ou l'exemple de leurs vertus(Gibbonchap XXII). Sous le commandement de Julien, l'armée romaine redevient la machine de guerre implacable face aux barbares qui avait jadis permis à Rome de conquérir un territoire si vaste avec une armée réduite. A la bataille de Strasbourg (Argentoratum) en 357 (50 ans avant les grandes invasions, on voit que les progrès ne sont pas fulgurants chez les barbares), on compte seulement 243 soldats et 4 tribuns militaires romains tués. Alors que du côté alaman, d’après Ammianus Marcellinus, 6000 guerriers tués + de nombreux noyés dans le Rhin en s'enfuyant. "Les victoires de Julien suspendirent un peu les invasions des Barbares, et retardèrent la chute de l’empire d’Occident." Gibbon, Chap XIX (qui se serait sinon produite plus tôt).

     Face à son succès militaire, il est proclamé Empereur par les troupes. Trahison de l'empereur chrétien: appel à l’aide des barbares qu’il a christianisé. "[Julien] avait découvert par des lettres interceptées de son rival sacrifiant l’intérêt de l’Etat à celui du monarque excitait les Barbares à envahir les provinces de l’Occident." "Soumettre au jugement du public le choix de deux princes, dont l’un chassait les barbares tandis que l’autre les appelait" Gibbon.

    Finalement, l'empereur chrétien décède de cause naturelle et Julien devient le seul empereur. Il annonce alors ouvertement qu'il a renié la religion chrétienne dans laquelle il était né. Il déclare que le christianisme "n’est qu’une fourberie purement humaine, et malicieusement inventée, qui, n’ayant rien de divin, est pourtant venue à bout de séduire les esprits faibles, et d’abuser de l’affection que les hommes ont pour les fables, en donnant une couleur de vérité et de persuasion à des fictions prodigieuses" (Contre les galiléens).
  Il accuse les chrétiens d'avoir persécuté les païens et chrétiens hérétiques: 
« L’odieux misérable (Anathase) ! sous mon règne le baptème de plusieurs femmes grecque de rang le plus élevé a été l’effet de ses persécutions » Gibbon "Vous [les chrétiens] avez égorgé non seulement ceux d'entre nous qui restons fidèles aux valeurs ancestrales, mais parmi les hérétiques égarés tout autant que vous, ceux qui ne se lamentent pas sur le cadavre [Jésus] de la même façon que vous"  Fr48 = Cyrille 206a
    A Alexandrie émeute de libération païenne contre la tyrannie des dirigeants chrétiens, Georges de Cappadoce et le général Artème qui sont exécutés.


     Julien voit une menace existentielle dans le christianisme et prend des mesures drastiques pour revenir au paganisme (les chrétiens sont ruinés par la condamnation à réparer les temples qu'ils ont détruits). Face aux protestations, il répond aux chrétiens que la pauvreté les rapprochera de leur dieu. Après avoir vaincu les barbares de Germanie, Julien décide de lancer une campagne militaire contre l'autre ennemi de Rome, la Perse, afin d'assoir définitivement sa légitimité incontestable en orient et dans l'armée et afin de pouvoir entreprendre des réformes de plus grande envergure. Avant de partir il promet aux dieux que s’ils lui donnent la victoire, lorsqu'il reviendra il anéantira la secte de Jésus. La suite vous la connaissez, il n'est jamais revenu, et le christianisme a triomphé.

    Alors, que c'est-il passé ? Julien meurt en 363 dans une bataille contre les Perses, mais Julien aurait été assassiné par un soldat romain touché par une flèche romaine. Cela semble être l'opinion des Perses qui ne revendiquent étrangement pas d'avoir atteint l'empereur (XXV,6,6). Plusieurs païens dénoncent l'assassinat de l'Empereur Julien par un romain chrétien et s'indignent que le coupable n'ait pas été puni (Libanios et l'orateur Fabricius) tandis que plusieurs chrétiens revendiquent l'assassinat (Zosomène et Grégoire de Nazianze. Voir fresques dans les églises). Alors, accident dans la confusion de la bataille ou meurtre opportuniste d'un soldat chrétien au milieu de la cohue ? La situation n'était peut-être pas très claire même pour les contemporains, en tout cas la polémique est révélatrice du climat de tensions religieuses extrêmes qui règnent à cette époque.
    Sur son lit de mort, Julien rendit l'âme en véritable païen "la nature me redemande ce qu'elle m'a prêté ; je lui rends avec la joie d'un débiteur qui s'acquitte et non point avec la douleur ou les remords que la plupart des hommes croient inséparables de l'état où je suis(Gibbon, chap XXIV).
 

Un manque de chance pour la romanité païenne? D'une manière générale, depuis Marc-Aurèle les empereurs favorables au christianisme ont globalement affaiblit l'empire (Commode, les Sèvères, Phillipe, Gallien, Valens...), au contraire, les défenseurs de la romanité ont combattu cette religion (opinion de Gibbon et Renan IV), mais après Marc-Aurèle leur règne fut le plus souvent très courts. La mort tragique, accidentelle et prématurée de Pertinax en 193, Gordien en 238, Dèce en 251, Claude II en 270, Aurélien en 275, Probus en 282 et enfin Julien en 363, (puis Eugène/Arbogaste en 394 et on peut même inclure même Majorien en 461) sont une explication supplémentaire à la disparition de cette civilisation qui a vraiment manqué de chance car aucune des diverses tentatives ultérieures de restauration de la romanité n'a jamais eu le temps d'aboutir. Au contraire Constantin et ses fils ont durés 54 ans au total, le temps donc de remodeler l'administration pendant pratiquement deux générations, et de placer ainsi le germe d'une christianisation durable. Si Bassianus avait réussi à assassiner Constantin ou si Julien avait duré aussi longtemps que Constantin, le monde serait différent. L'histoire se joue à peu de chose. Aucun empereur païen légitime n'aura duré suffisamment longtemps pour défaire cette transformation.

  Selon ses contemporains, s'il avait vécu plus longtemps, Julien serait vraisemblablement parvenu à "éteindre la religion de Jésus-Christ(Gibbon, chap XXIII). Le païen Procope que Julien avait secrètement prévu pour lui succéder manque de soutien et échoue à s'imposer en 365. "En négligeant d'assurer par le choix prudent et judicieux d'un collègue et d'un successeur, l'exécution future de ses projets (la restauration du paganisme) Julien fut en quelque sorte la cause du triomphe du christianisme et des calamités de l'Empire" (Gibbon, chap XXIV). On va assister à "la victoire de la barbarie et de la religion".


 

- Comment les chrétiens reprennent le pouvoir. Le préfet païen Secundus Salutius est proposé par l'armée pour lui succéder, mais celui-ci refuse s'estimant trop vieux et c'est finalement un général chrétien (Jovien) qui lui succède accidentellement:
    " les soldats placés en avant des enseignes, entendant saluer Jovien Auguste, répétèrent le cri de toutes leurs forces, parce que, trompés par la ressemblance des noms, qui ne diffèrent que d’une lettre, ils crurent que Julien leur était rendu, et que c’était lui qu’on accueillait avec l’enthousiasme ordinaire. En voyant s’avancer la longue figure voûtée de Jovien, on comprit la triste vérité, et ce fut une explosion de larmes et de sanglots. [suivi de défections dans l'armée]".
Ammien Marcelin, XXV, 5, 6

"Ce n'est donc pas la puissance du christianisme, mais bien les scrupules d'un vieillard qui empêchèrent l'ancien culte de se maintenir dans la position où Julien l'avait placé."
Arthur Beugnot, Histoire le la destruction du paganisme



Opportunisme religieux pour faire carrière.

(Julien est cependant un néoplatonicien superstitieux, anti-Epicure, ce qui reste de plus éclairé comme philosophe à cette époque et ne propose pas un paganisme satisfaisant. Lucrèce dénonçait les sacrifices d'animaux). Lui les pratiquait au point de choqué ses contemporains païens. Critiqué pour son zèle religieux qui ne lui permet pas de fédérer tous les païens. La plupart s'en foute de la religion. Un stoïcien éclairé aurait pu beaucoup mieux fédérer l'ensemble du monde romain qu'un néoplatocien qui finalement a les mêmes dogmes que les chrétiens.

Peu de chrétiens convaincus - une poignée de militants très déterminés introduits par cooptation à la cour de l'empereur. La société n'est pas chrétienne et cela démontre à quel point les lois de Théodose qui vont imposer la christianisation forcée sont illégitimes. C'est vraiment le coup d'état d'une secte.
    On a d'autres exemples historiques d'une minorité de militants qui prend le pouvoir. Les communistes étaient minoritaires en Russie ne 1917 et pourtant ils ont pris le pouvoir total. Une base de militants déterminés peut l'emporter sur une masse passive.

"Plus on pénètre dans la connaissance des usages de ce siècle, plus on est autorisé à penser qu'il existait peu de véritables chrétiens parmi les nobles." "Reconnaître que durant le quatrième siècle la foi véritable ne dominait plus dans les rangs des deux religions, c'est sans doute faire un aveu pénible; mais tout ce qui reste à dire ne le justifiera que trop."
Arthur Beugnot, Histoire de la destruction du paganisme

"Écebole, qui se conformait avec une merveilleuse facilité aux divers changements de fortune du christianisme. Du vivant de Constance, il affecta la plus vive ardeur pour les croyances nouvelles : Julien étant monté sur le trône, il reprit son ancien dévouement pour les dieux ; mais après la mort de ce prince, il pensa qu'il était bon de donner une grande publicité à son repentir"
Arthur Beugnot, Histoire de la destruction du paganisme

"Hekebolius que Constance désigna pour lui enseigner la rhétorique et qui oscillait, selon le vent du jour, du paganisme au christianisme, – païen d 'abord , puis chrétien, puis redevenu païen en 361 et chrétien de nouveau en 363 ;" "les Nazaréens, épouvantés en secret de la promptitude avec laquelle la moitié des leurs au moins a été ramenée à l'ancien culte par la douceur du jeune prince Julien , et surtout par le désir des honneurs dont le taurobole est le seul chemin"
Pierre de Labriolle, la réaction païenne.

Idem pour l'évêque Pegasios rencontré par l'Empereur Julien. (lettre à Pegasius)


Idem pour l"empereurl'Eugène.


Manque de militantisme païen: "Cette délégation des choses saintes était autrefois « sans inconvénients ' ; maintenant s'éloigner des autels « est un moyen de faire sa cour »" Symmaque cité par Beugnot



- Persécutions des intellectuels païens sous Valens/Valentinien.

On ne persécute pas directement la croyance païenne mais la pratique (la divination, astrologie) mais c'est une persécution du paganisme quand même. ex Le célèbre devin Amantius (Ammien Marcellin XXVIII)

Les procès d'Antioche de 371/2 (Ammien Marcellin 29.1-2) un cas de persécution religieuse? Éric Fournier

 

"un certain Festus (proconsul chrétien), esprit sanguinaire et digne d'un boucher [...] dès qu'il fut arrivé, exécuta la besogne qu'on lui commandait et y ajouta même du sien, lâchant la bride à ses instincts de bête fauve et à la rage de son âme. [...] Après avoir égorgé un nombre considérable de coupables et d'innocents, il couronna tant de meurtres par celui du grand Maxime. [...]  (il rentre dans un temple) bien qu'il n'eût guère l'habitude d'honorer les Dieux, puisque c'était pour les punir de leur piété (païenne) qu'il avait mis à mort toutes ses victimes."
Eunape, vie de philosophes et de sophistes, Maxime


"Presque tous les philosophes païens furent exterminés vers l'époque dont nous venons de parler" (Valens / Valentinien 364-375)
Sozomène, VI, 35

 

Alors est-ce une persécution du paganisme ? Piganiol clôt le débat: "S'il [Valentinien] n'a pas persécuté le paganisme, il a massacré, ce qui est pire, l'élite païenne" "[haine chrétienne] des hommes cultivés, des bien vétus, haine des riches. Valentinien soumet à la torture les plus haut personnages des milieux politiques et intellectuels. Il mène une lutte contre toute forme supérieure de culture. Il a décimée et terrorisée [les classes supérieures de culture hellénique]. "

André Piganiol, l'Empire Chrétien p218-220

"On ne peut nier cependant que cette longue terreur n'ait porté à l'ancien culte un coup fatal"
Arthur Beugnot, Histoire le la destruction du paganisme

Tout cela reste malgré tout insuffisant pour les chrétiens militants qui veulent l’interdiction complète du paganisme. "La conduite prudente et réservée des empereurs commençait à lasser les chrétiens ; ils s'étonnaient que la conversion des chefs de l'empire n'eût apporté aucun préjudice direct à l'ancien culte ; de là des murmures, des plaintes et des excitations à la violence." "En regardant ces édifices éclatants de dorures (au rata templa), beaucoup de chrétiens répétaient sans doute ce mot de Georges évêque d'Alexandrie : « Jusques à quand laisserons-nous subsister ces sépulcres ? » Bientôt leur zèle ne sera plus contenu." "Fatigués de la lenteur des princes, ils mettaient eux -mêmes la main à l'oeuvre"
Arthur Beugnot, Histoire le la destruction du paganisme



- Nouvelle Politique d'immigration menée par les empereurs chrétiens. Rome permettait déjà de faire cohabiter des peuples très différents au sein du même espace sécurisé. A l’époque d’Antonin le pieux, des barbares avaient demandé leur rattachement à l’empire mais avaient vu leur demande rejetée  ; ils avaient été jugéspas assez civilisé ou compatible avec Rome. Sous l'influence du christianisme les empereurs chrétiens accueillent des barbares en masse et vont exacerber les tensions ethniques dans l’empire. (massacre de 7000 Goths de Gaïnas à Constantinople par la population romaine excédée en 400).

    "Il n'y a là ni Grec ni Juif, ni circoncis ni incirconcis, ni barbare ni Scythe, ni esclave ni homme libre ; mais le Christ est tout et en tous." Paul. le communisme in différentialiste des chrétiens avec les barabres est dénoncé comme une folie par Celse. "étant donné la diversité des populations et de leur coutumes. Qui se met pareil dessein en tête témoignage par cela même qu'il est aveugle." Idem Empereur Julien selon qui les nations ont « un substrat de nature différente » dénoncé par Cyrille d'Alexandrie. Les romains ont une conception universaliste de la Raison qui s'article avec une identité des peuples. L'universalisme chrétien nie les identités nationale et veut tout fondre dans une oumma/communauté des croyants.


  Le but du christianisme n'est pas de rendre chrétien seulement les romains mais aussi les barbares. Avec l'appui de Valens, Fritigern goth converti au christianisme arien défait le roi goth Athanaric II qui avait lancé une très dure campagne de persécution des Goths chrétiens. Il craignait que le christianisme ne détruise l'ordre social des Goths encore païens. Gibbon, chap XXXVII. (païens barbares hors de l'empire eux aussi persécutés par les empereurs romaines chrétiens).
    Aussi quand les barbares chrétiens demandent de l'aide, l'empereur chrétien Valens laisse ces immigrés entrer (des barbares Wisigoths armés! dans l'empire romain 
confiant dans le fait qu'ils étaient déjà chrétiens (Wulfila avait évangélisé les Goths) ou qu'ils promettaient de se convertir à l'arianisme (Socrates scholasticus, Church History, book 4, chapter 33). Les mêmes qui avaient pillés l'empire au IIIe siècle.
     Mais les goths chrétiens une fois dans l'empire sont mal accueillis et s'avèrent en fait rapidement incontrôlables. On essaie alors de les soumettre par la force, mais consternation l’armée est mal dirigée, lance l’attaque avant d’en avoir reçu l’ordre et se fait battre à bataille d'Andrinople 378. Plutôt que de laver l'affront de cette défaite et de punir les pillages que les Wisigoths se sont permis en macédoine, et restaurer la suprématie de Rome, Théodose se contente de négocier en 382 une paix avec les Goths chrétiens.

    "Théodose eut l’adresse de persuader à ses alliés, que les conditions de paix [...] étaient l’expression sincère de son amitié pour la nation des Goths; mais il faisait une réponse bien opposée aux plaintes du peuple, qui blâmait hautement ces concessions humiliantes et dangereuses. [on espérait que]  leurs mœurs s’adouciraient par l’influence de l’éducation et de la religion chrétienne [...] Malgré ces arguments spécieux et ces brillantes espérances, il était bien facile de prévoir que les Goths seraient encore longtemps les ennemis des Romains, et qu’ils deviendraient peut-être bientôt les conquérants de leur empire. Ils montraient dans toutes les occasions le plus insolent mépris pour les citoyens et les habitants des provinces, qu’ils insultaient impunément." Gibbon, XXVI

 

- Politique faible vis-à-vis des barbares rebels. Théodose envoie par là un signal de faiblesse aux autres barbares qui vont bientôt tous rappliquer et tenter des incursions. Politique impensable sous Trajan (Décébale) et même sous Marc-Aurèle deux siècles plus tôt, qui avait proposé la paix à des germains qu’ils n’avaient pas respecté en l'attaquant par surprise. Tout à coup tous les autres barbares s'étaient mis à s'agiter à la frontière. Marc-Aurèle les a pourchassés et leur a fait payer leur trahison. Un barbare qui attaque Rome est un barbare mort ou esclave.

    "Voyant la plupart de ces peuples envoyer des députés pour solliciter leur pardon, était d'avis de s'en retourner, parce que le préfet du prétoire, Furius Victorin, était mort, et qu'une partie de l'armée avait péri. Marc-Aurèle, persuadé, au contraire, que la retraite des barbares et leurs dispositions pacifiques n'étaient qu'un artifice pour éloigner d'eux ce formidable appareil de guerre, fut d'avis de les poursuivre." (Hist Auguste)
    Grâce aux compagnes fermes de Marc-Aurèle, l'empire avait ensuite de nouveau regagner 50 ans de paix et elles auraient du conduire à l'annexion d'une partie de la Germanie, mais Commode n'a pas poursuivi cette sage politique. On ne peut pas contractualiser / pactiser avec les barbares. Les barbares ne se respectent que la force. Ils ne se tiennent tranquille que tant que Rome montre sa puissance. Le changement d’attitude sous l'empereur chrétien Théodose envers les envahisseurs est dû au christianisme. Pas tellement un changement de morale des romains sous l’influence chrétienne, mais surtout changement d’attitude envers les goths parce qu’ils sont chrétiens (avec les barbares non chrétiens comme Radagaise on restera impitoyable).


- L'alliance des romains chrétiens avec les barbares chrétiens. Au lieu de soumettre, chasser ou anéantir ces envahisseurs, l'empereur romain chrétien Théodose décide au contraire de s'allier à ces barbares chrétiens qu'il va tenter d'utiliser comme mercenaires pour mater les romains païens qui s'opposent à sa politique de christianisation de l'empire.

La radicalisation chrétienne provoque une nouvelle réaction païenne. Vers 380-390, les chrétiens nicéens prennent le pouvoir total. Théodose édicte des décrets qui interdisent la pratique du paganisme, amorçant la crise terminale de l'empire romain. Même sous la plume d'un historien chrétien, comme Henri-Irénée Marrou, on peut lire que l'état chrétien de cette époque était un "état totalitaire" (Michel Onfray. Christianisme religion d'état et code théodosien).

L'affrontement final païen-chrétien: la bataille de la rivière froide. En 394, les païens encore majoritaires à Rome conduit par Arbogaste (Franç païen fidèle au dieu Wotan) se révoltent et proclament Eugène empereur (Flavius Eugenius Augustus) contre Théodose et les fanatiques chrétiens qui ont pris le pouvoir à Constantinople. Eugène né païen converti au christianisme est accusé d'apostasie par le clergé (C'est même un païen selon Philostorge ; probablement un de ces païens dissimulé qui prennent le christianisme seulement pour faire carrière ). Arbogaste promet de changer à son retour l'église de Milan en écurie et de forcer tous les moines à servir dans l'armée (Paulin, Vita Ambrosii), si les dieux lui accordent la victoire. L'opposition n'est plus romains contre barbares, mais elle est religieuse. On a d'un côté les païens (romains et barbares principalement francs) contre chrétiens (romains + barbares principalement wisigoths). L'Espagne se rallie à Eugène. Augustin cité de Dieu, V et Claudien parlent de "guerre civile" terme repris par Gibbon en opposition avec la transition douce proposée par les historiens chrétiens.
    Note: Théodose ne prévoit pas de ravitaillement pour les Goths au Frigidus et Honorius leur tendra un guet-apens en 409, donc il y a volonté de les éliminer. La politique des empereurs chrétiens est de réduire les barbares chrétiens en les utilisant contre les romains païens. On ne dit pas que les chrétiens romains sont pro barbares mais seulement qu'ils préfèrent les barbares chrétiens aux romains païens.

    Avant la bataille, l'armée d'Arbogaste met en avant des statues de Jupiter et d'Hercule pour humilier l'empereur chrétien Théodose qui lui fait porter devant son armée le grand étendard de la croix ("déployer dans ses armées contre l’invincible étendard de la croix les symboles idolâtres de Jupiter et d’HerculeGibbon, XXVIII). Comme Rufin d’Aquilée (Histoire ecclésiastique, XI, 31), Sozomène, (Histoire ecclésiastique, VII) souligne l'engagement pour la cause païenne ; Arbogast et Eugène auraient promis à Flavien de renverser l’Église (Paulin, Vita Ambrosii, 30.).

 A la fin du premier jour, la nuit tombe, la bataille n'est pas finie mais elle tourne clairement à l'avantage des païens menés par Eugène-Arbogaste. Les wisigoths envoyés en première ligne ont été décimés. "Le carnage fut si furieux que la plupart des confédérés furent taillés en pièce" (le général Bacurius "aussi zélé pour la défense de la religion chrétienne que pour le service de l’empereur" a été tué)". 10 000 goths tués sur 20 000. Ils ont subis de très lourdes pertes. On notera que ceci constitue une preuve que l'armée romaine pouvait donc très bien battre les envahisseurs wisigoths si les romains s'étaient unis contre les envahisseurs au lieu de se battre entre eux. sources: ZosimeSocrateThéodoret AugustinPlus de détails sur cette épisode chez Charles le Beau et dans Histoire de Théodose le Grand. Esprit Fléchier

    L'empereur chrétien Théodose fait alors une prière: "Vous savez, mon Dieu, que j'ai entrepris cette guerre au nom de Jésus-Christ votre fils. Si mes intentions ne sont pas aussi pures que je pensais, que je périsse. Si vous approuvez la justice de ma cause et la confiance que j'ai en vous, secourez moi, et ne permettez pas que les gentils disent : Où est le Dieu des Chrétiens ? " "Non, dit- il, la croix ne fuira pas devant les images d'Hercule ; je ne déshonorerai point par une lácheté sacrilége le signe de notre salut." (Eugène s'écrit "Ou est le dieu de Théodose ?" (Ambroise, oration on the death of Theodosis). Pour les chrétiens, la providence lui est venue en aide.

 

    Le camps païen est affaiblit par la défection et trahison du général Arbitrius, chargé par Arbogaste de couper la retraite à l'ennemi avec un corps d'armée de 20 000 hommes.

    " Tandis que les troupes d’Eugène célébraient leur triomphe dans son camp par les orgies d’une joie insolente, le vigilant Arbogaste fit occuper les passages des montagnes par un corps nombreux, pour couper l’arrière-garde des ennemis, et Théodose aperçut au point du jour tout l’excès du danger de sa situation. Mais les chefs de ce corps firent bientôt cesser les craintes de l’empereur, en lui envoyant offrir de passer sous ses drapeaux. Théodose accorda sans hésiter toutes les récompenses honorables et lucratives qu’ils exigeaient pour prix de leur perfidie ; et au défaut d’encre et de papier, qu’il n’était pas facile de se procurer, il écrivit sur ses propres tablettes la ratification du traité." Gibbon, XXVII

     De plus, le second jour, le sens du vent  favorise les archées de Théodose et le camp d'Eugène-Arbogaste perd de justesse cette bataille au pris de très lourdes pertes (bataille du Frigidus)Le vent de la région la bora peut être particulièrement très violent certains jours (200km/h). Les soldats sont "aveuglés de poussière"
     "L’armée de Théodose était garantie, par sa position, de l’impétuosité du vent, qui soufflait un nuage de poussière dans le visage de l’ennemi, rompait ses rangs, arrachait les épées des mains des soldats, et repoussait contre eux leurs inutiles javelots." Gibbon, XXVII." Des soldats présents à la bataille m’ont rapporté qu’ils se sentaient enlever des mains les traits qu’ils dirigeaient contre l’ennemi ; il s’éleva, en effet, un vent si impétueux du côté de Théodose, que non-seulement tout ce qui était lancé par ses troupes était jeté avec violence contre les rangs opposés, mais que les flèches de l’ennemi retombaient sur lui-même." Augustin.
    La civilisation gréco-romaine est perdue. Si une civilisation, c'est ce qui s'agrège autour d'une religion, alors la civilisation gréco-romaine meurt et même toute l'antiquité meurt ici en 394, dernier moment où paganisme avait encore la force de renverser la situation. Eugène est exécuté. Arbogaste et Virius Nicomachus Flavianus se suicide.
    " Convaincu qu’il n’avait plus de ressource, et que sa fuite était impossible, l’intrépide Barbare imita l’exemple des anciens Romains, et se perça de sa propre épée. Le sort du monde romain se décida dans un coin de l’Italie." Gibbon, XXVII.


L'affaiblissement militaire de l'Occident. Après la bataille de la rivière Froide guerre civile (réunit toutes l'armée romaine de l'époque + seulement 80 000 hommes), les effectifs militaires s'effondrent en occident et on peinera ensuite à réunir 30 000 hommes même en sollicitant les esclaves (soldats mals recrutés mal équipés mal formés.). La défaite d'Arbogast a des conséquences politiques et sécuritaires désastreuses pour la partie occidentale. Elle provoque l'effondrement militaire de l'Occident à cause d'une perte de soutien des grandes familles païennes occidentales vis à
 vis du pouvoir impérial qui les persécute et a interdit leur religion.

Grosses tensions perdurent dans l'armée qui ne peut être réunifiée "A campée aux environs de Milan, elle se trouvait en face des légions victorieuses de Théodose. Les passions n'étaient pas encore assez affaiblies pour qu’un semblable rapprochement fût, sans péril ; aussi craignit-on un instant que les deux armées n'en vinssent encore une fois aux mains ? Stilicon s'empressa de prévenir une collision en publiant l'amnistie prescrite par Théodose mourant "
Arthur Beugnot, Histoire le la destruction du paganisme


Dans le même temps le pouvoir chrétien investit ses ressources dans les églises et néglige l'armée, seulement déléguée à des barbares mercenaires (changement culturel causé par le changement de religion). Bilan de cet affaiblissement militaire, morale, économique et de la cohésion nationale à cause des oppositions religieuses: les barbares voient la désorganisation romaine et profitent de la situation. Le point de non retour se situe probablement ici. Maintenant qu'il est franchi, la catastrophe est désormais certainement inéluctable. Mais on va voir que le christianisme va encore accélérer la décomposition et provoquer une chute brutale.

 

Pillage de la Grèce. Alaric le roi des Wizigoths voit la faiblesse de l'armée romaine qui s'est autodétruite lors de la bataille du Frigidus à laquelle il a participé du coté chrétien comme mercenaire et donc il va profiter de la faiblesse de l'Empire. Les wisigoths ne veulent pas spécialement détruire l'Empire Romain. Ils veulent être intégrés à l'empire et le menace pour soutirer de l'argent des terres et obtenir une reconnaissance légale. Alaric "avait sollicité le commandement des armées romaines ; irrité du refus de la cour impériale" il s'en va alors ravager la Grèce. Un an après la bataille de la rivière froide, les wisigoths pillent la Grèce. La destruction du berceau de la civilisation gréco-romaine se produit avec les barbares laissés libre à l'intérieur de l'Empire: "Les plaines fertiles de la Phocide et de la Béotie furent bientôt couvertes d’une multitude de Barbares qui massacraient tous les hommes d’âge à porter les armes, et entraînaient avec eux les femmes, les troupeaux et le butin enlevé aux villages qu’ils incendiaient. Les voyageurs qui visitèrent la Grèce plusieurs années après, distinguèrent encore les traces durables et sanglantes de la marche des Goths". Et ce n'est qu'après avoir ravagé Sparte et Athènes qu'"un édit publié à Constantinople déclara la promotion d’Alaric au rang de maître général de l’Illyrie orientale. Les habitants des provinces romaines, et les alliés qui avaient respecté la foi des traités, virent avec une juste indignation récompenser si libéralement le destructeur de la Grèce et de l’Épire. Le Barbare victorieux fut reçu en qualité de magistrat légitime dans les villes qu’il assiégeait si peu de temps auparavant. Les pères dont il avait massacré les fils, les maris dont il avait violé les femmes, furent soumis à son autorité, et le succès de sa révolte encouragea l’ambition de tous les chefs des étrangers mercenaires. [...Alaric donna] l’ordre de fournir à ses troupes une provision extraordinaire de boucliers, de casques, de lances et d’épées. Les infortunés habitants de la province furent contraints de forger les instruments de leur propre destruction, et les Barbares virent disparaître l’obstacle qui avait quelquefois rendu inutiles les efforts de leur courage" Gibbon, chap XXX.


Alaric un romain ? Plutôt que de le vaincre militairement, le pouvoir faible de Constantinople essaie de calmer le chef des Wisigoths en lui accordant un titre de général. Le titre de général attribué à ce barbare n'a donc pas été donné volontairement. Il l'a extorqué par la force. Cette lâcheté du gouvernement chrétien envers les envahisseurs va continuer tout au long du Ve siècle. Idem pour les Vandales et même pour Attila: 
"tribut dont il déguisa la honte en donnant le titre de général romain au roi des Huns" Gibbon, chap XXXIV. Donc affirmer que la vision classique de la chute de Rome par les barbares est un mythe qui recouvre en fait une réalité plus complexe sous prétexte qu'Alaric le roi des Wisigoths a obtenu le titre de général romain est vraiment un travestissement de la réalité historique par nos modernes épris de relativisme culturel (écueil véhiculé par la chaîne Nota Bene. Les invasions barbares, un mythe ?).

 



le tournant du Ve siècle
la chute de Rome, de l'Occident, et de la civilisation gréco-romaine

 

    En 402/403, les wisigoths attaquent l'Italie (exode de la population vers l'Afrique et l'orient) mais sont contrés par le général romain Stilicon. Dans son discours aux armées, il dit que 
"[les Goths] Longtemps protégé non par ses propres forces que par la confusion et les discordes civiles qui tiennent encore l’univers en suspens".

Claudien, guerre contre les Gètes
    "Saint Jérôme après avoir décrit les ravages des Huns  ajouter : « A cette époque la discorde régnait parmi « nous, et la guerre domestique surpassait la guerre « étrangère."
Arthur Beugnot, Histoire le la destruction du paganisme

   
Après avoir remporté la bataille, plutôt que de profiter de son avantage sur les Wisigoths, Stilicon "proposa de payer la retraite des Barbares" Wisigoths. Gibbon, chap XXX. Funeste politique de continuer de tenter d'en faire des mercenaires pour pallier au manque de soldats. Ces wisigoths vont contre-attaquer 7 ans plus tard et piller Rome.

 

- Politique faible du déshonneur. Cette mauvaise politique de compromission se poursuit avec le paiement d'or aux barbares pour essayer d'acheter la paix. L'empereur chrétien Honorius et Stilicon imposent au réticent sénat païen de Rome le paiement d'un tribu aux Wisigoths au lieu d'utiliser cet argent pour lever une armée et de les annihiler. Pour le sénat de Rome "il était indigne de la majesté de Rome d’acheter une trêve honteuse d’un roi barbare, et qu’un peuple magnanime devait toujours préférer le hasard de sa destruction à la certitude du déshonneur (Lampadius)." Gibbon, chap XXX (Churchill: "Le gouvernement avait le choix entre la guerre et le déshonneur ; il a choisi le déshonneur et il aura la guerre").
    Une illustration de la perte totale du caractère romain sous les empereurs chrétiens. Gibbon fait le parallèle avec la résistance héroïque de Rome contre l'attaque surprise d'Hannibal, et nous nous pouvons la faire avec Churchill, lors "les heures sombres" (juin 1940). Gibbon avait écrit pour former les politiques. Rome que l'on croyait devoir être un empire éternel est pourtant rapidement tombée et tout chef d'état doit connaître les erreurs commises pour ne pas refaire les mêmes. Peut-être a-t-il influencé Churchill et indirectement sauver l'Europe du nazisme... On ne peut pas contractualiser la paix avec un fauve, une bête sauvage. (Gibbon XXXI citant le roi des Goths disant lui-même que "le caractère indocile et féroce des Goths n’est point susceptible de se soumettre à la contrainte salutaire d’un gouvernement civil")

- En 406 les Ostrogoths attaquent l'Italie. La faiblesse de Rome a éclaté au grand jour. Des barbares se précipitent pour piller. Un grand nombre de villes d'Italie du Nord sont détruites ou pillées par l'Ostrogoth Radagaise qui fait le siège de Florence en 406. La chute de Rome approche.

- Les dissensions religieuses n'ont pas disparues. "Les adorateurs de Jupiter et de Mars, opprimés par leurs concitoyens, respectaient dans l’implacable ennemi de Rome (Radagaise), le caractère d’un païen zélé ; ils déclaraient hautement que les sacrifices de Radagaise leur paraissaient beaucoup plus à craindre que ses armes, et ils se réjouissaient secrètement d’une calamité qui devait convaincre de fausseté la religion des chrétiens." Gibbon, chap XXX  Augustin, cité de Dieu, V, XXIII
    On disait tout haut : « C'est la faute de ces gens-là et de leur Dieu ! » « Comment résisterions-nous à un ennemi qui sacrifie, nous qu’on empêche de sacrifier? » s’écriaient les païens avec rage, et alors éclataient les imprécations, les blasphèmes, les menaces contre la religion du Christ et contre les lois des successeurs de Constantin. » 
Amédée Thierry. Revue des deux mondes. Trois Ministres de l’empire romain sous les fils de Théodose.

- Le constat de l'effondrement militaire"Toutes les espérances du vigilant ministre d’Honorius (Stilicon) se bornèrent à la défense de l’Italie. Il abandonna une seconde fois les provinces, rappela les troupes, pressa les nouvelles levées exigées à la rigueur et éludées avec pusillanimité, employa les moyens les plus efficaces pour arrêter ou ramener les déserteurs, et offrit la liberté et deux pièces d’or à chaque esclave qui consentait à s’enrôler. Ce fut à l’aide de ces ressources que Stilichon parvint à rassembler avec peine, parmi les sujets d’un grand empire, une armée de trente ou quarante mille hommes, que, dans le temps de Scipion ou de Camille, eussent fournie sur-le-champ les citoyens libres du territoire de Rome." Gibbon, Chap XXX.

 

Le clergé contre les honneurs pour les héros militaires. Stilicon rapatrie toute l'armée romaine en Italie et stoppe les Ostrogoths. "quand cette grande menace se fut dissipée comme un rêve, les chrétiens revendiquèrent l'honneur d'une victoire dont le profit était à eux. [...] Dans ce système, la gloire et les services de Stilicon devenaient un embarras : on les atténua, on les effaça, on les nia. [...] Des versions combinées dans cette intention, et que nous pouvons lire encore, présentèrent ce général et l'armée romaine comme de simples spectateurs de la victoire, qui n'avaient pas tiré l'épée, pas eu un seul mort, pas un blessé ; mais qui buvaient, mangeaient et se divertissaient ( tels sont les termes du récit d'Orose) pendant que le ciel se chargeait de tout faire. Malheur à qui fût venu réclamer sa part de gloire contre Dieu !"

Amédée Thierry. Revue des deux mondes. Trois Ministres de l’empire romain sous les fils de Théodose.
-> Saint-paul vs Spinoza sur la gloire. L'ambiance n'est pas tellement favorable au recrutement.

 

Le passage du Rhin. Le rapatriement en Italie de toute l'armée en Italie facilite le passage du Rhin par les barbares (nuit du 31 décembre 406) qui ravagent l'Occident, seulement donc 10 ans après la victoire finale du christianisme sur le paganisme.  A partir de 407, on assiste à un effondrement brutal de l'occident d'abord en Gaulle et en Bretagne: des villes entières disparaissent. C'est la pire invasion depuis des siècles.
    "Ce passage mémorable des Suèves, des Vandales, des Alains et des Bourguignons, qui ne se retirèrent plus, peut être considéré comme la chute de l’Empire romain dans les pays au-delà des Alpes ; et dès ce moment, les barrières qui avaient séparé si longtemps les peuples sauvages des nations civilisées, furent anéanties pour toujours."  Gibbon, chap XXX


Vandales, d' Alains et de Suèves (Quadiens, Marcomans et Alamans)


 

- La modération religieuse du général Stilicon énerve le clergé. Depuis la bataille du Frigidus, Stilicon applique une politique d'apaisement envers les païens à Rome. Il fait, par exemple, protéger les temples païens, avec pour argument la volonté ne pas dénaturer les cités romaines. Il s'entoure, de plus, de païens notoires, tels son panégyriste, Claudien, et traite avec déférence le Sénat de Rome, où les anciens cultes sont encore très pratiqués.

"Le sénat paraît avoir regardé Stilicon comme un partisan secret de l'ancien culte ; car dans plusieurs missions qu'il lui confia près des empereurs , il lui adjoignit Symmaque"
Arthur Beugnot, Histoire le la destruction du paganisme

 

Tout cela attise la haine du clergé, lorsque son fils se déclare païen. Les chrétiens montent un intrigue de cour pour le faire assassiner.
 

    " Le ministre Olympius dit à l'empereur Honorius à propos du fils de Stilicon « que son fils avait déjà un parti puissant; qui le désiraient pour maître, dans l'espérance qu'il relèverait l'idôlatrie ; que [Stilichon] le père , chrétien en apparence, avait élevé son fils dans le paganisme, afin de réunir ainsi les deux grands partis qui divisaient tout l'empire "

Charles Le Beau. Histoire du Bas-Empire en commençant à Constantin le Grand

    " dans l’opinion des chrétiens l’éducation d’Euchérius se trouvait entachée de paganisme. Un maître de rhétorique, de philosophie, de poésie, interprète de systèmes ou d’ouvrages littéraires fondés sur le polythéisme, était assez naturellement soupçonné d’être lui-même païen, pour peu qu’il admirât ses modèles : or du maître à l’élève il n’y avait qu’un pas, et la présence assidue de Claudien dans la famille de Sérène donnait assez naturellement couleur aux suppositions. Sans s’arrêter à rien éclaircir, les partis décidèrent qu’Euchérius était païen. On alla jusqu’à citer de lui des propos menaçant contre le christianisme. Nouveau Julien, disait-on, il avait promis aux hiérophantes et aux sophistes, ses maîtres, d’inaugurer son principat par le rétablissement des temples et le renversement des églises"
Amédée Thierry. Revue des deux mondes. Trois Ministres de l’empire romain sous les fils de Théodose.

 

- L'assassinat du généralissime Stilicon en 408. Alors que la Gaulle est à feu et à sang, et que la situation est critique, le gouvernement chrétien redoute que cette crise favorise un général qui aurait pu remettre de l'ordre comme Julien et Arbogaste et reprendre le pouvoir (mais aussi s'en prendre au christianisme). En cas de succès sur le champ de bataille, c'est ce qui serait inévitablement arrivé. Il serait devenu l'empereur légitime. Ils ne veulent pas d'une troisième restauration païenne aboutisse.  L'affrontement religieux est une cause majeure derrière cette politique. De peur de la renommée grandissante du général Stilicon qui vient de sauver Florence (et Rome) et de son fils, le gouvernement chrétien préfère faire assassiner préventivement le dernier grand général qui lui reste plutôt que d'avoir à affronter une nouvelle restauration du paganisme.
     "Le clergé, en célébrant dévotement le jour heureux (de la mort de Stilicon) qui en avait délivré presque miraculeusement l’Église, assura que si Euchérius (le fil de Stilicon) eût régné, le premier acte de sa puissance aurait été de rétablir le culte des idoles et de renouveler les persécutions contre les chrétiens." Gibbon, XXX

 

- La cour de Constantinople choisi d' imposer le christianisme nicéen à tout prix au mépris de la sécurité de Rome. Une fois débarrassés de Stilicon, en 408, le parti de l'unité catholique obtient l'interdiction aux païens de servir l'état, "Par cet édit, (l'empereur) Honorius écartait de tous les emplois de l’état tous ceux dont la croyance était en opposition avec la foi de l’Église catholique, rejetait absolument les services de tous ceux dont les sentiments religieux ne s’accordaient pas avec les siens, et se privait ainsi d’un grand nombre de ses meilleurs et de ses plus braves officiers, attachés au culte des païens ou aux erreurs de l’arianisme. Alaric aurait approuvé et conseillé peut-être des dispositions si favorables aux ennemis de l’empire Gibbon, XXXI.
 

   « Bien que ce Généride (Generidus) fût un étranger, il ne laissait pas d’être un modèle accompli de vertu, et d’être tout-à-fait supérieur à l’avarice. Il était demeuré étroitement attaché à la religion de ses pères. Lorsqu’on publia une loi par laquelle il était défendu à ceux qui n’étaient pas chrétiens de porter la ceinture, il mit bas la sienne, et demeura dans sa maison. L’empereur lui ayant depuis commandé de venir au palais en son rang avec les autres officiers, il répondit qu’il y avait une loi qui lui défendait de se tenir au rang des officiers et de porter la ceinture. L’empereur lui ayant répondu que la loi était faite pour les autres, et non pour lui qui s’était exposé à tant de hasards pour le bien de l’état, il persista à refuser un honneur qu’il ne pouvait accepter sans faire injure aux autres, jusqu’à ce que l’empereur, pressé par la honte et par la nécessité, abolit entièrement la loi, et permit d’exercer les charges à ceux qui ne voulaient point changer de religion. » (en fait  il est fait seulement temporairement des exceptions loi de 410 avant de réappliquer à nouveau en 416)
Zosime


[...épuration des soldats d'origine barbare de l'armée romaine...] Par cette conduite inconcevable, les ministres d’Honorius perdirent non-seulement trente mille des plus braves soldats de leur armée, mais en firent leurs ennemis ; et le poids que devait mettre dans la balance ce corps formidable, capable à lui seul de déterminer l’événement de la guerre, passa du parti des Romains dans celui des Goths." Gibbon, XXXI.


- La priorité absolue du gouvernement chrétien n'a pas été de combattre les envahisseurs barbares mais de détruire le paganisme quitte à utiliser les barbares
Comment expliquer une politique si absurde ? Incompétence totale de la cour, en partie oui mais cette politique absurde de notre point de vue n'est pas absurde du point de vue du chrétien militant. Peu importe la cité terrestre, ce qui compte c'est la christianisation des âmes et il vaut mieux privilégier un barbare chrétien qu'un romain païen.
    Le barbare n'est pas une menace pour l'empereur chrétien planqué dans son palais de Ravennes derrière ses marécages. Le peuple romain chrétien ne va pas se rallier à un barbare et les païens ne vont pas se rallier à un chrétien. Au final, donc l'empire finira par traiter avec Alaric, Genséric, Attila même s'ils continuent de piller. En revanche les barbares païens en position de servir dans l'armée romaine officielle sont les plus dangereux pour l'empereur chrétien et eux sont éliminés sans pitié.

 

- Le sac de Rome: un accident lié à la priorité donnée au christianisme ou pire encore, une volonté délibérée des chrétiens intégristes de châtier les païens réfractaire à Jésus ?
 Face à tant de mesures absurdes du gouvernement chrétien, on peut s'interroger si le sac n'était pas finalement intentionnel ?

 

   Un sentiment qui ressort de la lecture des sources Les chrétiens sont pro-barbare quand il s'agit de lutter contre les païens: "on trouve chez les chrétiens plus de textes exprimant de l'empathie envers les Barbares que chez tous les auteurs non chrétiens réunis : même Jérôme, si hostile aux Barbares en général, trouve à louer les Goths lorsqu'il adresse à deux d'entre eux, Sunnia et Frétéla, une très longue lettre répondant à leur demande de comparer la version grecque et la version latine des Psaumes.[...] Salvien de Marseille est plus systématiquement positif" Claire Sotinel Les chrétiens sont-ils responsables - - lhistoire.frDans le récit de l'affrontement entre le général païen Litorius et le roi chrétien Théodoric, on sent que les auteurs chrétiens  préfèrent le chrétien barbare plutôt que le romain païen (Salvien de Marseille).

 

    Le clergé préfère le général chrétien barbare au général romain pas assez chrétien  au goût du clergé. "Alaric, quoique arien, était un chrétien fidèle et pieux qui ne voulait point combattre le jour de Pâques, tandis que l’impie Stilicon violait de gaîté de cœur la sainteté de cette fête".
Amédée Thierry. Revue des deux mondes. Trois Ministres de l’empire romain sous les fils de Théodose.


     
En effet à la Bataille de Pollentia "Stilichon résolut d’attaquer les dévots barbares tandis qu’ils célébraient pieusement la fête de Pâques. L’exécution de ce stratagème, que le clergé traita de sacrilège, fut confiée à Saul, barbare et païen".Gibbon, chap XXX


Pas s
eulement une préférence des barbares chrétiens. Certaines sources font carrément références à une manipulation délibérée des barbares contre Rome ?


- le païen "Eunape (in vit. Philosoph.) donne à entendre qu’une troupe de moines trahit la Grèce et suivit l’armée des Goths (en 395)" 
Gibbon, chap XXX) et Augustin confirme que les Goths ont été excités par les prêtres contre le paganisme: "[les barbares wisigoths d'Alaric] se sont montrés ennemis si acharnés des démons et de tout ce culte où Radagaise mettait sa confiance, qu’ils semblaient avoir déclaré aux idoles une guerre plus terrible qu’aux hommes." Augustin, cité de dieu
    "Alaric déclara la guerre à l'empire d'Occident, ravagea la Pannonie, la Macédoine, la Thessalie, et ne trouvant rien qui lui fit obstacle , il envahit la Grèce. Ses soldats détruisirent les plus beaux monuments païens de cette contrée" "Les Goths étaient ariens et très -attachés aux croyances de cette secte. Leur fureur dévastatrice se porta principalement sur les temples et les simulacres païens." Arthur Beugnot, Histoire le la destruction du paganisme

According to Claudian, Stilicho was in a position to destroy them, but was ordered by Arcadius to return the Eastern Empire's forces and leave Illyricum.

"les conseillers chrétiens du prince n'oubliaient pas l'horreur des blasphèmes commis à Rome en 406" pour Paul Orose, [l'explication du sac de Rome est que] Dieu a décidé de chantier cette tempête de blasphèmes qui éclata à Rome durant l'été 408" . Paul Orose écrit "que l'incrédulité et la désobéissance sera laissée comme excrément et comme paille pour être détruit et brûlé".
- On a vu les manœuvres du ministre Olympus.

- "[la chrétienne] Serena fut accusée de vouloir livrer la ville aux barbares" la chrétienne Serena, nièce de Théodose exécutée pour collusion avec Alaric sur ordre du sénat peu avant le sac de Rome accusée par Zosime, chrétienne fanatique accusée d'avoir prophanée le temple des vestales.
- la chrétienne Anicia Faltonia Proba sera accusée d'avoir ouvert les portes aux barbares (selon le chrétien Procope).

- L'empereur Honorius accusé d'avoir appelé lui-mêmes les barbares pour réprimander ses propres sujets" (selon
 le chrétien
Procope de Césarée, Histoire de la Guerre des Vandales, I, II). VIe siècle


"[si les troupes restantes ne sont pas employées pour sauver Rome peut-être aurons nous droit de parler de trahison" "[Pour André Piganiol, les chrétiens intégristes de la cours impériale qui ont participé à la chuté Stilicon] Olympius, Serena sont directement responsables de la chute de Rome" "Nous soupçonnons, sans posséder la preuve, que le sac de 410 a été voulu et préparé par les fanatiques chrétiens qui se dissimulaient dans l'ombre d'Honorius.".

André Piganiol, le mémorial des Siècles, le sac de Rome, 1964. p99, p123, p200.

 

L'idée reste confuse dans l'esprit de certains historiens chrétiens.
"Tillemont intitule un de ses chapitres : Triomphe de Jésus - Christ dans le saccagement de Rome. A la vérité saint Augustinº et Orose citent un fait qui semble favorable à cette étrange opinion que le christianisme triompha dans la prise de Rome " [...] "Pendant que les chrétiens et les païens sont aux prises, les barbares arrivent sur la scène et terminent une lutte qui sans leur intervention se serait prolongée. " "La Providence réunit dans des régions sauvages les peuples qui viendront en Occident faire table rase, et débarrasser le christianisme de tous ces restes gênants d'une civilisation ennemie." "Les incertitudes du combat [entre chrétiens et païens] se seraient prolongées longtemps encore si la Providence n'avait enfin donné le signal aux barbares : ils franchissent les barrières de l'empire romain, et l'arrêt rendu contre la vieille société va être exécuté"
Arthur Beugnot


 Les chrétiens ont utilisés l'ennemi extérieur pour neutraliser l'ennemi intérieur.

 

- La sac de Rome. Suite à la politique d'Honorius en dessous de tout, les Wisigoths chrétiens mettent finalement Rome à sac en 410.

    Les contemporains sont fortement frappés par l'événement et accusent le christianisme. Des Chrétiens retournent même au paganisme. On trouve des échos de l'accusation païenne dans les sermons d'Augustin: "voilà ce que valent les temps chrétiens !" "C'est à l'époque chrétienne que Rome est saccagée et incendiée. " "Tous ces maux datent de l'époque chrétiennes, avant l'époque chrétienne comme nous regorgions de biens. Avant que cette doctrine ne fût prêchée de par le monde, le genre humain n'endurait pas tant de maux. C'est le fait de l'époque chrétienne [...] le monde est dévasté, il défaille"
Augustin, Sermon 296

    L'illustre Saint Augustin expliqua Alaric n'était entré à Rome que pour faire la guerre aux idôles; c'était l'instrument avec lequel Dieu châtiait les païens; quant aux chrétiens qui avaient souffert, c'est Dieu qui l'avait ainsi voulu!


    "ces hommes ingrats et blasphémateurs qui imputent au Christ les maux qu’ils souffrent [..] Ils savaient bien la retenir, cette langue, quand réfugiés dans nos lieux sacrés, ils devaient leur salut au nom de chrétiens; et maintenant, échappés au fer de l’ennemi, ils lancent contre le Christ la haine et la malédiction !" (Livre I, III)  
   
     Mais quelques hommes bons et chrétiens ont été mis à la torture, afin d'être forcés de livrer leurs biens à l'ennemi. [...] Livre I, chap X. Mais, ajoute-t-on, de nombreux chrétiens ont été massacrés et ont été mis à mort d'une affreuse variété de manières cruelles.[...] les chrétiens savent bien que la mort du pauvre pieux dont les chiens léchaient les plaies était bien meilleure que celle du méchant riche qui gisait en pourpre et en fin lin, quel mal ces morts terribles pouvaient-elles faire aux morts qui avaient bien vécu ? Livre I, chap XI
    "[les innocents] sont justement chatiés avec les méchants dans ce monde, bien que dans l'éternité ils échappent tout à fait au châtiment. [...] les bons sont châtiés avec les méchants, quand Dieu se plaît à punir temporellement les mœurs débauchées d'une communauté. Ils sont punis ensemble, non parce qu'ils ont mené une vie également corrompue, mais parce que les bons comme les méchants, quoique pas également avec eux, aiment cette vie présente [...] Livre I, chap IX.
    [...] ils croient porter une accusation décisive contre le christianisme, lorsqu'ils aggravent l'horreur de la captivité en ajoutant que non seulement les femmes et les jeunes filles célibataires, mais même les vierges consacrées, ont été violées. [.et tout ce qu'Augustin trouve à répondre c'est que..] cet acte qui ne pouvait pas être subie sans plaisir sensuel, doit être considérée comme ayant été commise aussi avec un certain assentiment de la volonté."[...] 
Livre I, chap XVI
    [face aux chrétiennes violées qui doutent] Demanderez-vous pourquoi il a été permis? qu’il vous suffise de savoir que la Providence, qui a créé le monde et qui le gouverne, est profonde en ses conseils; « impénétrables sont ses jugements et insondables ses voies ». Toutefois descendez au fond de votre conscience, et demandez-vous sincèrement si ces dons de pureté, de continence, de chasteté n’ont pas enflé votre orgueil, [...] Si vous n’avez pas consenti au mal, c’est qu’un secours d’en haut est venu fortifier la grâce divine que vous alliez perdre, et l’opprobre subi devant les hommes a remplacé pour vous cette gloire humaine que vous risquiez de trop aimer. [..] qu’elles ne se plaignent pas d’avoir souffert la brutalité des barbares qu’elles n’accusent point Dieu de l’avoir permise, qu’elles ne doutent point de sa providence. Livre I, chap XVIII
    j’ai encore quelque chose à répondre à ceux qui rejettent les malheurs de l’empire romain sur notre religion Livre I, chap XXXVI
    plusieurs vont attaquant notre religion avec une extrême insolence; et quand ils voient de nos jours quelque guerre se prolonger, ils s’écrient que si l’on servait les dieux comme autrefois, cette vertu romaine, autrefois si prompte, avec l’assistance de Mars et de Bellone, à terminer les guerres, les terminerait de même aujourd’hui.
Augustin, la citée de Dieu contre les païens



Destructions.

"Depuis que la campagne de Toscane et la voie Aurélienne, que la main des Goths a dévastées par le fer et par la flamme, n'ont plus d'habitations pour éloigner les forêts ; de ponts pour contenir les fleuves, la mer, malgré ses dangers, est une route plus sûre. [.. ] On ne peut plus reconnaître les constructions, ouvrage des siècles passés ; le temps a dévoré ces grandes murailles : l'enceinte est brisée çà et là, et il n'en reste que des vestiges ; les toits sont étendus sur le sol, ensevelis sous de vastes décombres." Rutilius en 417 de Rome à la Gaulle.

Scènes de désolation racontée par Salvien en Gaulle.


Les relations entre les Wisigoths et le pouvoir romain Christine Delaplace

 




PARTIE III

 

 

La chute de Rome causée par le christianisme ?

 

    C'était la conclusion d'Edward Gibbon (XVIIIe), historien du plus célèbre ouvrage sur la chute de l'empire Romain: Gibbon s'excuse de devoir donner sa conclusion (les réactions à son époque étaient hostiles): "Comme le principal objet de la religion est le bonheur d’une vie future, on peut remarquer sans surprise et sans scandale que l’introduction, ou au moins l’abus du christianisme, eut quelque influence sur le déclin et sur la chute de l’empire des Romains. » « La conversion de Constantin précipita la chute de l'empire » Gibbon, Observations Générales sur la chute de l’Empire romain dans l’Occident (Tome 7). (opinion de Bruno Dumézil sur Gibbon).

 

La guerre civile + arrivée des barbares est la cause de l'effondrement brutal en occident, ensuite la décadence morale produite par le christianisme induit une transformation plus lente, qui n'est pas responsable de l'effondrement brutal, mais plutôt d'un affaiblissement progressif qui va empêcher tout rebond pendant les siècles suivants.

   La guerre civile entre sectes chrétiennes: "La foi, le zèle, la curiosité et les passions plus mondaines de l’ambition et de l’envie, enflammaient les discordes théologiques. L’Église et l’État furent déchirés par des factions religieuses, dont les querelles étaient quelquefois sanglantes et toujours implacables. [...] une nouvelle espèce de tyrannie opprima le monde romain, et les sectes persécutées devinrent en secret ennemies de leur patrie." Gibbon, Observations Générales sur la chute de l’Empire romain dans l’Occident (Tome 7).

   "les donatistes regardèrent Genseric chrétien (Vandale qui envahit l'Afrique), mais opposé à la foi orthodoxe, comme un libérateur [...]. Le zèle actif ou l’appui d’une faction locale facilita la conquête de l’Afrique [...] les calamités de la guerre étaient augmentées par la férocité des Maures et par le fanatisme des donatistes." Gibbon, XXIII. (sur les donatistes voir notre page contre Jésus).    

    "L’abus du christianisme fit naître dans l’Empire romain de nouveaux sujets de tyrannie et de sédition. Les violences des factions religieuses rompirent tous les liens de la société civile ; et le citoyen obscur qui pouvait regarder avec indifférence la chute ou l’élévation des empereurs, imaginait et éprouvait que sa vie et sa fortune se trouvaient liées avec les intérêts du chef ecclésiastique qu’il avait choisi." "les querelles théologiques affligèrent l’empire" "un évêque arien pouvait satisfaire impunément les ressentiments envenimés de sa haine théologique" "Le simple récit des divisions intestines qui troublèrent la paix de l’Église et déshonorèrent son triomphe, confirmera la remarque d’un historien païen, et justifiera les plaintes d’un respectable évêque. L’expérience avait convaincu Ammien que les chrétiens, dans leurs mutuelles animosités, surpassaient en fureur les bêtes féroces que doit le plus redouter l’homme" Gibbon, Chap XXI
    Affrontement meurtrier entre les partisans de l’évêque Athanase et l’évêque George de Cappadoce. (La foule crie dans l’arène) : un dieu, un Christ, un évêque. » « (à Rome) Les partisans de l’évêque Felix furent inhumainement égorgés dans les rues, dans les places publiques, dans les bains, dans les églises même » Idem a Constantinople «  la première fois que le sang coula dans la nouvelle capitale, ce fut pour des démêlés ecclésiastiques et un grand nombre de citoyens des deux partis perdirent la vie dans des émeutes violentes et opiniâtres »

"Ils ont, dit-il, beaucoup de dieux qui sont tous faux, nous en avons un seul qui est le véritable ; or , ils restent unis et nous , nous ne pouvons pas supporter la concorde."
Augustin cité par Arthur Beugnot, Histoire de la destruction du paganisme

Note: La société a explosé à cause de la religion. L'argument souvent évoqué du christianisme comme unificateur de l'Empire est un préjugé d'ignorant. C'est le contraire qui s'est passé.

 
Le théologien dominicain Phillipe Hellen, spécialiste des pères de l'église et des invasions barbares, connaît bien l'accusation très grave portée par les païens contre les chrétiens qui accusaient le christianisme d'avoir démoli les racines de l'état et conduit à l'effondrement de l'Empire Romain.

 


  La guerre / Haine Chrétienne du paganisme. 


"[Les cultes] furent abolis et toutes les traditions anciennes négligées, ce qui fut cause de la décadence de l’empire, de l’invasion des Barbares, de la désolation des provinces, de ce changement si déplorable de la force de l’empire, qu’on ne peut seulement plus reconnaître le lieu où étaient autrefois les villes les plus célèbres. Le récit que nous ferons du détail des affaires découvrira plus clairement la vérité de ce que j’avance."
Zosime, IV

Note: Les anciens païens superstitieux ont vu dans la chute de Rome la vengeance des dieux abandonné en faveur du christianisme. Ce n'est évidement pas cette explication que nous défendons nous ici.

" Si le christianisme se fût contenté d'attaquer les croyances, les traditions ou la mythologie du polythéisme, il n'eût fait que reprendre l'oeuvre de plus d'un philosophe, et sans doute l'empire n'aurait pas ressenti une aussi vive commotion. Mais quand les Romains entendirent proclamer comme but d'une religion nouvelle la destruction de leurs moeurs, de leurs usages et de leurs lois ; quand ils reconnurent qu'on professait ouvertement le mépris de la sagesse des temps passés; quand ils apprirent que des hommes prétendaient faire dans le monde toutes choses nouvelles ; alors ils crurent la société menacée non seulement d'une réforme religieuse , mais d'une révolution politique , et ils vouèrent une haine implacable à ces esprits malfaisants qu’animait un funeste vertige , et qui , par leur audace, s'étaient eux-mêmes placés en dehors des lois ordinaires de l'humanité"
"
Arthur Beugnot, Histoire de la destruction du christianisme

 
« Le christianisme n'avait pas déclaré la guerre à la société romaine, mais il l'avait condamnée. Il attendait impatiemment la chute de la nouvelle Babylone, qui serait le premier épisode de la fin du monde. C'est pourquoi, avant l'avènement de Constantin, le chrétien faisait grève, fuyait les charges de l'État, refusait de se battre pour Rome. [...] Quand Rome traversa la crise suprême, les chrétiens, la voyant perdue, l'ont traitée de cité du diable et l'ont de nouveau trahie. La patrie romaine a beaucoup à se plaindre de ces mauvais citoyens. »
André Piganiol, L'Empire chrétien
note: une haine viscérale envers les Romains et leur état se fait jour dans l’apocalypse de saint Jean.


 





Affaiblissement militaire due aux guerres civiles: baisse de la discipline militaire et négligence des frontières sous les empereurs chrétiens.


     "On a blâmé, avec raison, Constantin d’une autre innovation qui corrompit la discipline militaire, et précipita la ruine de l’empire. [...] Les rivaux qui se disputaient l’empire du monde romain, avaient retiré la plupart des troupes destinées à la défense des frontières [...]. Quand la fin de cette guerre civile eut rendu inutiles les garnisons intérieures, l’empereur n’eut pas assez de sagesse ou de fermeté pour ramener la discipline sévère de Dioclétien" " La chaîne de fortifications que Dioclétien et ses collègues avaient tendue sur les bords des grands fleuves, cessa d’être entretenue avec le même soin et défendue avec la même vigilance. [...] quoique une suite de princes aient fait, chacun dans leur temps, tous leurs efforts pour recruter et ranimer les garnisons des frontières, jusqu’au dernier moment de sa dissolution, l’empire a beaucoup souffert de la blessure mortelle que lui avait faite l’imprudente faiblesse de Constantin." XVII. "les institutions partiales de Constantin anéantirent [le gouvernement militaire] et le monde romain devient la proie d'une multitude de Barbares » Gibbon, Observations Générales sur la chute de l’Empire romain dans l’Occident (Tome 7).



  Les Chrétiens et l'Armée

        Condamnations pour refus de service dans l'armée surtout au IIIe siècle. Le pacifisme n'est pas la première motivation, mais surtout un rejet de l'idolâtrie.  "Maximilien persista opiniâtrement à déclarer que sa conscience ne lui permettait pas embrasser la profession de soldat. …après avoir jeté son baudrier, son épée et les marques de sa dignité, s’écria hautement qu’il n’obéirait qu’à Jésus-Christ, roi éternel, et qu’il renoncerait pour jamais à des armes temporelles et au service d’un maître idolâtreGibbon
   
Le motif du rejet était surtout l'idolâtrie de l'empereur et le culte impérial. Une fois l'empereur devenu chrétien les défection sont moins nombreuses et plusieurs megalomartyrs qui attaquent le paganisme sont des militaires: Georges de Lydda, Artème d'Antioche, Polyeucte, Théodore Tiron, Mercure de Césarée, Martin de Tour,  et Contantin/Théodose. Depuis  314 l'église de Constantin veut des chrétiens dans l'armée. La violence pour la foi est une constante de la culture judéo chrétienne qui n'est pas un pacifiste envers les hérétiques, infidèles, incroyants. "L’Église chrétienne ayant été fondée par le sang, confirmée par le sang, accrue par le sang, ils continuent à en verser" Erasme, Eloge de la folie Depuis  314 l'église de Constantin veut des chrétiens dans l'armée. La violence pour la foi est une constante de la culture judéo chrétienne qui n'est pas un pacifiste envers les hérétiques, infiodèles, incroyants. "L’Église chrétienne ayant été fondée par le sang, confirmée par le sang, accrue par le sang, ils continuent à en verser" Erasme, Eloge de la folie


   

  Valens légifère contre  les moines qui refusent de servir dans l'armée  (CT. 12.1.63) en 376. Les moines de Nitrie refusèrent d'être enrôlés et furent battus à mort par la troupe armée (Socrate, 4, 21-23 – st jerome chron ann 377).



L’attention des empereurs abandonna les camps pour s’occuper des synodes ;

Vers 400 Synesios la politique militaire irresponsable du précédent empereur (Théodose) écrit: "permettre que les citoyens, exemptés, quand ils le demandent, du service militaire, désertent en foule, pour d’autres carrières, les rangs de l’armée, qu’est-ce donc, si ce n’est courir à notre perte?" Synesius, De la royauté


 Enfin, "L’infanterie quitte son armure" XXVII et le casque sous Gratien.




   L'accaparement des ressources de l'état (hommes + finances) par l'église . "Le clergé prêchait avec succès la doctrine de la patience et de la pusillanimité (l'absence de courage). Les vertus actives qui soutiennent la société étaient découragées, et les derniers débris de l’esprit militaire s’ensevelissaient dans les cloîtres. On consacrait sans scrupule aux usages de la charité ou de la dévotion, une grande partie des richesses du public et des particuliers ; et la paye des soldats était prodiguée à une multitude oisive des deux sexes, qui n’avait d’autres vertus que celles de l’abstinence et de la chasteté." Gibbon, Observations Générales sur la chute de l’Empire romain dans l’Occident (Tome 7). (Voir les mesures de l'empereur Majorien qui limite le monachisme 457-461. rappel des paroles d'Arbogaste. Exemple du moine Jovinien condamné en 393 pour avoir dénoncer les excès de la virginité).

    "saint Paulin cherche à détourner les chrétiens d'entrer dans le service militaire et même de se marier" Beugnot, Histoire de la destruction du paganisme


    "les monastères étaient remplis d’une foule de plébéiens obscurs et de la plus basse classe, qui trouvaient dans le cloître beaucoup plus qu’ils n’avaient sacrifié en se séparant du monde. Des paysans, des esclaves et des artisans trouvaient facile d’échapper à la pauvreté et au mépris en se réfugiant dans une profession tranquille et respectée, dont les peines apparentes étaient adoucies par l’habitude, par les applaudissements publics et par le relâchement secret de la discipline. Les sujets de Rome qui voyaient leur personne et leurs biens exposés à répondre du payement d’une taxe exorbitante et inégalement répartie, échappaient dans les cloîtres à la tyrannie du gouvernement, et une partie des jeunes hommes préférait les rigueurs de la vie monastique aux dangers du service militaire. Les différentes classes des timides habitants des provinces qui fuyaient à la vue des Barbares, y trouvaient une retraite et une subsistance ; des légions entières s’enterraient dans ces religieux asiles, et la même cause qui adoucissait le sort des particuliers, détruisait peu à peu les forces et les ressources de l’empire." GibbonXXXVII.

    « plusieurs de leurs prosélytes avaient vendu leurs terres et leurs maisons pour augmenter les fonds publics de la société, aux dépens, à la vérité, de leurs malheureux enfants, qui se trouvaient réduits à la mendicité, parce que leurs pères avaient été des saints. » Gibbon, XV. (Appauvrissement de l'état et enrichissement de l'église).


    "ils les persuadèrent de distribuer aux pauvres tous les biens. la substance et la possession qu'ils possédaient, et, entrant eux-mêmes dans un état de besoin, pour se rassembler en mendiant, passant d'une position de liberté à une demande inconvenante, et de la prospérité à un caractère pitoyable"

Porphyre, contre les chrétiens, fragments

 Note: L'influence pernicieuse de l'église et le coût de cette institution improductive pour les finances de l'empire romain fut également soulignée comme une cause d'affaiblissement par le célèbre historien Arnold Hugh Martin (A. H. M.) Jones en 1964.


  La théocratie. Ambroise de Milan est l'architecte de la théocratie. Ambroise ose écrire à Gratien qu'il doit "montrer respect en premier à l'église catholique et secondairement aux lois de l'état" (Ep10). "si on lit l'écriture on voit que ce sont les évêques qui jugent les empereurs" Ep 21 à Valentinien II. Théodose se prosterne à ses pieds et lui baise la main (humiliation jamais vue de l'empereur). Lorsque des moines chrétiens persécuteurs brûlent une synagogue, Théodose réclame la reconstruction mais Ambroise fait pression contre la décision de l'Empereur "en le menaçant de ne pas célébrer l’eucharistie tant qu’il n’aurait pas obtenu la promesse que non seulement toute poursuite serait abandonnée contre les chrétiens mais qu’on renoncerait à reconstruire la synagogue, Ambroise réussit à faire céder". Ambroise dicte sa conduite à Théodose grâce à cette affaire et au massacre de Thessalonique. Il fait basculer Rome en Théocratie. Sur KTOV, la réjouissance de passer en théocratie est présentée comme la soumission du pouvoir politique à une norme morale m'a laissé sans voix.
    Exemple de Théodose II "une honteuse superstition l’asservissait et la dégradait encore. Il jeûnait, chantait des psaumes, et croyait aveuglément aux miracles et aux préceptes qui nourrissaient sa crédulité. Dévotement attaché au culte des saints, soit morts, soit vivants, de l’Église catholique, l’empereur des Romains refusa une fois de manger, jusqu’à ce qu’un moine insolent, qui avait osé excommunier son souverain, eût daigné guérir cette blessure spirituelle."  Gibbon, XXXII.


Chantage chrétien. L’évêque Nestorius prononça à Constantinople en 428, s'adressant à l'empereur Théodose II : « Donne-moi, ô roi, une terre purgée des hérétiques, et je te donnerai le ciel en retour. Aide-moi à détruire les hérétiques, et je t'aiderai à vaincre les Perses » (Socrate le Scolastique, Histoire ecclésiastique, VII, XXIX, 5).


 Sur le long terme, la christianisation des esprits empêche tout rebond. La culture judéo-chrétienne transforma les hommes. "L'habitude de l'obéissance et de la crédulité détruisait la liberté de l'âme, source de tous les sentiments raisonnables ou généreux" "La crédulité [des moines] dégradait les facultés de leur esprit ; ils falsifiaient le témoignage de l’histoire, et les erreurs de la superstition éteignaient peu à peu les dangereuses lumières de la science et de la philosophie. La révélation divine vint à l’appui de tous les cultes religieux pratiqués par les saints, de toutes les doctrines mystérieuses qu’ils avaient adoptées, et le règne avilissant des moines acheva d’étouffer toute vertu noble et courageuse. S’il était possible de mesurer l’intervalle entre les écrits philosophiques de Cicéron et la légende de Théodoret, entre le caractère de Caton et celui de saint Siméon Stylite (un moine masochiste), nous apprécierions peut-être la révolution qu’éprouva l’Empire romain dans une période de cinq cents ans.Gibbon, XXXVII, p1093.


      En 1790, le révolutionnaire Louis Saint-Just poursuivait : « Les ravages de l'ignorance, après le Bas-Empire, furent incroyables ; on en doit accuser la tyrannie des moines, et leur vie stupide ; cette institution venue de l'épouvante des dogmes ébranla toutes les lois, et créa des vertus stoïques inutiles au monde [.] Le fanatisme est né de la domination des prêtres européens  »
L’esprit de la révolution et de la constitution de la France.

Avis des Lumières.

    Pour Voltaire, c'est "cette religion qui a détruit l’empire romain" (Le Dîner du comte de Boulainvilliers). "L’empire romain avait alors plus de moines que de soldats" "Le christianisme ouvrait le ciel, mais il perdait l’empire : car non seulement les sectes nées dans son sein se combattaient avec le délire des querelles théologiques, mais toutes combattaient encore l’ancienne religion de l’empire ; religion fausse, religion ridicule sans doute, mais sous laquelle Rome avait marché de victoire en victoire pendant dix siècles" "des déluges de barbares inondèrent de tous côtés [...]. Que faisaient cependant les empereurs ? ils assemblaient des conciles."
Voltaire, Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, Chap XI

"cette idée nouvelle d’un royaume de l’autre monde n’ayant pu jamais entrer dans la tête des payens, ils regarderent toujours les Chrétiens comme de vrais rebelles qui, sous une hypocrite soumission, ne cherchoient que le moment de se rendre indépendans & maitres, & d’usurper adroitement l’autorité qu’ils feignoient de respecter dans leur foiblesse. Telle fut la cause des persécutions.Ce que les payens avoient craint est arrivé ; alors tout a changé de face, les humbles Chrétiens ont changé de langage, & bientôt on a vu ce prétendu royaume de l’autre monde devenir sous un chef visible le plus violent despotisme dans celui-ci." "l’Etat cessa d’être un, & causa les divisions intestines qui n’ont jamais cessé d’agiter les peuples chrétiens" "quand la croix eut chassé l’aigle, toute la valeur romaine disparut"
Rousseau, contrat social, IV, VIII.

 

 

    Ernest Renan, qui est bien plus respectueux du christianisme qu'il considère comme la religion de l'humanité reconnaît pourtant lui aussi l'implication du christianisme dans la chute de Rome. Cette analyse n'est pas un point de vue d'ultra. C'est seulement point de vue est un minimum. Gibbon était chrétien éclairé de même que Renan, respectueux du christianisme, et qui ne s'est pas libéré des préjugés chrétiens contre les soi-disants insuffisances du paganisme.

  
    "Les stoïciens, maîtres de l’Empire, le réformèrent et présidèrent aux cent plus belles années de l’histoire de l’humanité. Les chrétiens, maîtres de l’Empire à partir de Constantin, achevèrent de le ruiner." 
(des stoïciens-épicuriens cf le divin pieux signe comme Epicure: soyeux heureux).Renan

    "à mesure que l’empire baisse, le christianisme s’élève. Durant le iiie siècle, le christianisme suce comme un vampire la société antique, soutire toutes ses forces et amène cet énervement général contre lequel luttent vainement les empereurs patriotes. Le christianisme n’a pas besoin d’attaquer de vive force ; il n’a qu’à se renfermer dans ses églises. Il se venge en ne servant pas l’État" "L’Église, au iiie siècle, en accaparant la vie, épuise la société civile, la saigne, y fait le vide. La vie antique, vie tout extérieure et virile, vie de gloire, d’héroïsme, de civisme, vie de forum, de théâtre, de gymnase, est vaincue par la vie juive, vie antimilitaire, amie de l’ombre, vie de gens pâles, claquemurés." chap XXXII

   "Un grand danger résultait pour l’avenir de cette morale exaltée, exprimée dans un langage hyperbolique et d’une effrayante énergie. À force de détacher l’homme de la terre, on brisait la vie. Le chrétien sera loué d’être mauvais fils, mauvais patriote, si c’est pour le Christ qu’il résiste à son père et combat sa patrie. La cité antique, la république, mère de tous, l’État, loi commune de tous, sont constitués en hostilité avec le royaume de Dieu. Un germe fatal de théocratie est introduit dans le monde.. "  "L’empire était certes plus loin encore de soupçonner que son futur destructeur était né [Jésus]" "l’idée jetée par Jésus dans le monde fut, avec l’invasion des Germains, la cause de dissolution la plus active pour l’œuvre des Césars."

    "la société romaine sentait instinctivement qu’elle s’affaiblissait ; elle n’entrevoyait que vaguement les causes de cet affaiblissement ; elle s’en prenait, non sans quelque raison, au christianisme." chap IV "Ce n'est pas sans raison qu'on les détestait [...] Ils démolissaient vraiment l'Empire romain. Ils buvaient sa force. Ils enlevaient à ses fonctions, à l'armée surtout, les sujets d'élite. [...] L'Empire romain sentait au fond que cette république secrète le tuerait" Chap XXIII   
 " Les chrétiens désiraient, au fond, que tout allât pour le plus mal. Loin de faire cause commune avec les bons citoyens et de chercher à conjurer les dangers de la patrie, les chrétiens en triomphaient. Les montanistes, la Phrygie tout entière, allaient jusqu’à la folie dans leurs haineuses prophéties contre l’empire. On pouvait se croire revenu aux temps de la grande Apocalypse de 69. Ces sortes de prophéties étaient un crime prévu par la loi chap IV " "Montanus, comme tous les prophètes de l’alliance nouvelle, était plein de malédictions contre le siècle et contre l’empire romain. Même le voyant de 69 était dépassé. Jamais la haine du monde et le désir de voir s’anéantir la société païenne n’avaient été exprimés avec une aussi naïve furie." chap XIII ""
    "au point de vue militaire et patriotique, [le christianisme] détruisit le monde ancien" "La patrie et les lois civiles, voilà la mère, voilà le père, que le vrai gnostique, selon Clément d’Alexandrie, doit mépriser pour s’asseoir à la droite de Dieu." "Le chrétien ne se réjouit pas des victoires de l’empire ; les désastres publics lui paraissent une confirmation des prophéties qui condamnent le monde à périr par les barbares et par le feu. Le cosmopolitisme des stoïciens avait bien aussi ses dangers ; mais un ardent amour de la civilisation et de la culture grecque servait de contrepoids aux excès de leur détachement." "en se faisant chrétien, on quittait l’armée. « On ne sert pas deux maîtres », était le principe sans cesse répété." " « C’est assez combattre pour l’empereur que de prier pour lui » (réponse d'Origène, Contre Celse, VIII, 73.). Le grand affaiblissement qui se remarque dans l’armée romaine [...] a sa cause dans le christianisme. Celse aperçut ici le vrai avec une merveilleuse sagacité." chap XXXII
    "l’Orient chrétien a perdu toute valeur militaire. L’islam en a profité" "[au Ve siècle] La Syrie et principalement l’Égypte devinrent des pays tout ecclésiastiques et tout monastiques. L’église et le monastère, c’est-à-dire les deux formes de la communauté, y furent seuls riches. La conquête arabe, se précipitant sur ces pays, après quelques batailles à la frontière, ne trouva plus qu’un troupeau à conduire. Une fois la liberté du culte assurée, les chrétiens d’Orient se soumirent à toutes les tyrannies." 
chap XXXII
    " [Le christianisme] tua plus lentement la richesse ; mais, à cet égard, son action n’a pas été moins décisive. Le christianisme fut, avant tout, une immense révolution économique." "L’avarice était pour l’Église primitive le crime suprême. Or, le plus souvent, l’avarice, c’était la simple épargne." "Le riche devait se faire pardonner sa fortune, comme une dérogation à l’esprit du christianisme. En droit, le royaume de Dieu lui était fermé, à moins qu’il ne purifiât sa richesse par l’aumône ou ne l’expiât par le martyre." "la vie humaine est suspendue pour mille ans. La grande industrie devient impossible ; par suite des fausses idées répandues sur l’usure, toute opération de banque, d’assurance, est frappée d’interdiction. Le juif seul peut manier l’argent; on le force à être riche ; puis on lui fait un reproche de cette fortune à laquelle on l’a condamné." "La funeste terreur répandue sur toute la société du moyen âge par le prétendu crime d’usure fut l’obstacle qui s’opposa, durant plus de dix siècles, au progrès de la civilisation." 
chap XXXII

Ernest Renan, Marc-aurèle ou la fin du monde antique






 


le discours de Maurice Allard à l'assemblée nationale en 1905 (extrait du film "la séparation").




Pour Nietzsche, l'inversion des valeurs par le christianisme fut la véritable cause de la chute Rome.

   

 "Le christianisme a été le plus grand malheur que l’humanité ait connue jusqu’à présent" (l’Antéchrist, 51) "C’est cela qui se rendit maître de Rome. La même espèce de religion dont Epicure avait déjà violement combattu les formes embryonnaires. Il faut lire Lucrèce pour comprendre ce que combattait Epicure, c'est-à-dire non pas le paganisme, mais le christianisme… et Epicure aurait vaincu car dans l’empire romain tout esprit respectable était épicurien." (l’Antéchrist, 58). "Tout le travail du monde antique… en pure perte ! Je ne trouve pas de mots pour exprimer le sentiment que m’inspire cette monstruosité " "A quoi bon les Grecs, à quoi bon les Romains? — Toutes les conditions premières pour une civilisation savante, toutes les méthodes scientifiques étaient déjà là, on avait déjà fixé les règles du grand art, l'incomparable art de bien lire, — cette condition nécessaire pour la tradition de la civilisation, pour l'unité des sciences ; les sciences naturelles liées aux mathématiques et à la mécanique se trouvaient sur le meilleur chemin, ! [...] Ce qu'aujourd'hui nous avons regagné avec une indicible victoire sur nous-mêmes — car nous avons tous encore dans le corps les mauvais instincts, les instincts chrétiens — le regard libre devant la réalité, la main circonspecte, la patience et le sérieux dans les plus petites choses, toute la probité dans la recherche de la connaissance — tout cela existait déjà il y a plus de deux mille ans. Et plus encore, le bon goût, le tact fin et sûr! Non point comme un « dressage » du cerveau, non point comme la culture « allemande », avec des manières de lourdaud! Mais comme corps, comme geste, comme instinct - comme réalité en un mot. . . Tout cela en vain! Plus qu'un souvenir du jour au lendemain! — Grecs! Romains! La noblesse de l’instinct, le goût, la recherche méthodique, le génie de l’organisation et de l’administration, la foi, la volonté d’un avenir humain, le grand « oui » à tout, tout cela visible et perceptible à tous les sens, le grand style, non plus seulement en art, mais devenu réalité, vérité, vie… Et cela, non pas réduit en cendres, instantanément, par un cataclysme naturel! Non pas foulé aux pieds par des Germains et d’autres pédestres balourds! Mais mis à mal par de rusés, de furtifs, d’invisibles et d’anémiques vampires! Non pas vaincu — seulement vidé de son sang!… Maîtres de la place, le désir rentré de vengeance, la mesquine envie!… Voir d’un seul coup tout ce qui est piteux, mal dans sa peau, hanté-de-mauvaises-pensées, bref tout le ghetto de l’âme, prendre le dessus!" Nietzsche, l’Antéchrist, 59.


 




Le christianisme est bien la cause principale de la chute de Rome

   La menace barbare n'était pas nouvelle. Depuis des siècles, cette menace était largement contenue. Les épisodes du IVe siècle avant JC (Brennus et la Bataille de l'Allia 15 à 40 000 pertes romaines) et du IIe siècle (la Guerre des Cimbres 110 000 morts romains, très supérieurs à la célèbre bataille de Cannes 50 000 contre Hannibal) montrent que de graves invasions avaient déjà eu lieu pendant l'époque de la République et avait été surmontée. Sauf qu'au Ve siècle quelque chose a changé et Rome ne sait plus y faire face. Donc ce n'est pas une Rome florissante qui s'effondre au Ve siècle en raison d'une cause externe que serait la puissance magnifique des barbares, mais une Rome décadente qui se fait écraser en raison de sa faiblesse interne. 

 

    La population barbare (soldats + non combattants) qui entrent dans l'empire représente 3-4% de la population totale de l'empire romain, alors même que les frontières ne sont plus défendues à ce moment-là (abandonnées). Donc la pression due aux huns n'était pas si grande que cela. Ce n'est pas en soi une vague incontrôlable qui déferle, sauf si Rome est complètement paralysée et désorganisée (comme l'a déjà montré l'épisode du IIIe siècle).  Les barbares ont seulement violement accéléré la chute d'une Rome décadente qui aurait sinon dégénéré plus lentement. Ils sont donc le catalyseur de la chute brutale de l'occident, mais pas la VRAIE cause de la chute de Rome. La vraie cause est interne à Rome.
     La mauvaise gouvernance corruption et crise économique dans l'empire n'empêche pas de construire plein d'églises au Ve siècle, et de payer des tributs aux barbares et à l'orient, épargné des invasions, de rester relativement florissant encore 150 ans. La crise économique et démographique n'explique pas un tel effondrement militaire du Ve siècle en occident. La cause de cet effondrement est politico-religieuse.

 

On conclut donc que le christianisme est la cause principale car
-     Sans le christianisme, les barbares du Ve siècle ne prenaient pas Rome.
-     Avec le christianisme (mais sans les barbares) on aurait eu un déclin plus lent, mais un effondrement quand même. Le christianisme est donc bien la VRAIE cause profonde du déclin de l'occident et ultimement de sa chute (de la même façon que le recul du christianisme dans les élites à partir de la renaissance sera la cause qui permettra la remontée en puissance de l'occident).


    On m'objectera que le christianisme ne permet pas d'expliquer tout. Certes mais la thèse de Gibbon intègre ces autres causes; et maintenant si je dis que l’idéologie nazi est la cause principale de la seconde guerre mondiale, cela ne permet pas de comprendre tout non plus de ce qui se passe entre 1939 et 1945. La causalité des événements est toujours multifactorielle (idéologique, économique, géographique, humaine...). Donc ce n'est pas parce qu'il a à chaque fois d'autres causes que le christianisme que le christianisme n'est pas la cause de fond principale.

    Lorsqu'on m'oppose que la cause principale de la chute de l'empire Romain au Ve siècle reste les barbares, je réponds oui... des barbares convertis au christianisme ! (des ariens qui deviendront ensuite nicéens). Si Rome avait été conquise par des païens germaniques porteur d'un néostoïcisme ou à un néoépicurisme (Arbogaste éclairé ?), il y aurait eu continuité civilisationnelle. La civilisation gréco-romaine aurait perduré même si l'empereur romain était ensuite devenu un grand blond et que la capitale avait été déplacée plus au nord, comme ce fut le cas lorsque Rome pris le contrôle de la Grèce. C'est donc bien le christianisme qui est la cause profonde de la disparition de cette civilisation et des "dark ages". Les barbares ont abandonné leur paganisme pour se convertir en masse au christianisme, l'alliance naturelle de Thor et de Jupiter contre Jésus devenant alors impossible Jésus est désormais libre de détruire Jupiter dans le sud avant de s'occuper de Thor dans le nord.   
   

    Il est aussi important de préciser que c'est un christianisme fanatique qui prend le pouvoir dans l'antiquité et pas une version plus humaniste qui existait pourtant déjà (Pelage), et qui pouvait essayer de s'accorder avec la philosophie grec au lieu de simplement vouloir la détruire, ce qui réémergera au milieu du moyen-âge et permettra la renaissance.
   
 " Dans tous les conciles, c’est le dogme le plus superstitieux qui l’emporte. [une version plus raisonnable de christianisme] est étouffé par la grossièreté d’un clergé qui veut l’absurde." Renan, chap XXXIV.
    Contrairement donc à la plupart des historiens modernes qui nient la responsabilité évidente du fanatisme chrétien dans ce désastre et rejettent la conclusion de Gibbon, pour ma part, je rejoins donc la position classique de Gibbon ou aujourd'hui de Ramsay Macmullen (Christianisme et paganisme. Chapitre 3) qui insistent sur la responsabilité de toute la superstition (incluant donc Platon et le néoplatonisme). Le dégoût des sacrifices sanglants et la superstition païenne a légitimé l'irrationalisme chrétien qui a su l'exploiter dans ses défenses et apologies et ceci a empêché le lancement d'une contre-offensive qui aurait été bien plus efficace et moins criminelle que les persécutions. La tragédie c'est donc la disparition de l'épicurisme au IIIe siècle.
    Outre donc la question du sac de Rome ou même la chute de l'occident, plus généralement la disparition de la civilisation gréco-romaine classique fut d'abord causée par une montée générale de l'irrationalité chez les païens au IIIe siècle, dont le christianisme ne fut ensuite que l'aboutissement ultime. Le reniement de la "Raison grecque" (expression de Celse) et des Lumières antiques qui avaient soutenues le génie gréco-romain détruisirent cette civilisation de l'intérieur (y compris dans l'empire d'Orient également décadent).
    Ma conclusion sur l'empire romain ne devrait pas paraître si choquante ni originale. Elle n'est que l'application au cas romain de ce que l'on admet pour d'autres cas similaire. La destruction de la rationalité est le facteur clef généralement retenu pour expliquer la fin de l'âge d'or de la civilisation arabo-musulmane (VIII-XIIe siècles) qui s'effondre au XIIe siècle lorsqu'elle renie la science sous l'influence de théologiens obscurantistes comme Algazel. Inversement, on admet généralement que les progrès de l'Occident lors de la Renaissance et des Lumières s'expliquent principalement par un retour de la rationalité (scientifique, philosophique, éthique, politique...).

Note: Dans des temps encore plus anciens, la réforme religieuse de Nabonidus précipite la chute de la civilisation mesoppo-akkadienne. Le rôle des religions dans l'histoire est énorme.


    Le cas de l'empire d'Orient. Contre la thèse chrétienne, un des principal argument est la survie de l'empire d'Orient, mais en fait celui-ci frôle de très près plusieurs fois la destruction (par les Goths, puis par les Arabes) et est incapable d'empêcher le pillage d'Athènes et de la Grèce, même s'il survit pour diverses raisons circonstancielles (fortifications de Constantinople, avantages géographiques face aux invasions du Ve siècle, rapatriement de l'or à Constantinople, récupération des talents d'Occident qui s'effondre en premier, pression barbare Ostrogoth détournée vers l'Italie à conquérir...).  Pour Gibbon il "subsista mille cinquante-huit ans dans un état de décadence perpétuelle" (Gibbon, XXXII). Après quelques tentatives éphémères de reconquête de l'Occident dévasté, l'empire de l'est se réduira à la ville de Constantinople et ses alentours. Enfin, la culture gréco-romaine décline elle-aussi rapidement dans empire d'Orient sous le poids de l'obscurantisme religieux. En 528, Justinien ferme la dernière école philosophique néoplatonicienne d'Athènes (les autres écoles ayant déjà été détruites au IVe siècle) et condamne désormais à mort les apostats. La pratique du paganisme n'est pas seulement interdite, désormais le fait même d'avoir des convictions païennes est passible de la peine capitale (plus de liberté de conscience). Ceux qui recopient les écrits païens ont la main tranchée. (Ramsay Macmullen. Christianisme et paganisme. Chapitre 1). En 582 Athènes est mise à sac et conquise par les slaves. En 611 les perses prennent Antioche (en Turquie). 636-646 les arabes prennent le levant et l'Egypte. Les arables font le blocus de Constantinople 674-678 et 716-718. Les byzantins ne sont pas l'empire romain d'orient. Ils ne sont plus la grande puissance de la région. Conscient de leur impuissance, ils cherchent la source de leurs échecs dans la religion (de 726 à 843, période iconoclaste). Enfin pendant que les turcs assiégeaient Constantinople en 1453, les byzantins discutaient du sexe des anges.

 


 

L'idée que la chute de Rome soit liée au christianisme a récemment été contestée par:


-Michel De Jaeghere
 (droite catholique):  Le christianisme a-t-il provoqué la chute de Rome ? (à partir de 42:30)

-Claire Sotinel (gauche postmoderne / relativisme).
  Les chrétiens sont-ils responsables - lhistoire.fr

Les anti-Gibbon sont très mauvais. Ils caricaturent la thèse de Gibbon et répondent en effet à côté. Gibbon n'accuse pas les chrétiens d'être des pacifistes incapables d'affronter des ennemis (les chrétiens tuent défendre pour leur religion), mais d'avoir provoqué une guerre civile qui a détruit la société de l'intérieur. Les chrétiens ne sont pas accusés de vouloir détruire l'empire mais de vouloir détruire le paganisme antique et la culture gréco-romaine qui soutenait l'empire et dont l'interdiction a provoqué la mort de cette civilisation.

 

Les principaux arguments des historiens anti-Gibbon auquel nous nous proposons de répondre ici, sont:

- Gibbon, c’est juste le parti pris anti-chrétien des Lumières.
- Pas de lien de causalité entre christianisation et chute: les dates c’est juste une coïncidence.
- Le christianisme favorisait l'unité de l'Empire.
- Les chrétiens servent dans l’armée après 314 et les empereurs chrétiens combattent.
- L’Empire Romain d’Orient / Byzantin (très chrétien) survie 1000 ans de plus (1453).
- Le paganisme était mort. La transition entre paganisme et christianisme s’est faite en douceur.
- Il n’y a pas eu de vraie réaction païenne: c’est un mythe romantique.
- La législation antipaïenne n’a pas vraiment été appliquée.
- La liberté de conscience existait à cette époque: pas de persécutions, ni de conversion forcée.
- Les destructions de temple sont un phénomène marginal, et elles concernent l’Orient pas l’Occident.
- Le monachisme est un phénomène seulement balbutiant en Occident au moment de la chute.





La terreur des moines et de l'église pour imposer le Moyen-Age chrétien

 

La dissimulation de la vérité historique concernant l'instauration brutale de la religion chrétienne (et non par une adhésion comme se l’imaginent les croyants) est la raison principale de la non compréhension de la chute de Rome. Les historiens anti-Gibbon, généralement pro-chrétiens contestent le fait que christianisme se soit imposé brutalement. On va voir ce que dit l'archéologie.

(le remplacement d'une religion-culture millénaire par une secte qui était méprisée et interdite en seulement 70 ans c'est un bouleversement majeure qui ne peut pas être négligé comme cause non contributive).

 

 

    -> A la fin IVe siècle en orient

 "dans presque toutes les provinces du monde romain, une armée de fanatiques, sans discipline comme sans autorité, assaillaient les paisibles habitants, et les ruines des plus beaux monuments de l’antiquité attestent encore les ravages de ces barbares, qui avaient seuls le loisir et la volonté d’exécuter des destructions si pénibles. [...]
    En Syrie, l’excellent, le divin évêque Marcellus, ainsi que l’appelle Théodoret, animé d’un zèle apostolique, résolut de raser tous les temples du diocèse d’Apamée. Marcellus [..] attaqua successivement les temples répandus dans les villages et dans les campagnes [...] des paysans en fureur le surprirent et le massacrèrent, et le synode de la province prononça sans hésiter que le pieux Marcellus avait sacrifié sa vie au service de la foi." 
(Gibbon, chap XXVIII).

« Marcellus d’Apamée, à l’origine en 386, de la destruction du grand temple local de Zeus : se lançant alors dans une série de destructions dans les campagnes avoisinantes, il est finalement tué par une foule vengeresse en voulant s’attaquer une fois encore à un temple de la Bekaa, au sud d’Apamée. Il n’est alors rien de moins que capturé et brûlé vif, et ses enfants, réclamant justice au nom de leur père, se verront déboutés pour une question de paix civile. On argua alors d’une certaine dignité de mourir pour le Seigneur, et les enfants du défunt en furent quittes pour leurs frais. »
JUSTINE CUDORGE La_destruction_des_sanctuaires_paiens


Vers 400, Porphyre de Gaza ordonne des destructions de temples (Marc le diacre).

 
En 420 Le tribun Ursus profita de cette occasion pour faire raser les temples qui existaient Prospera encore à Carthage et particulièrement celui de Céleste

- préfet Cynegius Maternus

Tout cela n'est pas juste le point de vue païen, on a vu que Ambroise de Milan reconnaît la violence destructive des moines (lettre XLI).

 
"Mais ces gens vêtus de noir (les moines), [...] cours aux temples, apportant avec eux du bois, des pierres et du fer,[...] les toits sont découverts, les murs sont abattus, les images sont emportées et les autels sont renversés : les prêtre (païens) doivent toujours se taire sous peine de mort."« [les moines] se sont répandus sur le pays comme des torrents, dévastant les pays avec les temples : car partout où ils démolissent le temple d'un pays, en même temps, le pays lui-même est aveuglé, décline et meurt." "ceux qui oppriment les habitants : et dépouillant ces misérables de leurs biens et de ce qu'ils avaient amassé des fruits de la terre pour leur subsistance, ils s'en vont comme avec le butin de ceux qu'ils ont conquis."
Libanius, Oraison 30 : Pour les temples (Pro templis) - discours prononcé devant Théodose qui ne changea pas sa politique


- la statue d'Athéna au Parthénon est retirée au Ve siècle (Marinus de neapolis. Vie de Proclus, 30)

 

    -> Destructions en occident
Vers 370 "Saint Martin, évêque de Tours, parcourait la Gaule à la tête de ses moines, et détruisait les idoles, les temples et les arbres consacrés, dans toute l’étendue de son vaste diocèse" (Gibbon, chap XXVIII). ("Dans un bourg se trouvait un temple fort ancien, auquel il avait mis le feu" Vie de saint Martin, XIV)

 

Entre 370 et 380, une secte d'abstinents parait en Espagne, et en Aquitaine. Ils voudraient imposer à tout le clergé la rigueur monastique. (voir Priscillien)

 

En 397 dans le nord de l'Italie (dans le val di non) les missionnaires venus d'Orient envoyés par Vigile de Trente (Sisinnius, Martory et Alexandre)  sont mis à mort par la foule avec la tolérance/complicité des autorité locales, puis Vigile est lui-même lynché à mort vers 400 en Suisse après avoir renversé une statue de Saturne (dans la vallée de Randea).

 
« Un grand nombre d'édifices païens étaient tombés sous le marteau, en Gaule et en Afrique, et le fameux sanctuaire de Vénus Céleste, antique orgueil de Carthage, pris en quelque sorte d'assaut par l'évêque de la ville, venait d'être transformé en église. Pour mettre à l'abri les objets de leur culte, les païens de leur côté construisaient des cachettes dans leurs maisons ou au fond de leurs jardins »
Amédée Thierry. Revue des deux mondes. Trois Ministres de l’empire romain sous les fils de Théodose.

"la destruction des idoles, des autels, des bois sacrés et des temples, l’abolition des sacrifices; en un mot que tous ces événements, dont nous sommes aujourd’hui témoins, ont été depuis longtemps prédits" (IV) [Thédosoe] "Il fit abattre partout les idoles"

Augustin cité de dieu

"Les fouilles mettent au jour nombre de statues et d'éléments architecturaux méthodiquement détruits dans les sanctuaires, la plupart en Gaulle" Ramsay Macmullen. Christianisme et paganisme. Chapitre 2, note 124).


Le temple gallo-romain de la forêt d'Halatte (Oise) abandonné au début du Ve siècle. Statues mutilées. 
Le temple gallo-romain de la forêt d'Halatte (commune d'Ognon, Oise). Nouvelle interprétation du site à la suite des fouilles de 1996 à 1999. Marc Durand. [article]

Destruction du  sanctuaire d'Intaranum (entrains sur nohain Bourgogne). L'évéque saint pelerin d'auxerre avait promis de saccager le site entier

John Pollini, The archaeology of destruction: Christians, images of classical antiquity, and some problems of interpretation

Hisoire des saints Cassius et Castus

- Destruction violente des temples de Mithra en Gaulle et à Rome: Le commandement militaire vénère Mithra (défections ?) 

The Decline and Fall of the Mithraea of Rome.Feyo L. Schuddeboom


     « Des statues de Mithra ont ainsi été retrouvées avec le visage martelé (à Angers). Le temple de Mithra de Bordeaux a été saccagé et détruit à la fin du IVe siècle ; toutes les statues ont été retrouvées brisées »  « Des fouilles archéologiques révélant l'existence de temples de Mithra ont montré que ces édifices avaient fait l'objet d'entreprises de destruction volontaires de la part des chrétiens, pour qui le culte de Mithra - religion monothéiste - faisait concurrence au christianisme. » « Les monnaies retrouvées dans plusieurs sanctuaires [et permettant de les dater] indiquent que leur destruction parfois violente se situe à l'extrême fin du IVe siècle . La relative rareté et le mauvais état de conservation des vestiges sont ainsi imputables à des opérations de dégradation consécutives au décret de l'empereur Théodose. » 

Sur le mithraum d'AngersIdem à Bordeau et en Corse, à Mariana

"Le mithraum d'Angers, par exemple, a été saccagé par un groupe venu briser le bas-relief . Le même scénario est envisageable à Mariana, puisque le bas-relief a aussi été brisé avant que le temple ne soit détruit et comblé." François Savatier, Pour la science 09 mars 2017

Idem sur le Rhin: Mackwiller, Sarrebourg, et Biesheim. Kern E. Le mithraeum de Biesheim-Kunheim (Haut-Rhin). In: Revue du Nord, tome 73, n°292,1991. Archéologie. pp. 59-65;
"on a pu observer dans les autres mithraea de la région des traces de destruction violente avec — en particulier à Mackwiller5 et à Sarrebourg6"




    -> Persécutions des païens


Squelette décapité, enchaîné et retrouvé dans le temple de Mithra de Sarreboug, vraisemblablement le prêtre païen qui a été emmuré vivant. (Franz Cumont).

Profanation des temples avec le cadavre des prêtre païens exécutés  ("Il était persuadé que le voisinage des cadavres détournait les dieux d 'exercer ici- bas leur action bienfaisante" Labriolle)

"les prêtres (païens) doivent toujours se taire sous peine de mort."
Libanius, Oraison 30 : Pour les temples (Pro templis)

Shenoute and his zealous followers not only destroyed images of the gods in Upper Egypt, but also killed 
polytheistic priests.
 Shenoute is reported to have said that “there is no crime for those who have Christ"

Idem Anathase persécute les païens et les hérétiques, Piganiol le décrit ensuite comme un être violent, «d'une haine sans mesure», qui «n'hésitait pas à déchaîner contre ses ennemis des pogroms meurtriers» (...) «Partout sur son passage, il fera surgir la haine et la guerre». Sa politique religieuse est jugée «mesquine et méchante»10. L'historien américain T.D. Barnes, reprenant à son compte l'image imposée par Schwartz quelque soixante-dix ans plus tôt du politicien sans scrupule, fait de l'évêque rien moins qu'«un gangster» à latête d'une «mafia ecclésiastique»" Athanase d’Alexandrie et l’Église d’Égypte au IVe siècle (328-373) Annick Martin.


"On faisait la guerre aux temples, dans les villes et à la campagne. Il y avait du danger à croire qu’il y a des dieux et à lever les yeux au ciel pour les adorer."
Zosime , IV
idem dans le code théodosien: "que personne n'aille dans les temples, ne regarde les temples et ne lève les yeux sur les images formées par les œuvres mortelles, de peur qu'il ne soit rendu coupable des sanctions divines et humaines" "que personne ne fasse le tour des temples, que personne ne lève les yeux vers les temples." CT 16.X.10 & 11


Il mentionne donc bien des persécutions antipaïennes contrairement aux affirmations de Paul Veyne, Maraval, M. De Jaeghere... De plus les textes de Zosime et Eunape ont été expurgé par les copistes. Il y a des coupures dans les manuscripts !

 

"sous les empereurs chrétiens il est dangereux de regarder les astres" (la nuit) + il faut baisser les yeux en passant devant les temples)
André Piganiol, empire chrétien, p261 (Mamertinus, XI, 23 et autres exemples donnés par Benjamin Gras, la destruction du paganisme, tome I, p 83/84)

 

La censure: "Au moment où je publiais les trois premiers, et quand ils étaient déjà entre (116) les mains de tout le monde, j’appris qu’on y préparait une réponse, et depuis j’ai été informé qu’elle était prête, mais qu’on attendait l’occasion de pouvoir la faire paraître sans danger."[..] Si donc il y a quelqu’un de nos adversaires qui s’estime heureux d’avoir la liberté de médire, nous pouvons l’assurer qu’il sera plus heureux d’en être privé".
Augustin, cité de dieu

 

"ils introduisirent dans les lieux sacrés de ces gens appelés moines qui, tout en ayant la forme humaine, menaient la vie, des animaux et se livraient ouvertement à toutes sortes d'excès que je n'oserais rapporter. Mais, en revanche, ils regardaient comme un acte de piété de profaner les choses divines. A cette époque, du reste, tout homme affublé d'une robe noire, et qui ne craignait pas d'affecter en public un maintien peu décent, avait permission d'exercer une autorité tyrannique.
C'est à ce haut point de vertu que l'humanité en était arrivée. Mais j'ai déjà parlé de ces gens-là dans mon Histoire générale.
Ces moines furent donc établis à Canope et là, ils substituèrent à des divinités accessibles à l'intelligence un culte d'esclaves, et encore d'esclaves méprisables, auquel ils soumirent les hommes. Recueillant, en effet, les ossements et les têtes des misérables que leurs nombreux crimes avaient fait condamner par la justice de la cité, ils les présentaient comme des dieux, se roulaient convulsivement sur ces restes immondes, et s'imaginaient que le contact impur de ces sépulcres les rendaient meilleurs. On les appelait martyrs, diacres, arbitres des prières auprès de la Divinité, quand ils n'avaient été que des esclaves infidèles, sans cesse roués de cous de fouet, et portant sur leur corps les marques infamantes que leur avait values leur perversité. Et la terre souffre de pareils Dieux !
Eunape, vie de philosophes et de sophistes, Antonin

 

En 415, la philosophe Hypathie est assassinée par des chrétiens à Alexandrie (Gibbon, chap XXVIII). (voir le film Agora).


Persécution des païens en 561 en orient "ils subirent eux-mêmes le supplice réservé aux crimes ignominieux, c'est- à - dire qu'après leur avoir coupé les pieds et les mains, on les promena nus et sur des chameaux à travers les rues de la ville"
Arthur Beugnot, Histoire le la destruction du paganisme

 

"Il est certain qu’en ces premiers temps que notre religion commença de gagner autorité avec les lois, le zèle arma plusieurs contre toute sorte de livres païens, de quoi les gens de lettres souffrent une merveilleuse perte. J’estime que ce désordre ait plus porté de nuisance aux lettres que tous les feux des barbares."
Montaigne, essais, II, XIX

Montaigne dit aussi que Julien, « très grand homme et rare » , est présenté comme l’incarnation même de la vertu antique, de cette vertu que le monde moderne semble incapable de pouvoir imiter. Les chapitres de Gibbon sur l'empereur Julien sont à mon avis les plus beaux du livre et je vous invite à les découvrir en priorité.

"Si les premiers chrétiens avaient pu écrire dans une langue différente, on ne saurait douter, en voyant tout ce qu’ils ont détruit, qu’il n’existerait plus aucun souvenir des événements passés. Lorsqu’on lit les moyens employés par saint Grégoire et par les autres chefs de la religion chrétienne, on est frappé de l’acharnement avec lequel ils poursuivirent tout ce qui pouvait rappeler la mémoire de l’antiquité ; brûlant les écrits des poètes et des historiens, renversant les statues, et mutilant tout ce qui portait la marque des anciens temps."
Machiavel, Discours...


 

    -> Réactions païennes

 
Que cette religion de fanatique honnie de tous les païens soit passée du statut de culte interdit, méprisé et persécuté à celui de seule religion autorisée en seulement 70 ans (325-395), voilà un séisme d'une violence inouie pour les esprits et la société. C'est l'événement majeur qui écrase tous les autres (économiques, sociaux, démographiques....).

-  révolte païenne à Petra et Aréopolis qui permettra de sauvegarder le site (Sozomène)

 

En 398 , saint Augustin traçait ainsi aux chrétiens leur ligne de con duite (t. X, p. 10 d .) : « L'Écriture dit : Détruisez leurs autels , leurs bois sacrés et leurs livres.  Saint Augustin , parlant des temples de l'Afrique, dit ? : « Voyez dans quel état sont les temples des idoles : les uns a sont détruits, les autres languissent sans réparations; ceux-ci sont fermés, ceux-là ont reçu une nouvelle destination. Quant aux idoles et aux puissances de ce siècle , on les détruit , on les brise , on les brûle ou « bien on les cache. » Cela était vrai en général les moines n'éprouvaient plus d'entraves dans leurs tumultueuses expéditions contre les édifices de l'ancien culte , et en beaucoup d'endroits des dédicaces chrétiennes recouvraient les anciennes inscriptions païennes
Beugnot, Histoire de la destruction du paganisme

En 399, à Sufes Byzacène (Sbiba en Tunisie actuelle, Afrique occidentale romaine) les chrétiens brisent une statue d'Hercule. S'en suis une émeute lors de laquelle 60 chrétiens sont tués.
Puis en 408 à Calama (Guelma), suite à l'application de la loi d'interdiction du paganisme, insurrection païenne (un clerc tué et église incendié) avec la tolérance/complicité des autorité locales dénoncée par Augustin.
Claude Lepelley. Augustin et la cité romano africaine (page 33).


En 415, en Afrique "les ministres du culte païen exerçaient encore leurs fonctions, en dépit de toutes les lois rendues contre eux par la cour d'Occident


« les moines s’emparèrent de la grande église. Ce sont des hommes qui renoncent au mariage, qui remplissent les villes et les campagnes de communautés nombreuses, qui ne portent point les armes et qui ne rendent aucun service à l’état. S’étant toujours multipliés depuis leur premier établissement, ils ont acquis de grandes terres, sous prétexte de nourrir les pauvres, et ont en effet réduit tout le monde à la pauvreté. S’étant donc emparé de l’église, et en ayant gardé l’entrée, le peuple et les gens de guerre demandèrent la permission de réprimer leur insolence, et l’ayant obtenue, ils fondirent sur eux et en tuèrent un si grand nombre que l’église fut remplie de corps morts. Ils poursuivirent ensuite les autres, et n’épargnèrent aucun de ceux qui étaient vêtus de noir »
Zosime, V

(cf Gibbon XXXVII -> Churchill "Le vice inhérent au capitalisme c'est le partage inégal des richesses, tandis que la vertu inhérente au socialisme c'est le partage équitable de la misère")

Sur notre page contre Jésus voir aussi les critique des moines par Rutilius / le fanatisme suicidaire (Justin / Ignace / les donatistes)

 

    -> Survivance tardive du paganisme héllenique au moyen-âge

 

Le paganisme persiste pourtant et est encore vivace. Il est parfois majoritaire dans le peuple, par exemple en Provence en 580 (Grégoire de Tour cité par MacMullen p111 ou Beugnot) Il disparait en Espagne ou en Angleterre.

Un jour se présenta devant Nicétius un homme portant de longs cheveux et une longue barbe qui se jeta à ses pieds pont le remercier de l’avoir sauvé d’un danger qu’il avait couru sur nier, et comme le saint homme le rudoyait d’oser dire cela , il raconta que s’étant embarqué récemment pour l’Italie , il se trouvait seul chrétien au milieu d’une foule rustique de païens.
Grégoire de Tours, Les sept livres des Miracles, VII, XVII
 


    En Grande Bretagne "Les peuples oublièrent insensiblement les pratiques et jusqu’au souvenir du christianisme ; et le clergé breton tira peut-être quelque consolation de la damnation inévitable de ces idolâtres." Gibbon.

 

Christianisation de l'occident. "le christianisme imposait la célébration de ses fêtes à une société qu'on ne pouvait pas encore appeler chrétienne" "De l'aveu même des historiens chrétiens l'idolâtrie pendant le quatrième siècle régnait dans les campagnes de l'Italie. Les missionnaires chrétiens sortaient timidement des villes et n'osaient pas étendre au loin leurs travaux." "Avant l'arrivée de saint Martin en, ce pays, personne, ou presque personne n'adorait le vrai Dieu" [Après le sac de Rome]"Nous avons acquis la certitude que l'essence du paganisme était restée intacte, et que les dommages éprouvés par ce culte consistaient dans l'anéantissement de ses prérogatives politiques et dans la saisie de ses biens, atteintes assurément très graves, mais qui étaient étrangères à la religion proprement dite." "l'idolâtrie des habitants des campagnes ne consistait pas, comme on aurait pu le penser, en quelques hommages stériles rendus à des lieux et à des objets autrefois consacrés; elle allait beaucoup plus loin, puisque nous apercevons ici des temples, des autels , des victimes, des offrandes, et des prêtres encore fidèles aux plus cruelles prescriptions de leur religion ." "le polythéisme romain existait encore et d'une manière à peu près complète dans les Gaules pendant le sixième siècle" "Je suis parvenu à démontrer que pendant toute la durée du sixième siècle, l'état du culte romain dans les Gaules ne différa pas essentiellement de ce qu'il avait été pendant les cinquante dernières années du cinquième. Cette conclusion n'aura rien de surprenant quand on saura que le moine Jonas ne craignait pas d'avouer que de son temps la force de la religion était à peu près détruite dans la Gaule à cause de la négligence des évêques ' Le jugement sévère de Jonas est conforme à l'idée que nous donnent de ce siècle les autres documents historiques"
Arthur Beugnot, Histoire de la destruction du paganisme


    -  Au VIe siècle, Benoît de Nursie est confronté à des adorateurs d''Appolon regroupés au mont-Cassin en Italie.

  - VIIe siècle. Destruction de temples de Vénus, de Jupiter, de Mercure et d'Apollon qui avait été reconstruit par la population encore païenne dans certaines localités (Vie de saint Romain de Rouen).

   -  Au IXe siècle, en Grèce, l'empereur Basile découvre un village qui dispose encore d'un temple à Aphrodite, un autre à Poséidon au milieu d'un bois sacré (Constantin porphyrogénète)

« Au vu de la date tardive de ces témoignages sur la survie du paganisme [il faut bien admettre que] la vieille religion convenait très bien à la plupart des gens, ils l'aimaient lui faisait confiance, ils s’y épanouissaient et donc ils résistaient au changement » (Ramsay Macmullen. Christianisme et paganisme. Chapitre 2).  

Derniers païens exilés à Harran / Carrahe qui résistent jusqu'au XIe siècles en orient et sont à l'origine de l'age d'Or des sciences arabes.
l'hommage au paganisme du sabéen Thābit ibn Qurra cité par Bar Hebraeus (Chronicon Syriacum 168-169, cité
dans Ramsay Macmullen. Christianisme et paganisme) : « Bien que nombreux soient ceux qui ont été soumis à l’erreur [c.a.d. fait chrétiens] par la torture, nos ancêtres, grâce à la main de dieu [Aziz] ont enduré et parlé vaillamment, et cette cité bénie n’a jamais été souillée par l’erreur de Nazareth. Et nous avons reçu, et nous transmettrons, l’héritage du paganisme, qui est tenu en grand honneur dans ce monde. Heureux qui supporte le fardeau et dont l’espoir reste ferme pour l’amour du paganisme. Qui a fait le monde pour qu’il soit habité, et l’a recouvert de cités, si ce n’est les hommes bons et les rois du paganisme ? Qui a construit les ports et protégé les fleuves ? Qui a révélé les sciences cachées ? Sur qui s’est posée la divinité qui dispense les prédictions et enseigne la connaissance des événements futurs si ce n’est les sages païens ? Ce sont eux qui ont indiqué toutes ces choses et ont révélé la guérison des âmes, et ont fait briller leur rédemption, et ce sont eux aussi qui ont révélé les médecines du corps. Et ils ont rempli le monde avec les bons modes de vie et avec la sagesse qui est la première des vertus. Sans ces fruits du paganisme, le monde serait un lieu vide et pauvre, enveloppé de misère et d’indigence. »

-Sciences arabes / âge d'or de l'Islam ? "Tel est ce grand ensemble philosophique, que l’on a coutume d’appeler arabe, parce qu’il est écrit en arabe, mais qui est en réalité gréco-sassanide. Il serait plus exact de dire grec ; car l’élément vraiment fécond de tout cela venait de la Grèce. [...]  Cette science dite arabe, qu’a-t-elle d’arabe en réalité ? La langue, rien que la langue. [...] Cette science n’est pas arabe. Est-elle du moins musulmane ?  [...] L’islamisme, en réalité, a donc toujours persécuté la science et la philosophie. Il a fini par les étouffer. [...] Les libéraux qui défendent l’islam ne le connaissent pas. [...] L’islam a été libéral quand il a été faible, et violent quand il a été fort. Ne lui faisons donc pas honneur de ce qu’il n’a pas pu empêcher. Faire honneur à l’islam de la philosophie et de la science qu’il n’a pas tout d’abord anéanties, c’est comme si l’on faisait honneur aux théologiens des découvertes de la science moderne. Ces découvertes se sont faites malgré les théologiens. "
Renan, 
L’Islamisme et la science

 

 

    -> La persécution par l'église au moyen-âge


-  "Les successeurs de Clovis condamnèrent les paysans qui refusaient de détruire leurs idoles, à recevoir cent coups de verges ou de courroies".  Gibbon,

-  En Orient, vers 550-600, sous Justinien, Tibère II et Maurice la spoliation et la persécution des païens est la politique officielle de l'état Byzantin. Plusieurs personnages parfois haut placés sont exécutés pour paganisme, à l'image du gouverneur de Carrhae Acindynus (Ramsay Macmullen. Christianisme et paganisme. Chapitre 1). Justinien est probablement le plus grand criminel pour la foi chrétienne. C'est le Staline ou le Hitler du christianisme. Selon l'Histoire secrète de Procope de césarée, il a fait tuer des centaines de milliers peut-être même plusieurs millions de personnes. "je suis pénétré de cette conviction, que ce que je vais en écrire aujourd'hui ne paraîtra à la postérité ni digne de foi, ni même vraisemblable".

- En 681 le concile de Tolède demande de faire arrêter et décapiter toute personne coupable de pratiques non-chrétiennes.

"Le gouvernement aussi poussé par les évêques brandissait la menace et plus: amendes, confiscations, exil, emprisonnement, fouet, torture, décapitation et crucifixion. Qu'imaginer de plus ? Rien. On faisait pression de toutes les manières possibles et imaginables, même les plus extrêmes. C'est ainsi que l'on se fit obéir au bout de plusieurs siècles et que l'empire fut véritablement rendu chrétien" (Ramsay Macmullen. Christianisme et paganisme. Chapitre 2).  

 


    -> Destruction du paganisme nordique au moyen-âge

- Radbod Ier, roi des Frisons (alias Redbad, c. 680- c. 719) est connu dans l'histoire du haut Moyen Âge pour sa contribution au maintien de la culture frisonne. Il refusa de se convertir à la nouvelle religion et poussa les adeptes des coutumes païennes à la révolte.

- Au VIIIe siècle, Charlemagne, le soldat de l'église, parcourt l'Europe occidentale pour faire aux païens ce qu'Hitler faisait aux juifs. En 772, Charlemagne fait exécuter 5000 prisonniers païens qui refusent de se convertir au christianisme en une seule journée ! (Massacre de Verden). Les dernières poches de résistances païennes sont ainsi éradiquées. L'inquisition poursuivra son combat jusqu'au XVIIIe siècle.


Capitulaire De partibus Saxoniae  "Si quelqu'un méprise le jeûne du saint Carême par mépris du christianisme et mange de la viande, qu'il meure de mort  " "Si quelqu'un fait brûler le corps d'un défunt selon le rite païen, et que ses os retournent en cendres, il sera puni de la décapitation" "Si quelqu'un ensuite dans la nation des Saxons, caché parmi eux, non baptisé, choisit de se cacher, et dédaigne de venir au baptême, et choisit de rester païen, qu'il soit mis à mort." "Mais si, à cause de ces crimes mortels commis en secret, une personne s'enfuit volontairement chez le prêtre et veut faire pénitence par confession, elle sera dispensée de la mort par le témoignage du prêtre." "nous ordonnons que chacun donne un dixième de sa substance et de son travail à ses églises et à ses prêtres"

Note: A titre de comparaison, pendant la terreur à Paris durant 2 ans (entre 1793 et 1795), dans un climat de guerre civile et d'invasion étrangère, 2 639 personnes sont condamnées à mort par le Tribunal révolutionnaire. L'établissement du christianisme a donc été très violent ce que les chrétiens ont oublié !

- En Hongrie, en 1046 Révolte païenne de Vata.

- en Scandinavie. Les textes de Snorri Sturluson vantent les exactions chrétiennes "ceux qui n’abandonnaient pas le paganisme étaient expulsés, à d’autres, [Olaf Haraldson] faisait couper les mains ou les pieds ou extirpait les yeux, pour certains il les faisait pendre ou décapiter, mais ne laissait impuni aucun de ceux qui ne voulaient servir Dieu (…) à qui il affligeait de grands châtiments"

- Christianisation de l'Islande. "Olaf prit en otage des Islandais résidant en Norvège. Cela coupa tout échange entre l’Islande et son principal partenaire commercial. Certains des otages étaient des enfants d’éminents chefs islandais, et Olaf menaça de les tuer si les Islandais n’acceptaient pas le christianisme."

- la Lithuanie (dernière terre christianisée d'Europe en 1387). Au début du XIe siècle, le premier moine à se risquer dans ces confins païens de l'Europe, Bruno de Querfurt, se fait massacrer sans autre forme de procès. Piqués au vif par la résistance des Baltes, les chevaliers Teutoniques et leurs cousins de l'ordre des Porte-Glaive se mettent en tête de convertir ces irréductibles au fil de l'épée. Mal leur en prend. "Il était inconcevable pour les tribus qui peuplaient ces contrées d'accepter la religion que cherchait à leur imposer l'agresseur", souligne Algirdas Jakubcionis, professeur d'histoire à l'université de Vilnius.

 

 

"Nous avons résolu de faire honorer la sacro-sainte Église romaine plus que notre puissance impériale, qui n’est que terrestre ; et nous attribuons au sacré siège du bienheureux Pierre toute la dignité, toute la gloire, et toute la puissance impériale..." "« Nous lui donnons notre diadème, notre couronne, notre mitre, tous les habits impériaux que nous portons, et nous lui remettons la dignité impériale et le commandement de la cavalerie.... Nous voulons que les révérendissimes clercs de la sacrosainte romaine Église jouissent de tous les droits du Sénat : nous les créons tous patrices et consuls. Nous voulons que leurs chevaux soient toujours ornés de caparaçons blancs" " « Nous donnons en pur don au bienheureux pontife la ville de Rome, et toutes les villes occidentales de l’Italie, comme aussi les autres villes occidentales des autres pays. Nous cédons la place au saint-père ; nous nous démettons de la domination sur toutes ces provinces ; nous nous retirons de Rome, et transportons le siège de notre empire en la province de Byzance, n’étant pas juste qu’un empereur terrestre ait le moindre pouvoir dans les lieux où Dieu a établi le chef de la religion chrétienne."



Quand le christianisme devient-il majoritaire dans la population ? Il n'y aurait eu au maximum que 5% de chrétiens lors de la conversion de Constantin (1/20 de la population selon Gibbon, <5% selon Peter Heather) mais la religion était encore récemment persécutée, donc le nombre de chrétiens/sympathisants dissimulés rend le chiffre possiblement sous évalué. Le pourcentage de chrétien augmente rapidement pendant le IVe siècle, mais ils deviennent majoritaires qu'au Ve siècle. Il faut donc voir la politique de christianisation en regard du rapport de force politique.
    -  les chrétiens sont minoritaires au milieu du IVe siècle donc politique en faveur du christianisme, mais le paganisme est forcément toléré. Il monte peut-être à 25% vers 350 moment du début de l'affrontement.
    - A la fin du Ve siècle, lorsque les chrétiens sont en passe de bientôt devenir majoritaires, on assiste aux interdictions des pratiques païennes. En 408, Augustin se réjouit que sous la contrainte des lois impériales, de nouveaux fidèles sont entrés dans l'église (Lettre XCIII). Les chrétiens deviennent majoritaires en Gaulle vers 430 selon Salvien. Il reste alors seulement la liberté de conscience car la persécution pour simple défaut de croyance était juste à ce stade juste impossible à réaliser. Il y avait encore trop de païens.
    - enfin quand au  VIe siècle le christianisme sera devenu clairement majoritaire: suppression de la liberté de conscience pour les païens restant.

 

Remarque sur le judéo/christianisme n'est pas un concept inventé au XIXe siècle, mais c'est bien la religion/civilisation qui prend le pouvoir dans l'empire romain au tournant du Ve siècle. Le code théodosien

-393 La secte juive est protégée par la loi. Aucune synagogue ne sera spoliée, et aucun règlement ne pourra être promulgué pour interdire le judaïsme, même au nom du christianisme. CT 16.8.9
-397 Les Juifs ne doivent pas être harcelés ou attaqués ; les gouverneurs doivent maintenir la tranquillité des synagogues. Le clergé juif est autorisé à conserver ses propres lois et rituels et est exempté de service comme dans les sénats municipaux. Ils doivent avoir les mêmes privilèges que le clergé chrétien. CT 16.8.12
-412 Les Juifs ne peuvent pas être persécutés pour leur religion ou se voir confisquer leurs biens sans motif. Ils sont avertis, cependant, qu'ils ne peuvent pas manquer de respect au christianisme. CT 16.8.21
- 415 Les Juifs sont autorisés à détenir des esclaves chrétiens à condition que les esclaves soient autorisés à conserver leur christianisme. CT 16.9.3

 

 

V, VI et VIIème siècle
 L'effondrement total de l'occident

 

  S'il y a bien un événement majeur à retenir dans l'histoire, c'est la chute de Rome. C'est l'événement historique le plus important et marquant de tous les temps. En termes de destruction relative, la seconde guerre mondiale est une petite crise (15 ans plus tard rattrapé en population et en économie).

 

- Au début de la renaissance, Pétrarque parle de "dark ages" (âges sombres) pour décrire la période post-romaine. En effet, au V, VI, VIIe siècle, on constate l'effondrement complet de la civilisation en Occident, avec un retour à des conditions de vie comparables à celles de la préhistoire dans certaines régions.
     En effet, au Ve siècle, on constate la disparition des infrastructures, écoles, routes, aqueducs, constructions en pierre... perte d'usage de la monnaie, montée de l'illettrisme... (Bryan Ward-Perkins. La chute de Rome). La population de l'empire romaine avait atteint un record de développement (
Gibbon, p31). La ville de Rome perd 95% de sa population. L'eau y est coupée. Voir aussi Paul Van Ossel, collège de France.
   

    "De vastes forêt reparurent sur la surface de la Gaulle" Gibbon chapXXXVIII. Bruno Dumézil nous dit aussi que les forêts regagnent du terrain au VIe et VII siècle. Selon Ward Perkins, après la chute de Rome les trois quarts de la population disparait. Au levant, il faut attendre le milieu du XIXe siècle pour que la population remonte au niveau atteint sous l'antiquité romaine. (Ward-Perkins p234/235, p240).

    A Cologne, en Germanie romaine (80 000 habitants), l'eau potable était disponible pour tous les habitants (y compris les maisons des Ubiens) et ne serra rétablie qu'en 1872. Idem pour les égouts, il faut attendre 1881Il faut attendre 1700 ans pour que la ville possède un système de distribution d'eau comparable ! (documentaire: Rom am Rhein / Les Romains en Germanie).

 





       



L’analyse des glaces du carottage GRIP (Greenland Ice Core Project) montre que le taux de métaux dans l'air (plomb/cuivre - signe de l'activité humaine) connait un pic à l'époque romaine avant de chuter à un niveau quasi- préhistorique au moyen-âge.
"lead pollution sustained over decades at or above the levels of the high Roman Empire only began in the 12th century. However, because of the more northerly location of medieval mining regions to which the coring sites are more sensitive, this does not necessarily mean that the emissions at that time were higher than during the Roman period."
McConnel PNAS 2019


Paris a seulement 25 000 habitants au XIIe siècle



   Voir HérodoteVideos L'évolution de l'espérance de vie depuis l'Antiquité


    Alors que dans l'empire romain, 50% de la population savait lire, le taux d'alphabétisation  tombe à seulement 1% au moyen âge (Charlemagne ne savait pas écrire. Les Francs saliens sont analphabètes) Au Ve siècle, 95% des livres disparaissent. L'hostilité des pères de l'église envers la science ne favorise pas la transmission du savoir 
(Interview Dr Richard Carrier ; idem selon John Scheid).

Perte des livres pendant l'antiquité

        Grégoire de Tour écrit: "Aussi beaucoup d'hommes gémissaient disant : « Malheur à nos jours ! L’étude des lettres périt parmi nous, et on ne trouve personne qui puisse raconter dans ses écrits les faits d'à présent »". Walafrid Strabon (époque carolingienne): "La science entière en partie inconnue de ce monde barbare"
    Au VIIIe siècle, le souvenir heureux de Rome demeurait encore vivace en Occident, au point que Charlemagne se déclara "Empereur des Romains".

    Mots passés dans le langage sont un témoignage ancestral. Vandales était le nom d'un peuple. le seul mot hérité du wisigoth en espagnol c'est celui qui désigne le bourreau. Sur la  dizaines de mots passés du vieux-françique au français, on trouve guerre, haine, hache, frapper.

 

      De même, l'armée romaine compte 600 000 hommes sous Dioclétien, et peut déplacer des dizaines légions comptant au total plusieurs centaines de milliers hommes, des effectifs très supérieurs à celui des grandes batailles du moyen âge

-1066 Bataille Hastings (15 000 hommes par camps)
- 1214 Bataille de Bouvines (10 000 hommes par camps)
-1415 Bataille d'Azincourt (15 000 hommes par camps)

et même des croisades, où toute l'Europe coalisée compte (25 000 hommes - 5% de l'armée de Dioclétien dans l'antiquité). La situation militaire ne sera clairement dépassée qu'à l'époque napoléonienne.

      L'Occident mettra plus donc entre 1000 et 1500 ans à se rétablir selon le critère choisi, et avec l'aide d'innovations et de découvertes ultérieures venues d'Asie et d'Orient. Au siècle de louis XIV nait l'idée que l'on a égalé et peut-être désormais dépassé  les anciens (Charles Perrault, Le Siècle de Louis-le-Grand). En fait selon le critère choisi, la situation se rétablit à la renaissance (culture), voir seulement au XIXe siècle (taille des villes et des armées), et même la deuxième partie du XXe siècles (divorce, liberté sexuelle, tolérance des homo). Et si prend comme critère, la sagesse de l'exigence envers soi culture héroïque via la philosophie, alors on ne s'est jamais relevé de la chute de Rome.
    Pour Saint-Just: "
Le monde est vide depuis les Romains ; et leur mémoire le remplit, et prophétise encore la liberté".

 

     La parenthèse romaine. La chute de Rome s'amorce quand l'élite romaine très éclairée a perdu le contrôle politique de son empire, et les peuples sont seulement retournés à leur état antérieur avant la prospérité inédite apportée par la pax Romana.
     Le cas de l’Angleterre ou de la Gaulle montre un effondrement total quand Rome se retire, et illustre à quel poids Rome, malgré la violence de ses conquêtes ou d'excès ponctuels, était avant tout un protecteur plus qu'un oppresseur.
   
En Germanie, il n'y avait ni ville, ni usage de l'écriture et de monnaie avant le IIIe siècle. C'est véritablement la préhistoire. En gaulle, avant Caesar, on vivait sous la théocratie des druides qui avaient interdit l'écriture et dictaient les lois et les jugements. Les prêtes feront un peu prêt la même chose au début du moyen-âge en se réservant l’écriture et le savoir et en dominant les princes (jusqu’à Phillipe le Bel au XIVe siècle en France et la réforme protestante au XVe siècle).
    Idem pour les tortures Jules Caesar racontre dans sa Guerre des Gaules " [Vercingetorix] détermine les incertains par l'énormité des châtiments ; un délit grave est puni par le feu et par toute espèce de tortures ; pour les fautes légères il fait couper les oreilles ou crever un oeil, et renvoie chez eux les coupables pour servir d'exemple et pour effrayer les autres par la rigueur du supplice." On observe une aggravation de l'usage de la tortures particulièrement barbares réapparaissent au IVe siècle avec les empereurs chrétiens.
    Sur le critère de l'IDH (indice de développement humain), il n'y a pas photo. La civilisation gréco-romaine était très avancée par rapport à l'europe du nord qui était encore préhistorique. Aujourd'hui c'est l'inverse, il n'y a pas de problème à reconnaitre que l’Allemagne est plus avancée aujourd'hui que l'europe du sud.

     L'empire romain n'est pas une dictature fasciste: Rome c'était juste la civilisation contre la barbarie.  « La protection de la république a délivré la Gaule des discordes civiles et des invasions étrangères. En perdant votre indépendance nationale, vous avez acquis le nom et les privilèges de citoyens romains ; vous jouissez en commun avec nous des avantages durables du gouvernement civil ; et votre éloignement vous met à l’abri des maux accidentels de la tyrannie. Au lieu d’exercer les droits de la conquête, nous ne vous avons imposé que les tributs indispensables pour suffire aux dépenses qu’exige votre sûreté. La paix ne se maintient que par le secours des armées, et il faut que le peuple paye les armées qui le protègent. C’est pour vous, et non pas pour nous, que nous défendons les barrières du Rhin contre les féroces Germains qui ont si souvent tenté et qui désirent toujours de quitter leurs bois et leurs marais solitaires pour le riche et fertile territoire de la Gaule. La chute de Rome serait fatale à vos provinces ; vous seriez ensevelis sous les débris de ce grand édifice élevé par la sagesse et la valeur de huit siècles. Un maître sauvage insulterait et opprimerait cette liberté que vous auriez imaginé obtenir, et l’expulsion des Romains vous exposerait aux hostilités continuelles des conquérants barbares. » (Tacite cité par Gibbon, début du chap XXXVIII)

    
Retour en force de l'esclavage
 "Depuis le règne de Clovis, les lois et les mœurs de la Gaule tendirent, durant cinq siècles consécutifs, à étendre la servitude personnelle et à en assurer la durée." "Les hostilités perpétuelles des Barbares indépendants renouvelèrent et multiplièrent les sources lucratives de l’esclavage qu’avait presque totalement détruites le paisible gouvernement de Rome. Au retour d’une expédition heureuse, le Goth, le Bourguignon ou le Franc, traînait après lui une longue suite de bœufs, de moutons, de femmes et d’hommes, qu’il traitait tous avec le même mépris ou la même brutalité." "lorsqu’un seigneur mariait sa fille, il lui donnait pour présent de noces un certain nombre d’esclaves utiles qui la suivaient dans un pays éloigné, enchaînés sur ses chariots de peur qu’ils ne s’échappassent. La majesté des lois romaines protégeait la liberté du citoyen contre les effets du malheur et de son propre désespoir ; mais les sujets des rois mérovingiens pouvaient vendre leur liberté personnelle ; les exemples de cette aliénation étaient communs et habituels, et l’acte par lequel se consommait ce suicide légal, est énoncé dans les termes les plus affligeants et les plus honteux pour la dignité de la nature humaine" Gibbon.

"quels que soient les préjugés en faveur des Barbares, la réflexion accordera toujours aux Romains les avantages, non-seulement de la science et de la raison, mais aussi de la justice et de l’humanité." Gibbon


Les Goths eux admiraient la supériorité de Rome et admettaient ne pouvoir fonder un état avec le caractère belliqueux des Goths: "mon plus sincère désir est aujourd’hui de faire en sorte que la postérité reconnaissante loue le mérite d’un étranger qui employa la valeur des Goths, non pas à renverser, mais à défendre l’Empire Romain et à maintenir sa prospérité "
Adolphe roi des Goths cité en 412 par Orose.

Quelques réactions :
Peter Brown est dénoncé par Bryan Ward Perckins qui le traite de "Gourou".
Alan Cameron est combattu par Stéphane Ratti

note: Le kantien Luc Ferry (pro chrétien) est lui aussi pro Peter Brown



Hitler et le fascisme furent une résurgence de la barbarie antique que combattait Rome.

     - un racisme violent fondé sur un fantasme de la pureté absolue de la race (mythe du sang des dieux nordiques).
    - D'être guidés par des instincts bestiaux/brutaux plus que par la Raison.
    - De pratiquer des atrocités (sacrifices humains/tortures horribles...).
   - De piller au lieu de commercer. D'être incapable de contractualiser par le respect du droit. Hostile au commerce et ne respectant pas ses propres traités, dans l'idéologie nazi l'Aryen ne doit pas acheter, il peut prendre ; il ne doit pas payer, ni contractualiser, il doit voler (Les nazis et l'argent : au coeur du IIIe Reich | ARTE - 29-32 min).
   - de vivre en tribus guidés par le dictat arbitraire d'un chef / d'un roi au lieu de vivre sous le règne du droit universel dans une république.

 
  Les principaux reproches que les Romains font aux barbares se retrouvent donc dans la doctrine nazi/fasciste, qui est issue des contre-lumières et qui remonte en fait aux racines profondes et anciennes de l'Europe moyenâgeuse barbare ? (voir par exemple Evola, Autodéfense).

 

 

Le débat politique contemporain: l'antiquité tardive.

Il y a trois points de vue sur l'histoire de la chute de Rome.

-    le point de vue classique (qui accuse les chrétiens)
-    le point de vue chrétien de droite (qui accuse les barbares)
-  le point de vue chrétien de gauche
(pro-barbare) qui prône l'égalitarisme civilisationnel et qui nie l'évènement. "l'antiquité tardive".



Le point de vue chrétien a désormais remplacé le point de vue classique dans les milieux universitaires. Cette trahison n'est pas arrivée par une réaction droitière mais par la trahison des Lumières via la gauche postmoderne. On a une illustration de l'esprit de notre époque où les postmodernes ennemis de la Raison se sont alliés avec l'aile gauche du christianisme et les anciens marxistes.

    Pour ces gauchistes, il n'y a pas de sens de parler de chute de Rome car il y a égalité des civilisations. La gauche postmoderne, décolonialiste et immigrationistes, nie les invasions barbares ou leur portée au nom du relativisme culturel. Cette position utilise la notion « d’antiquité tardive » initialement développée par des auteurs pro-chrétiens pour dédouaner le christianisme de la chute de Rome (Peter Brown, Henri-Irénée Marrou, Alan Cameron, M-F Baslez…).
    Pour les partisans du relativisme culturel, la comparaison de ceux civilisations n’est pas possible car selon eux les critères de vérité sont internes à chaque culture, donc leur idéologie du relativisme et de l’égalitarisme généralisé contient déjà en soi la conclusion que la chute de Rome n’a jamais eu lieu. On voit que leurs présupposés idéologiques leur empêchent de voir la vérité.



    Alors qui a raison ? Le débat n'est pas tant sur des faits historiques sur lesquels on se base. On est un peu près d'accord sur les faits bruts mais pas sur leur interprétations. Le vrai débat n'est pas entre historiens, mais il est philosophique.


Philosophie et histoire. Toute analyse et jugement historique repose donc d'abord sur des jugements moraux et philosophiques a priori. Par conséquent, derrière les débats historiques comme la cause de
la chute de Rome), se cache en fait généralement un débat philosophique de fond.  Prétendre parle d'histoire objectivement pour tout le monde sans dévoiler sa position philosophique est absurde. Moi, je ne me cache pas, je suis un rationalise et oui cela ne peut que diffère du point de vue chrétien sur la question.

Je pense avoir démontré ici que la culpabilité du christianisme c'est le point classique :
- Machiavel, Montaigne, Voltaire, Rousseau, Gibbon, Renan, Nietzche et plein d'autres...
- c'est-à-dire les humanistes de la renaissance et les Lumières
- cela renoue avec ce que disait déjà les païens dans l'antiquité
- cette thèse a été soutenue par plusieurs grands historiens.
- et c'est le point de vue de ceux qui abordent aujourd'hui la question scientifiquement (les archéologues).


    Ainsi, notre rapport à l'histoire de Rome est un révélateur de notre appartenance civilisationnelle. Aujourd'hui, cette dérive en dit moins sur Rome que sur nous-même. Les valeurs Romaine ont inspiré les élites occidentales depuis la Renaissance. Quand la version de l'histoire qui prévalait depuis 1000 ans en Occident est désormais complètement niée et a fait un 180°C complet, on est en droit de se demander si cette trahison n'est pas l'un des signes d'un changement de civilisation. La rupture est consommée par rapport à l'esprit qui prévalait en Occident depuis la Renaissance. Oui je crois que notre rapport à l'histoire de Rome est un révélateur. Pour moi qui suis plus proche des anciens que de mes contemporains, aider à prendre conscience de cette situation déplorable, c'est se mettre en capacité de mieux résister et de créer les conditions propices à une Renaissance des idées classiques contre les irrationalistes des deux bords, parfois opposés, mais parfois aussi alliés et qui dominent ensemble aujourd'hui contre nous, les véritables héritiers de la grandeur de la Rome antique.





Hommage à la Rome éternelle

"quel empire, en effet, comparer au tien ? Vainqueurs de leurs voisins, les Mèdes n'ont uni leur territoire qu'à celui des Assyriens ; les rois puissants des Parthes, les souverains de Macédoine n'ont dominé due successivement. Et ce n'est pas qu'à ta naissance tu aies pu disposer de plus de courages, de plus de bras ; mais tu as été plus prudente et plus sage. Des guerres justement entreprises, ta modération pendant la paix ont fait briller ta gloire et mis le comble à la puissance. Tu es moins grande par ta royauté même que par la conduite qui t'en a rendue digne ; tes actions surpassent encore tes magnifiques destinées. Entreprendre de compter tes gloires attestées par tant de trophées, ce serait vouloir nombrer les étoiles. Tes temples resplendissants éblouissent nos yeux étonnés : telle doit être la demeure même des dieux."
le gaullois Rutilius en 417.


Comparaison avec le déclain actuel par Majorianus

L'Europe de l'Ouest est-elle le nouvel Empire Romain de l'Ouest

Empire Romain vs Rome Aujourd'hui


 




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Critique de l'Apport du christianisme à la Civilisation occidentale

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Open letter to Maiorianus


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